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Telar'ma finirent par se soulever en masse. La querelle durait déjà depuis assez longtemps, lorsque ceux-ci envoyèrent une députation à Taïeb, pour le prier de se rendre à la zaouïa de Merelsa, afin de s'entendre et de mettre un terme à une dispute préjudiciable aux deux partis. Taïeb accepta la proposition, et se rendit sans défiance au lieu convenu, accompagné de quelques serviteurs seulement. Les Telar'ma, fidèles au rendez-vous, s'y rendirent en grand nombre, avec la ferme intention de tuer leur kaïd. Lorsque Taïeb reconnut la situation des choses, il chercha à éviter le sort qui l'attendait, et se retira dans une des chambres de la zaouïa dont il ferma les portes. Les Telar'ma, irrités de voir échapper leur proie, et ne pouvant d'ailleurs forcer les portes de l'asile où s'était réfugié le kaïd, se précipitèrent sur la toiture, dont ils arrachèrent les tuiles et à laquelle ils mirent le feu.

Taïeb périt dans cet incendie avec six de ses compagnons. Lorsque la nouvelle de ce forfait arriva à Constantine, grande fut l'irritation du bey, et le châtiment ne se fit pas attendre. Les Telar'ma furent razės, et cinquante cavaliers eurent la tête tranchée.

Braham bey (1818). - Du temps de Braham bey, un indigène des Zemala s'étant hasardé à aller couper du bois chez les Oulad Sellam, ces derniers se précipitèrent sur lui et le massacrèrent, pour être quittes, disaient-ils, avec les Telar'ma, qui leur devaient une tête.

La vengeance ne tarda pas. Le cheïkh Salah partit aussitôt qu'il eut appris le meurtre, avec les cavaliers qu'il avait sous la main, surprit les Oulad Sellam qui ne s'attendaient à rien, et leur tua un homme.

Non contents de cela, les Zemala furent se plaindre à Braham bey, qui, ne demandant qu'à trouver sur qui tomber, saisit avec empressement l'occasion qui se présentait. Les Oulad Sellam furent razés, cinquante des leurs tués et leurs troupeaux enlevés.

Les deux tribus vécurent en paix pendant un certain temps; mais les haines mal éteintes se rallumèrent bientôt.

Sous le commandement du général Galbois, les troupeaux des Telar'ma ayant poussé un peu loin dans les Sebakh, deux cavaliers des Zemala, qui accompagnaient les patres, furent victimes de leur imprudence et tués par les Oulad Sellam. Les Telar'ma se levèrent en masse et firent irruption sur le territoire de l'ennemi, qui prit heureusement la fuite et chercha un refuge dans les montagnes. Les troupeaux tombèrent aux mains des assaillants qui, entraînés par leur ardeur, suivirent les Oulad Sellam dans la montagne, où ils perdirent beaucoup de monde.

Les Oulad Sellam, humiliés et voulant à toute force tirer vengeance de leur défaite, soudoyèrent les tribus du Sahara, et, forts de ce secours, envahirent le territoire des Zemala, entourèrent un douar campé près de Bekikia, où ils tuèrent 14 hommes sans défense, puis se retirérent sans faire aucun butin. Les Telar'ma, avertis trop tard, se mirent à leur poursuite sans pouvoir les atteindre, et fatigués d'une chasse infructueuse, ils rentrèrent enterrer les morts. Depuis cette dernière querelle, les Telar'ma n'ont plus eu aucun démêlé avec leurs voisins; ils ont pu être comptés au nombre des tribus paisibles de la province.

Nous avons passé sous silence les événements qui eurent lieu du temps d'El-Hadj Ahmed bey, parce que les Telar'ma firent cause commune avec les Oulad Abd enNour, dont nous avons déjà écrit l'historique dans ce recueil (1).

LES SEGNIA

Le territoire de la tribu des Segnïa est situé à 40 kilomètres environ au sud-sud-est de Constantine, sur la route qui mène de cette ville à Tebessa en passant par Aïn Beïda. Son étendue est d'environ 110,000 hectares; il est habité par une population de 10,577 individus.

Les Segnïa sont bornés: au nord, par l'ancien kaïdat des azels, le territoire civil des villages européens des Oulad Rahmoun et du Khroub, et la tribu des Amer Cheraga; à l'est, par la tribu de Behira Touïla et par celle des Haracta d'Aïn Beïda; au sud, par cette dernière tribu et celle des Achach de Batna; à l'ouest, enfin, par la tribu des Zemoul.

En raison de son étendue, ce territoire présente un sol varié. Dans la partie nord, il est montagneux; on y remarque le djebel Malessi, dont les premières crêtes commencent à 3 kilomètres à l'ouest de Sigus; ces crêtes, en se continuant vers le sud, forment le djebel Fortas; en arrière

(1) Voir le Recueil de la Société Archéologique, année 1864.

du Fortas, vers l'ouest, se trouve le djebel Tadjeno unit. Au djebel Fortas succède le Guerioun (1727 m. de haut), dont il est séparé par le Fedj bou Sâdia. Toutes ces montagnes ont des pentes très-raides et sont couvertes de broussailles peu élevées; leur charpente rocheuse est recouverte en partie par une mince couche de terre; la plus grande partie est dénudée et ne présente aucune végélation.

La grande plaine de Kercha succède au Guerioun et occupe la partie centrale de la tribu; c'est là où les cultures sont les plus abondantes. A l'ouest, se trouve la crête rocheuse du Fedjoudj, s'étendant jusqu'à la limite de Aïn Beïda; au sud-est de cette plaine commence le djebel Oum Kecherid, allant de l'ouest à l'est jusqu'à la limite avec Aïn Beïda; il est peu élevé, couvert de broussailles près des crêtes; il est formé, comme le Guerioun et le Fortas, de plates-formes rocheuses, recouvertes de peu ou point de terre. Au sud-ouest de Kercha, à la limite avec les Zemoul, par l'Hanout Serir, montagne dénudée, à laquelle succèdent le Chebka, ainsi nommé à cause de sa forme, et les djebel Ahmar Kheddou, Besmine et Hank el-Hamara, à la rencontre avec la limite d'Aïn Beïda. L'Hanout Serir n'a que de rares broussailles; les autres montagnes sont en partie couvertes d'herbe pendant l'été; plusieurs parties du Chebka sont même cultivées; les terres du versant sud sont gypseuses.

Après cette ligne de montagnes, vient une grande plaine de 30,000 hectares, variée par les deux lacs salés d'Hank el-Djemel, les marais Guerra Saïda et Bou Djenib à l'ouest; les djebel Mar'sel, Hank el-Djemel et Yeddou au centre; tous les trois ont des broussailles et même

des arbres pouvant servir au chauffage. Le djebel Fedjoudj et l'Hanout Kebir, sur la limite générale de la tribu, forment une partie de cette plaine, le premier au sud et le second à l'ouest; ils sont très élevés et couverts de broussailles.

Cette plaine faisait partie de l'Aguedel el-beylik; elle n'a jamais eu que quelques charrues cultivées, et elle sert surtout de parcours, avec le Fedjoudj, aux nombreux troupeaux des indigènes qui viennent y camper pendant l'hiver. Une grande partie pourrait être facilement cultivée, car la terre végétale a une couche très épaisse et est de très bonne qualité, surtout le long du pied du Fedjoudj.

Il n'y a pas de rivière considérable dans la tribu; la plupart des cours d'eau sont des torrents, à sec pendant la plus grande partie de l'année. - Parmi les plus importantes, on remarque l'oued Kleb au nord, l'oued Kercha dans la plaine du même nom; l'oued Ourkis sur la limite avec Aïn Beïda; l'oued Miseb dans l'Aguedel el-beylik.

II.

A l'époque romaine, une ville d'une certaine importance, dont on voit encore les vestiges sur un mamelon au pied duquel coule l'oued el-Kleb, existait aux Segnïa. C'était Sigus, une des trentes villes libres signalées par Procope. M. Cherbonneau l'a explorée avec soin, et a publié dans ce Recueil (année 1868, page 428), le résultat de ses intéressantes découvertes. Une inscription, relevée au milieu des ruines de l'antique cité, et encastrée actuellement dans le mur du caravanserail de Sigus, éta

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