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Ruines romaines. On n'avait observé jusqu'ici de ruines maines dans le sud de la province d'Alger qu'à Messad, village très-prospère, situé à 88 kilomètres est de Laghouat; la grande carte topographique de 1852 en indique cependant sur le sommet du massif Boukahilien (1) entre Demmed el Amoura, petite bourgade dont les jardins, vus de Houaci-Zian (puits de Zian), seinblent un berceau de verdure suspendu au flanc de la montagne. Des renseignements en indiquent aussi, mais avec moins de certitude, dans le bassin de Zar'ez, entre Guelt es-Stel et le rocher de sel, à Er-Redjem; ainsi qu'à Aïn-Guetïa, entre Charef et la plaine, aujourd'hui cultivée de Tademit.

Dans la chaine du Sahari, qui est couverte de pins, de chênes, de genévriers, d'arbousiers et est surtout remarquable par les forêts du Gaïgat, de l'Oued-ben-Alia, de l'Oued-Chela, j'ai observé deux ruines que l'on peut, je crois, considérer comme d'anciens postes romains: la première couvre de ses débris les environs d'Aïn-el-Hammam (source thermale) qui mêle ses eaux à celles de l'Oued-Hadjia (2) et est située à quelques kilomètres de Charcf; la seconde est dans les environs de Djelfa, sur la rive droite de la rivière entre le bordj et le moulin.

Le Ksar ruiné de l'Oued-Hadjia est d'une étendue assez considérable; on y remarque une dizaine de pierres taillées placées. verticalement. On n'y trouve ni fragments de poteries antiques, ni tambours de colonnes, ni inscriptions; en un mot, il ne s'y rencontre aucune trace authentique de la présence des Romains. Ce poste avait-il pour objet de surveiller le col de Bab-AïnMessaoud, passage près duquel se trouve aussi une fontaine considérable?

Quant au poste romain de Djelfa, il a quarante pas de large sur quarante-cinq de longueur; autour de sa cour intérieure, il y a de nombreuses chambres dont on peut encore tracer le plan. Les murs sont båtis en pierres bien appareillées, sans emploi de

(1) La carte de la province d'Alger publiée en 1846 indique déjà des ruines romaines, notamment à Djelfa. Ces ruines avaient été vues pendaut l'expédition du général Marcy à Laghouat et à Aïn-Madi, en 1844.

Le massif Boukahilien dont parle M. Reboud, a pour centre le mont Boukahil, qui s'élève sur la limite des provinces d'Alger et de Constantine et est un des entrefaits méridiouaux du Tel, en prenant ce mot dans sa plus large et vérttable acception. Note de la rédaction.

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(2) La carte de 1856 écrit fladjila. A ce sujet, nous prions nos correspondants de vouloir bien tracer les noms propres d'une manière lisible et de nous signaler ceux de ces noms qui auraient été altérés, à l'impression, dans notre journal. Note de la rédaction.

ciment; leur épaisseur est de 60 centimètres environ; j'y ai trouvé des débris de briques et de poteries, des fragments de pilastres et colonnes en grès du pays. J'en ai fait enlever deux pierres dont l'une présente des traces assez distinctes d'ornements grossièrement exécutés, tandis que l'autre porte unc inscription à sa partie supérieure taillée en biscau. Elle est aussi d'un grès rouge provenant de la montagne voisine et mesure 85 centimètres de longueur sur une largeur de 50 centimètres et une épaisseur de 27 centimètres (1).

Sur la rive gauche de l'Oued Djelfa et un peu en avant du point précédent à côté de la route qui conduit à Debdeba (Redoute Lapasset) et à la forêt, on reconnait facilement la trace d'une construction assez analogue à celle de la rive droite. Je n'y ai recueilli aucun fragment d'origine antique.

L'étude du Ksar-el-Baroud, poste romain de Messad, est à peine ébauchée. Les inscriptions qui s'y trouvent n'ont pas encore été toutes relevées. La plus remarquable--et, malheureusement, la plus altérée se termine par le mot ORBIS qui se lit très-distinctement. Les fragments nombreux qui couvrent le sol, sont des débris de tuiles, de briques et quelques médailles de types assez variés.

Le Ksar-el-Baroud est un peu plus long que celui de Djelfa: il couvre un petit mamelon situé entre Aïn-et-Taam et l'OuedHamouida dont les eaux, au moyen de deux fortes rigoles (saguia), arrosent les jardins de Messad et de Demmed. Ses constructions sont aujourd'hui bouleversées par les travaux de recherches de salpêtre (baroud) avec lequel les habitants fabriquent de la poudre qu'ils répandent dans le pays. Dans leurs recherches, ils ont miné lå rive gauche de la rivière. Ce cours d'eau, qui est trèspuissant, arrose de nombreux champs de blé et d'orge, avant d'aller, avec d'autres Oued, s'engager entre les berges élevées du khang (étranglement, défilé) de Demmed.

Quand on a contourné la montagne calcaire au pied de laquelle sont assis les deux villages dont je viens de parler, on se trouve en face du petit col d'7/ri par lequel on arrive en quelques heures

(1) Nous avons sous les yeux l'estampage de cette inscription envoyée par M. Reboud. Au-dessous d'une bordure à dents de loup sont trois compartiments; sous celui de droite on aperçoit le commencement d'un 4. L'estampage, fait sans doute dans de mauvaises conditions, ne nous laisse lire que ces fragments: 1 DONATVS. - 2 L ANNARIETANA. — 3. ET ZARESIS. - 4 ELIVS.

Ces documents épigraphiques n'offrent à l'examen qu'une simple liste de noms propres, parmi lesquels ZARESIS attire seul l'attention.-N. de la R.

sur les bords de l'Oued-Djedi, c'est-à-dire dans le Sahara algérien proprement dit.

Tombeaux d'origine inconnue. Il existe sur les deux rives de l'Oued-Djelfa, à quelques centaines de mètres en aval du moulin, un très-grand nombre de tombeaux de dimensions variables et qui par leur forme rappellent assez bien les monuments celtiques. Ces tombeaux se retrouvent sur le revers méridional de la montagne de Messad où je les ai vus plusieurs fois. Je crois avoir entendu dire qu'il en existe de semblables autour de l'oasis de Metlili dans le Mzab (1).

Ces sépultures consistent en une fosse revêtue de quatre dalles plus ou moins grandes et recouverte à 20 ou 30 centimètres audessus du sol d'une ou deux autres dalles également de grés rougeâtre du pays. - Voici quelques mesures qui donnent une idée des différentes dimensions de ce genre de sépultures:

longucur.... 1 mètre 90 centimètres.

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Dalle n° 1, longueur 1 mètre 63 cent., largeur 1 m. 20 c. Dalle n° 2, longueur 1 m. 65 c., largeur 75 c. Dalle n° 3, longueur 2 m. 20 c., largeur 1 m. 40 c.

-

Il arrive quelquefois qu'au lieu d'une seule dalle, on en rencontre deux ou trois.

Chaque tombeau est circonscrit par une petite enceinte de fragments de roches longs de 20 centimètres et 10 ou 15 centimètres de large; quelquefois l'enceinte est double.

Les sépultures de Messad présentent la même particularité que j'avais déjà remarquée au Kef-el-Hamar (3), autour de la dalle

(1) M. Mac-Carthy en a vu d'analogues auprès de Zebdou, au sud de Temeen. Les gens du pays les appelaient tombeaux des Zenata. Il y eu a aussi dans les ruines de Sigus. Note de la Rédaction.

(2) Il en existe plusieurs de cette dimension et qui sont sans doute des sépultures d'enfants.

(3) Cette partie du Bou-Kahil appartient à la province de Constantine. Un des défilés de cette montagne, celui qui conduit dans l'Oued-R'ir par

sur laquelle on lit l'inscription C. Julius Hospes, etc. (Voir dans le Moniteur algérien du 30 décembre dernier l'article intitulé: Les Romains dans le sud de l'Algérie).

Les tombeaux de Djelfa se rencontrent à quelques centaines de mètres de tombes romaines, sur un point où l'on voit à chaque pas, même au sommet de la colline qui domine le moulin, des ruines de maisons construites en pierres sèches et quelquefois en blocs d'un volume considérable.

Les Oulad-Naïl — qui, à leur arrivée dans ce canton, refoulèrent les Saharis dont quelques individus pourtant occupent encore les rives de l'Oued-ben-Alïa, affirment que ces tombeaux existaient déjà, lors de l'invasion du pays par leurs ancêtres (1).

A quelle époque remonte la construction de ces tombeaux, à quelle variété de la race humaine appartenaient les individus dont les corps y ont été enfermés? Pour arriver à résoudre ce problème, j'ai fait ouvrir, avec le concours de M. le capitaine Hoüel, du 6e de ligne, une de ces tombes dans laquelle nous n'avons trouvé que quelques fragments de tibias (2).

Ruines de villages bátis soit par les Saharis, soit par les OuladNaïl. On trouve de ces ruines dans tout le canton de Djelfa. Les restes signalés plus haut à Er-Redjem, ne sont peut-être aussi que les vestiges d'un établissement. Dans la chaîne du Sahari, sur les bords de l'Oued-ben-Alïa, j'ai vu les débris du Ksar-Djemou, près de la rivière de ce nom.

La vallée qui s'étend du Rocher de sel à Djelfa est la partie qui offre le plus de ces anciens ksar détruits. Les principaux sont: Zmita, Aïn-Ouarou et Makhokh. Ce dernier comprend une partie des ruines qui sont situées autour et au-dessus du moulin.

Dans la chaîne de Zekar, on trouve, à quelques kilomètres du village de ce nom, sur une des berges de la rivière du Khang, un ksar considérable en pierres sèches, fort bien conservé et qui

Trefia, Mengoub et Dzioua, cst commandé au Nord par le bordj d'Aïn-erRiche, poste près duquel on a trouvé une inscription qui existe encore sur la porté principale de cet établissement.

(1) Les Oulad-Nail ou Beni-Naïl ou Nouaïl, enfants de Naïl Ebn-Ameur Ebn-Djabeur, constituent une des fractions de la grande tribu arabe des Zor'cba et sont venus dans l'Afrique septentrionale vers le milieu du 1I• siècle de notre ère. Note de la Rédaction.

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(2) Dans un article sur les dolmen d'Aïn-el-Kalaa, article qui paraîtra au prochain numéro, de nouveaux matériaux seront produits sur cet intéressant sujet. Note de la Rédaction.

dominait le défilé sauvage qui conduit de Zekar dans l'immense plaine de Messad. Il était habité, je crois, par les Beni-Mida qui sont les ancêtres des habitants actuels de cette bourgade que le général Marey a visitée en 1844.

Entre Oued-Sedeur et Ain-el-Bel, sur la rive gauche de la rivière, existe un ksar qui porte le nom cabile de Timmormor; on y construit en ce moment quelques maisons à l'usage des cultivaleurs indigènes. Non loin de là, à Tademit, on rencontre également un village assez récemment abandonné. Un autre est situé sur la rivière de Fedjer, à l'entrée du Sahara. On va aussi relever ses ruines.

La vue de tant de centres indigènes ruinés excite naturellement à rechercher la cause de leur destruction. Les Arabes répondent invariablement qu'on les a abandonnés pour fuir la fièvre ou la guerre. Mais la première partie de cette explication ne pouvant convenir à beaucoup de ces ksar situés dans des lieux très salubres, il reste l'autre cause qui est certainement la véritable. Je juge en cela du passé par le présent. Ainsi, quand je me trouve dans des villages réédifiés depuis deux ans, au milieu d'anciens vergers, les indigènes ne manquent pas de dire: Nous pouvons désormais braver les attaques des tribus de maraudeurs; grâce à la protection de la France, nous pouvons vendre ou manger nos légumes et les fruits des arbres que nous cultivons et vivre dans la plus grande sécurité.

Dr REBOUD.

Explorations du Tombeau de la Chrétienne.

Dans les Instructions rédigées en 1839 pour la Commission scientifique d'Algérie, MM. Hase et Raoul-Rochette insistaient particulièrement pour que le Kobeur Roumia fût étudié avec le plus grand soin. Leur recommandation avait été prise ici en considération très sérieuse; mais les difficultés exceptionnelles que ce travail présentait parurent si considérables, qu'en 1815, quand M. le comte Guyot, alors directeur de l'intérieur, voulut enfin l'entreprendre, il ne jugca pas — après avoir pris l'avis des hommes de l'art qu'il fallut moins de cinq mille francs pour le mener à bien. Or, d'après son programme, que j'ai sous les yeux, il ne s'agissait que de recherches à faire dans l'intérieur de l'édifice, et il n'était nullement question d'en déblayer la base, travail d'une

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