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rond avec couvre-nuque, comme le portent encore les femmes de quelques tribus de Tripolitaine.

Un certain nombre de leurs coutumes se retrouvent chez les Berbères aujourd'hui encore à quatre ans on appliquait sur la tête des jeunes enfants des moxas en laine de brebis, destinés à empêcher tout flux d'humeur venant de la tête : les Kabyles cautérisent encore les jeunes enfants dans le même dessein.

Ils habitaient des huttes formées de quelques pieux soutenant des nattes tressées de jonc et de tiges d'asphodèles, << Les chefs des Libyens, dit Diodore de Sicile, n'ont pas de villes, mais seulement, dans le voisinage des sources, des tours dans lesquelles ils renferment leurs richesses. » Polybe les représente comme menant à travers les bois et les plaines l'existence la plus misérable.

Ceux des régions fertiles vivaient de l'agriculture et obéissaient à des rois; les autres vivaient de brigandage et ne se fixaient nulle part.

Leurs armes sont tantôt un bouclier à double échancrure, une hache, des arcs et des flèches, tantôt un bouclier rond, trois javelots et des pierres renfermées dans un sac de cuir.

Toutes ces peuplades sacrifiaient des victimes au soleil ou à la lune. Elles adoraient aussi les anciens souverains, les génies tutélaires des villes. Chaque peuple avait en outre son Dieu particulier : c'étaient Siniferne ou Mastiman, Ifri ou Ifru, dieu des cavernes, Gurzil à qui l'on faisait des sacrifices humains.

Certaines peuplades offraient des particularités intéressantes.

Les Mauretaniens étaient les plus avancés. Ils se coiffaient avec soin et portaient des bijoux; ils combattaient à cheval avec une longue lance et des sabres; les fantassins portaient des boucliers en cuir d'éléphant.

Les Nasamons épousaient plusieurs femmes, qui d'ailleurs n'étaient pas tenues à la fidélité. Ce peuple honorait la mémoire des hommes qui s'étaient dis

tingués par leur justice et leur courage. Les Nasamons ne reconnaissaient d'autres divinités que les âmes des morts, juraient par elles et les consultaient comme oracles: à cet effet, ils dormaient sur les tombes des ancêtres, et réglaient leur conduite d'après les songes qui leur étaient envoyés. Certaines tribus berbères du Sahara ont conservé cette coutume.

Ils s'abritaient dans les rochers, et les premières cavernes du pays des Matmata furent creusées par eux. Comme les Nasamons, les Garamantes allaient presque nus, munis d'un bouclier de peau et de longs javelots. Les Ancéens se distinguaient par les arrangements de leurs coiffures, dont on retrouve encore les divers types chez les Amazigh du Rif. Leurs femmes portaient, outre leur tunique, un pardessus en peau de chèvre, orné de franges de cuir.

Ces tribus offraient une incroyable facilité de mœurs1: les femmes des Gindanes portaient au bas des jambes autant de bandes de cuir qu'elles avaient eu d'amants, et celles qui en portaient le plus étaient les plus considérées, comme ayant été les plus recherchées.

A l'est de Cyrène, enfin, les tribus avaient pris les mœurs égyptiennes.

Les Gétules, qui habitaient le revers méridional des hauts plateaux, restèrent à l'abri du contact des peuples qui envahirent aux différentes époques les régions côtières : on ne connaît pas l'origine de leur nom que l'on a voulu retrouver dans le nom de certaines tribus berbères, les Guezzoula par exemple. Groupés par familles, ils erraient sans abri à la suite de leurs trou peaux, ne portant qu'une tunique flottante et un manteau de peau attaché par une agrafe.

La question des sépultures de ces peuples est particulièrement intéressante, et a donné lieu à des travaux nombreux. On rencontre des tumuli ou redjem, amas

1. Voyez Hérodote, V, 17.

de pierres recouvrant en général un sarcophage rudimentaire formé de larges dalles; des dolmens, semblables à ceux des autres régions méditerranéennes et formant, en somme, une chambre funéraire de grandeur variable; enfin, des tombeaux ronds que l'on nomme chouchets. Les tumuli sont particulièrement nombreux Oranie et dans le Hodna, les dolmens au contraire dans l'est (ancienne Numidie); ils sont inconnus au Sahara.

en

Toutefois, on ne peut rien conclure de la présence de ces monuments quant à l'origine des populations; on ne peut même pas les dater. Il est certain seulement qu'une partie d'entre eux sont relativement récents, et que leur construction s'est maintenue dans l'Afrique du Nord plus longtemps qu'ailleurs 1.

L'ARRIVÉE DES CANANÉENS. Il est vraisemblable qu'à partir du xive siècle, une première colonisation sidonienne s'établit sur les côtes de l'Afrique du Nord 2.

1. On trouve encore d'autres monuments funéraires de type spécial, mais sans doute plus récents :

C'est d'abord le médracen ou maghdasen, qu'on rencontre dans la région de Batna : c'est un grand cône à gradins, construit sur une base cylindrique de 58 mètres de diamètre, qui est évidemment le tombeau d'un chef puissant; on l'a attribué au roi numide Syphax. Le décor en est gréco-punique.

C'est encore le Kobr Roumia (tombeau de la Chrétienne) près de Cherchell, où l'on a voulu voir le mausolée de Juba II. Il est manifestement copié sur le médracen.

Enfin, datant de l'époque chrétienne, le mausolée de Blad · Guitoun (en Kabylie près de Ménerville), évidemment construit pour un prince indigène dans une région où les Romains n'ont guère pénétré; il est analogue au Kobr Roumia.

En dernier lieu, les djedar du Sud-Oranais, tumuli sur base carrée qui atteignent jusqu'à 40 mètres de haut. Ces djedar dateraient de l'époque byzantine (voyez Gsell, op. cit., t. II, p. 426).

Il est intéressant de constater qu'au fond ce sont toujours des chambres funéraires en pierres affectant tantôt la forme de tumuli, tantôt de dolmens, les corps étant ensevelis assis.

On peut également les rapprocher des pyramides égyptiennes. 2. Selon la légende, le premier conquérant fut Cheddad, fils

1

Ces navigateurs, à qui les légendes ont attribué sur la population une influence qu'ils n'eurent certainement pas, ne conquirent pas le pays. Ils demeurèrent sur les côtes, en face des Libyens, auxquels ils donnèrent leur religion la divinité principale des Cananéens, Baal (ou Kronos ou Saturne), détrôna Ammon, dieu des Éthiopiens.

Les comptoirs principaux des Cananéens étaient à cette époque Leptis, OEa (Tripoli) et Sabrata.

Ce n'est que longtemps après, au viie siècle, que les Tyriens s'établirent sur cette côte magnifique, qui semble l'emplacement désigné d'une importante cité, et dont la situation géographique est unique dans la Méditerranée. La ville qu'y fondèrent les nouveaux venus devait devenir la capitale des possessions puniques,

d'Ad ou Sadid, fils de Baal, premier roi des géants chez les Himyarites et qui fut adoré comme un dieu par la suite. D'après une autre légende, le pays aurait été conquis par un des successeurs de Cheddad, nommé Doul Kourneïn.

Enfin, d'autres traditions indiquent, comme père de la race, Afrikis, qui aurait donné son nom au pays. Cet Afrikis (que les uns donnent comme un fils de Kronos, les autres comme un fils d'Hercule) était un Cananéen venu avec ses compagnons des pays d'Orient et aurait fondé la race berbère, ce qui est évidemment faux. D'après un autre récit, chassé de ses états par un roi assyrien, il se serait enfui vers l'occident jusqu'à l'Ifrikya, où il se serait établi en donnant son nom à la contrée.

Les historiens arabes, qui semblent préoccupés de rattacher les Berbères à la même souche que les Arabes, rapportent cette légende en lui donnant une forme un peu différente : d'après eux, Ifricos, prince de la dynastie des Tobba, rois de l'Yemen, aurait amené dans le pays les Ketama et les Sanhadja qui se fondirent avec d'autres habitants déjà établis dans le pays.

En réalité, Africa vient de Afarik ou Aourigha. C'était le nom d'une tribu du pays qui forme encore dans le Sahara une importante fraction des Touareg Azgar. Les Aouraghen étaient une des plus puissantes familles libyennes, et leurs descendants parlent encore un des principaux dialectes de la langue tamachek. Ils habitaient le territoire de Carthage et plus tard les Romains donnèrent leur nom à toute la Libye grecque. Ibn Khaldoun fait descendre des Aouraghen les deux grandes fractions berbères des Sanhadja et des Lemta.

la riche Carthage, et, plus tard, la capitale du monde romain d'Afrique. Elle reçut, par opposition à Utique (Outik), la «< vieille », le nom de Cart Hadchat (en phéni cien la nouvelle ville), dont on a fait Carthage.

Elle grandit rapidement et ses marins allèrent bientôt vers l'Occident fonder sur les côtes d'Afrique Djidjelli, Bougie, Ténès, Cherchell et, jusqu'au delà de Gibraltar, près de 300 comptoirs, parmi lesquels Tingis (Tanger). et Sala (Rabat).

La prospérité commerciale de la ville était considérable vers les ve et ive siècles. D'autre part, la Zeugitane, où florissaient alors plus de 200 cités, produisait en même temps que des céréales, des fruits et du vin, des bois de construction ou de luxe; elle commença à donner de l'huile quand Annibal eut propagé la culture en grand de l'olivier. A la même époque, Carthage fut en guerre avec les rois de Sicile. L'un d'eux, Agathocle, conquit le pays et trouva déjà un allié dans un roi des Libyens ommé Elymas.

Carthage s'efforçait de tenir en respect les populations indigènes, et la noblesse punique contractait des alliances avec leurs rois. Nous avons déjà dit que les dieux puniques étaient adorés jusqu'à Cirta (Constantine); la langue punique était sans doute parlée dans les environs immédiats de la ville et par les indigènes lettrés, puisque le roi numide Hiempsal employa, pour écrire son Histoire, cette langue et non pas le libyque; mais c'est tout ce que nous savons de l'influence de la civilisation carthaginoise sur les indigènes. Il est certain que ceux-ci supportaient en frémissant le joug que prétendait leur imposer cette cité aussi riche que peu guerrière, qui chargeait des mercenaires du soin de la défendre.

Carthage, en effet - il importe d'insister sur ce point, - ne fut jamais qu'un comptoir de commerçants étrangers, au milieu des indigènes, Les Carthaginois n'avaient pu leur enlever la propriété de leur territoire, et se contentaient, tout en traitant avec eux, de leur imposer PIQUET. Afrique du Nord.

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