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Aux colonies, où la recherche et le traitement de ce parasitisme doivent être faits avec le plus grand soin, avant le départ des contingents, les médecins régleront leur façon d'agir suivant les possibilités qu'ils auront de dépistage et de contrôle de traitement par des examens microscopiques (proximité de laboratoires, instituts, hôpitaux ); suivant l'index parasitaire moyen des indigènes de la colonie (un index très élevé pouvant autoriser un traitement global de tout le contingent); suivant, enfin, les signes cliniques (frustes ou marqués) d'helminthiase, qu'ils devront rechercher avec grand soin, et dont la constatation sera toujours suivie d'un traitement, au moins d'épreuve.

En France, dans les années qui vont suivre, le dépistage et le traitement ayant été assurés dans les colonies d'origine, notre action sera uniquement de contrôle, et portera sur la surveillance, dans la crainte de rechutes, des tirailleurs qui nous auront été antérieurement signalés comme parasités et traités, et sur la recherche, par les signes cliniques, des cas ayant passé jusqu'à ce jour inaperçus et qui pourront, les examens microscopiques nécessaires se trouvant limités, être envoyés aux laboratoires des régions pour recherches des œufs d'helminthes dans les selles, avant et après traitement.

Mais actuellement, où les contingents indigènes dans nos régiments sont fortement parasités, et où il nous est impossible de faire des recherches méthodiques par le microscope, le traitement qui consistera dans l'absorption de 5 grammes de thymol, à deux reprises, et à deux mois d'intervalle, sera réglé sur les données suivantes :

Pour la première prise de thymol, on distinguera :

a. Les troupes dont l'index parasitaire est supérieur à 85 p. 100 (Indochinois) dans lesquelles tous les indigènes seront traités indistinctement;

b. Les troupes, dont l'index est inférieur à 85 p. 100, dans lesquelles seront recherchés, en vue du traitement, et dans des proportions équivalentes aux index constatés (78.35 p. 100

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pour les Malgaches, 67.08 p. 100 pour les Sénégalais), les sujets qui cliniquement paraissent plus ou moins parasités.

Les signes frustes qui pourront faire penser à l'helminthiase sont les suivants: embarras gastrique à allure chronique, état général déficient, décoloration des muqueuses, aspect bouffi et couleur terreuse de la face, l'apathie et l'indolence. Ces derniers signes pourront être signalés par le commandement.

Pour la deuxième prise de thymol, on ne soumettra au traitement que les indigènes qui n'ont pas paru améliorés par le premier traitement, ou dont l'état n'est pas redevenu normal. Il sera, chaque fois que cela sera possible, fait sous le contrôle du microscope.

Recherche d'efficacité des antihelminthiques.

En vue de rechercher le pouvoir d'efficacité contre l'helminthiase, des médicaments fournis par les approvisionnements de l'armée, et en particulier du thymol, nous avons prescrit dans certains de nos régiments, des essais de traitement avec ce mé dicament.

La Maison Poulenc, d'autre part, nous ayant offert à titre d'échantillon, une certaine quantité de tétrachlorure de carbone, des essais ont été également tentés avec ce nouveau produit. Le traitement au thymol a été effectué sur 405 tirailleurs, la plupart multiparasités; on a constaté les résultats suivants :

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Les essais au thymol, faits sous l'étroite surveillance des médecins des régiments, ont été, la plupart du temps, bien supportés, les tirailleurs reprenant leur service le lendemain sans incidents. Ils n'ont donné lieu à aucun accident sérieux. Certains se sont plaints de sensation de brûlures, et ont présenté des vomissements, mais qui n'ont été que passagers. Quelques-uns ont conservé, pendant plusieurs jours, un état de fatigue générale assez marqué.

Le traitement au tetrachlorure de carbone a été effectué sur 167 tirailleurs, presque tous également multiparasités, et a donné les résultats suivants

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La plupart des malades n'ont présenté, au cours du traitement au tétrachlorure de carbone, que des malaises passagers : vertiges avec douleurs abdominales, et ont pu reprendre leur service le lendemain. Quelques-uns ont eu, les jours suivants, de l'embarras gastrique avec prostration, accidents qui ont persisté pendant quelques jours. L'un d'eux, enfin, a présenté un état sérieux caractérisé par des vomissements répétés avec adynamie, subictère, congestion du foie, albuminurie et fièvre élevée. Ces accidents n'ont rétrocédé qu'au bout d'une dizaine de jours.

Il ressort de ces essais :

1° Que ces médicaments sont loin d'assurer, en une seule

fois, la stérilisation complète des individus parasités et qu'il y a lieu de procéder à des traitements successifs;

2° Que le tétrachlorure de carbone paraît avoir une efficacité légèrement supérieure au thymol en ce qui concerne les ankylostomes et les ascaris, mais inférieure pour les trichocéphales. Étant donné son peu de supériorité sur le thymol, et d'autre part les accidents peu fréquents, mais assez sérieux, qui ont été constatés au cours de son emploi, nous ne pensons pas qu'il soit nécessaire d'introduire ce nouveau médicament dans les approvisionnements de l'armée.

B. Hygiène des lieux d'aisance.

Pour obtenir un résultat dans la prophylaxie individuelle. et surtout collective de l'helminthiase, les mesures suivantes s'imposent :

1° Veiller à la propreté scrupuleuse des lieux d'aisances actuellement en service; les indigènes ne devront pas y pénétrer pieds-nus, pour éviter les infestations par ankylostomes. Badigeonnages fréquents des parois à la chaux;

2o Faire installer aussi vite que le permettront les crédits des systèmes à chasse d'eau, avec fosse septique, ou tout-à-l'égout, suivant les localités;

3° Si ces installations ne sont pas possibles, utiliser les systèmes à tinettes mobiles, mais sous la condition d'en avoir un double jeu pour chaque lieu d'aisance, et de procéder de la façon suivante pour leur installation et leur entretien :

Les tinettes sont placées dans leurs cases respectives sur des traverses de fer, de facon à ne pas reposer directement sur le sol, ce qui évite les souillures.

Chaque fois qu'une tinette est vidée de son contenu, elle doit être badigeonnée au lait de chaux extérieurement et intérieurement. La terre souillée sous la tinette doit être enlevée à la pelle: les parois de la case badigeonnées également à la

Des solutions antiseptiques fortes: lait de chaux en solution à 5 p. 100, sulfate ferreux, sel brut, sont placées au fond des tinettes dans le but de détruire les œufs et larves d'helminthes;

4° Les vidanges seront, autant que possible, incinérées, et, en aucun cas, ne devront être vendues comme engrais sans stérilisation préalable (mélange à la chaux, dessiccation, etc.).

LUTTE CONTRE LA MALADIE DU SOMMEIL

EN AFRIQUE OCCIDENTALE FRANÇAISE,

par M. le Dr BRAU,

re

MÉDECIN PRINCIPAL DE 1 CLASSE,

La maladie du sommeil paraît avoir existé de tout temps dans les régions nigériennes. André Leger rapporte, d'après M. Delafosse, un passage d'Ibn-Khaldoun dans lequel il est relaté qu'un des empereurs de Mali, empire nigérien ayant existé du xi au XVII° siècle, Mari-Diata II, mourut de la maladie du sommeil, maladie très commune dans ce pays, écritil. Cette indisposition commence par des accès périodiques et réduit enfin le malade à un tel état qu'à peine peut-on le tenir un instant éveillé (1).

Dans les temps modernes, l'affection a persisté mais elle ne se manifeste plus que dans quelques foyers endémiques, fort peu importants si on les compare aux foyers permanents du Congo et du Cameroun. Nulle part en tout cas, la maladie ne prend l'allure épidémique, si dangereuse en Afrique équatoriale.

Toutefois, dès 1903, on commence à s'en préoccuper. Au mois d'avril de cette même année, le Ministre des Colonies,

(1) Bulletin de la Société de Pathologie exotique, 1912, p. 851.

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