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incendie (datant peut-être de la fameuse insurrection du roi Firmus, en l'an 371).

5° Un élégant chapiteau-applique (plaque de marbre blanc, hauteur 0m55) décoré latéralement de feuilles d'acanthe, avec une tige fleurie en forme de thyrse, entouré de rosaces, comme motif central. Le thyrse, ou lance terminée par une pomme de pin, était un des attributs de Bacchus, sous le patronage duquel se donnaient les représentations dramatiques. (Planche IV).

Un autre chapiteau de pilastre, d'un décor analogue, mais d'un relief plus accentué et plus vigoureux.

Une colonnette, enguirlandée de feuilles de lierre (feuillage consacré à Bacchus).

Deux couronnements de colonnettes en forme de coupes, dont l'une est ornée en dessous de feuilles d'acanthe, et à la partie supérieure d'une . bordure de feuilles et de glands de chêne. (Planche iv).

Deux épaisses consoles d'albâtre (longueur 028, hauteur 025) décorées latéralement d'une sorte de corne d'abondance d'où s'échappe une palmette (peut-être un de ces aplustres ou ornements de poupe de navire rappelant que Césarée était ville maritime). (Planche II).

Une console de marbre, en forme de S. ayant pu servir de séparation 'entre deux fauteuils.

Un bucrâne, ou tête de bœuf desséchée, qu'on trouve dans la décoration des autels grecs, et qui rappelle les sacrifices faits aux dieux (marbre blanc, hauteur 024, largeur frontale 013).

Un autre bucrâne, d'une égale vérité anatomique, présentant à l'arrière comme le précédent, une face plate, avec un gros trou de scellement. Il devait faire partie avec des guirlandes et des rosaces, du décor de la frise du mur de scène. (Pl. Iv).

Un pied bifide (appartenant à un bœuf qui figurait peut être dans une scène de sacrifice).

Un pied de femme, pied droit, nu, adhérent à un socle (0"30 de long', et un pied d'homme sans support, avec la naissance de la jambe (hauteur 019), tous les deux en beau marbre et d'une jolie exécution. (Pl. 1v). Un pied tout entrelacé de courroies.

Un fragment de cuisse, vêtue comme d'un maillot en filet.

Un autre fragment (hauteur (15) présente à sa face antérieure des courroies lacées et nouées, et sur les côtés des enroulements de fleurs (brodequin décoré ?)

Un fragment de pied gauche (largeur 019) et une main gauche (largeur 0-12).

Un genou (marbre).

Un socle avec l'empreinte en creux des contours d'un pied. (Pl. Iv). Tous ces menus fragments laissent supposer que les colonnes enca

draient des niches rectangulaires ornées de frontons et peuplées de statues.

Mais la trouvaille la plus importante est celle d'une colossale statue de femme drapée (marbre, hauteur 175, non compris la tête), d'aspect conique. Elle a, en largeur, vingt centimètres de plus à la base qu'aux épaules. (Hauteur du socle, 0"04). Debout, nettement cambrée, la main gauche sur la poitrine, elle s'appuie sur la jambe droite, la jambe gauche infléchie et ramenée en arrière comme l'Athena d'Alcamène du musée de Cherchel, ou la Bacchante du musée de Mustapha (qui provient de Cherchel).

La tunique talaire dont elle est vêtue et qui tombe à plis verticaux comme des cannelures couvre presque en entier le pied droit, ne laissant à découvert que trois doigts, posés sur la semelle d'une sandale légère (0-025 d'épaisseur). Une large ceinture est nouée immédiatement audessous des seins, qui sont gonflés comme ceux des femmes de Michel Ange. Uu manteau l'enveloppe, qui laisse deviner et saillir les hanches, le ventre, le genou gauche, pour se terminer dans le dos en plis élégants quoique sommaires (Planche 1).

La main droite manque, mais trois petits trous de scellement (à la naissance du médius de la main gauche, sur le poignet, et sur le ventre) indiquent qu'elle tenait un attribut un masque tragique, si c'est une Melpomene, ou peut-être une lyre, comme la Terpsichore des peintures d'Herculanum qui est au Louvre, et dont l'attitude est analogue.

Cette muse semble se rattacher à l'école de Praxitèle, dont les répliques, au musée de Cherchel, étaient déjà si nombreuses.

Quant à la tête de femme jeune, de déesse, presque intacte, à l'exception d'une légère meurtrissure au nez, à la coiffure simple comme celle des Muses (cheveux partagés par une ligne médiane, ceints d'une bandelette, ondulés sur les tempes et formant masse sur la nuque), d'une facture sobre, d'une beauté surtout architecturale, on pouvait croire, comme elle est de même marbre et de mêmes proportions (hauteur 025) et qu'elle a été découverte à un mètre de la statue, qu'elle lui appartenait. Toutefois les lignes du cou ne se raccordent pas. Il est possible que nous ayons affaire à deux Muses différentes (soit Melpomène et Thalie, soit Terpsichore et Euterpe). La planche 1 montre cette tête isolée. La planche v la reproduit surmontant la statue (à titre de simple curiosité, et pour obtenir un effet d'expression différent).

Les autres Muses qui concouraient à l'ornementation de la scène, sommeillent encore sous les maisons de MM. Sadoun et Ehrard, ou dans le couloir de l'orchestre (côté ouest) non encore attaqué.

Un fragment de dédicace monumentale trouvé dans les fouilles : LIV - si l'on peut y voir le reste d'un nom comme Aelius ou Aurelius permettrait d'attribuer la construc ion de cet édifice au temps des

Antonins (fin du second siècle) alors que la ville avait acquis un haut degré de développement et de prospérité, plutôt qu'à l'époque de luba II, le roi-écrivain, protégé d'Auguste et fondateur de Césarée, qui pourtant affectionnait les choses du théâtre, puisqu'il s'entourait d'artistes et de tragédiens, et qu'il a même fait de l'art dramatique le thème d'une de ses nombreuses et doctes élucubrations.

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Les sondages que M. Besse, négociant, à bien voulu nous autoriser à faire dans le terrain sur lequel il se proposait de bâtir (rue de Ténez, à proximité des grands Thermes) n'ont fait rencontrer que des lambeaux de murs. Là s'élevaient les écuries du génie, et plus anciennement la mosquée de Sidi Ali, dont quelques arcades subsistent dans l'arrièreboutique du propriétaire. Toutefois quelques objets antiques ont été recueillis dans ce sol déjà bouleversé, outre quelques fragments de poterie hispano-moresque, à reflets métalliques, car on trouve de tout dans ces décombres, jusqu'à des pots de moutarde de « Bordin, vinaigrier du roi, des cours d'Angleterre, d'Autriche et de Russie » datant sans doute des premiers temps de notre occupation.

Voici l'énumération de ces objets :

1 Une colonne de granit (actuellement sur l'esplanade);

2 Une base de colonne;

3 Une pierre phallique (0"39 × 025), qui porte à quatre le nombre des documents de ce genre conservés au musée;

4 Un fragment d'inscription en grandes lettres: SA (sacrum?);

5 Un autre fragment de dédicace pieuse, trop incomplet (lacunes à droite et à gauche du texte), pour pouvoir être restitué :

IA (Julia?)

(ci) DVATA MA (ter?)

QVE PIOS SVS

(pa) RENTES VN

С АЕР

-6° Une chevelure ondulée de marbre (largeur 022), à section plate, et qui s'adaptait à une tête de statue;

7° Une médiocre figurine de Bacchus (marbre, hauteur 0°18), avec dos plat, ceint d'une épaisse couronne de lierre, et d'un travail inachevé fà moins que l'asymétrie des yeux n'ait été voulue par l'artiste pour exprimer l'ivresse). (Pl. 11);

8 Une tête de roi, en beau marbre blanc, comme veinė de nacre (hauteur (28), ceinte d'un diadème d'étoffe rayée, qui devait être noué à l'arrière. Elle a subi, sur la nuque et sur le nez, l'outrage du marteau. Les rois de Mauretanie ayant leurs temples, étant l'objet d'un culte local qui subsistait encore au temps de Tertullien, quand le christianisme triompha officiellement, leurs images furent brisées comme les autres idoles. Malgré son état de mutilation, cette tête, très individuelle, a encore beaucoup de caractère. (Planche i, en haut et à droite). Le modelé du front, droit et plat en son milieu, avec des saillies au-dessus de l'arcade sourcilière, la bouche proéminente, dénotant du sang nègre chez ce descendant de chefs lybiens, établissent une parenté très sensible entre cette physionomie imberbe et placide, aux joues pleines, et les trois portraits de Juba II précédemment découverts à Cherchel.

Deux de ces portraits, dont l'un provient de la ferme Nicolas, sont au Louvre, dans la salle africaine. Le troisième se trouve au musée de Cherchel. C'est cette tête élégante et diadémée que l'ancienne gardienne du musée, la brave mère Saint-Martin (si chargée d'années qu'un haut personnage entrant un jour au musée et désignant du doigt les statues antiques, se laissât aller à lui dire : « Vous avez cu faire tout cela?») avait surnommée le baromètre romain, parce qu'elle est imprégnée de sels qui se colorent en rose à l'approche de la pluie.

La tête nouvellement découverte se distingue de celles-là par la coif fure, par une sorte d'ornement large de 0-10, et qui semble être un morceau d'étoffe ramené sur le sommet de la tête.

D'après le témoignage de quelques monnaies, Juba II avait voué un sanctuaire et un bois sacré à l'empereur Auguste, son bienfaiteur et protecteur. Il est possible que ce prince soit ici représenté en prêtre d'Auguste.

C'est ce Juba II qui a fondé Cherchel ou Césarée, qui a du moins choisi. ce joli coin de la côte, où s'élevait un comptoir phénicien, Iol, pour y établir sa résidence, et y faire luire un brillant rayon de civilisation gréco-romaine.

Je n'ai pas besoin de rappeler comment son père Juba I, s'étant suicidé d'une façon romanesque après la défaite de Thapsus (en l'an 46 avant Jésus-Christ), le jeune Juba Il avait été emmené à Rome comme otage, recueilli et très soigneusement élevé par l'héritier de César, par Auguste qui en fit un lettré et un appréciateur délicat des choses d'art.

Plus tard, quand Auguste eut la gracieuseté de lui rendre son royaume, et de lui accorder en plus la main de la fille de la fameuse Cléopâtre d'Égypte, Juba II reconnaissant, et d'humeur assagie, prit plaisir à s'entourer d'artistes grecs et à orner Césarée de Maurétanie, sa nouvelle capitale, de monuments et de statues.

L'on est parvenu graduellement à déterminer au musée de Cherchel,

des répliques de certains chefs-d'œuvre de Phidias, d'Alcamène, de Praxitèle, de Paeonios ou de Scopas.

Cette tête majestueuse d'homme barbu notamment, qui décorait naguère la fontaine de la place, est la reproduction presque identique d'une de ces têtes divines, appliquées comme des médaillons, sur la volute des chapiteaux gigantesques du temple d'Apollon à Didymes (Asie-Mineure), (tout récemment publiées en photogravure par MM. Pontremoli et Haussoulier'.

La plupart de ces copies d'œuvres célèbres, qu'on est étonné de trouver en si grand nombre au musée de Cherchel, peuvent être attribuées à l'influence personnelle du roi Juba, qui n'était pas moins épris d'art grec que le roi Louis Il de Bavière, le protecteur de Wagner, le fantaisiste constructeur des Propylées et de la glyptothèque de Munich.

D'autre part, les nombreux écrits de Juba sur la peinture, la musique le théâtre, l'histoire naturelle, etc., l'ont fait appeler par Plutarque et Athénée « le plus érudit des princes », et « le roi le plus versé dans les questions d'histoire ». Pline ajoute même quoi qu'il ait eu un règne heureux de près de cinquante ans, durant lequel il fut béni de ses sujets et aimé des étrangers qu'il fut encore plus distingué comme homme de lettres que comme roi. Son souvenir planant sur Cherchel, il n'est pas étonnant que certains habitants de la ville - dont un numismate aient attribué à leurs enfants le prénom de Juba.

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Parmi les monnaies récemment trouvées au théâtre, il y en a une qui représente Cléopâtre-Séléné, femme de Juba II, avec un crocodile au revers, rappelant son pays d'origine, et l'inscription, en lettres grecques : Cléopâtre, reine.

III

Un cimetière militaire

Voici un lot de vingt-quatre inscriptions que M. Peyron, propriétaire, vient d'avoir la gracieuseté de nous remettre pour le Musée.

Elles proviennent de sa ferme située à deux kilomètres de Cherchel, à droite de la route d'Alger, au lieu dit « des deux bassins » (sari touitah). Elles ont été mises au jour, il y a quinze ou vingt ans, lors de la plantation d'un vignoble dans des parages semés de tombes.

Hier encore, en faisant piocher son champ de géranium, M. Peyron y rencontrait sept sarcophages superposés, sans inscriptions ni dessins, et qui furent immédiatement transformés, selon l'usage, en abreuvoirs.

Purement funéraires, simple écho de gémissements poussés il y a dixhuit siècles sous le ciel bleu de l'Afrique, et qui continuent, ces inscrip

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