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pour toutes les réformes administratives, financières, économiques et militaires dont il a besoin» (1), et parmi lesquels figurent deux des membres de notre société, MM. Augustin Bernard et Edmond Doutté. Mais l'imminence de notre intervention au Maroc et la discussion de la question de savoir comment elle serait pratiquée, ont déterminé la publication d'un nombre considérable d'études sur le Maroc et la question marocaine.

Nons ne pouvons, ici, les analyser, ni même les citer toutes. Et, malgré qu'il nous en coute de signaler, seulement par leur titre, le volume de M. Aubin Le Maroc d'aujourd'hui, et celui de M. Rouard de Card: Les relations de l'Espagne et du Maroc pendant le xvII et le xix' siècles, de renvoyer, purement et simplement, le lecteur au Bulletin du Comité de 'Afrique française, pour y prendre connaissance de l'intéressant compte-rendu de M. Dechaud, d'une Croisière de reconnaissance commerciale au Maroc, et du remarquable rapport de M. Augustin Bernard, sur sa Mission au Maroc - nous concentrerons notre examen sur les Archives Marocaines, publication de la Mission scientifique du Maroc.

Sur la demande de M. le Gouverneur général de l'Algérie, une mission d'études au Maroc a été confiée à M. Salmon, ancien élève de l'École des Langues orientales, membre de l'Institut français d'archéologie orientale du Caire Placée sous la direction de M. Le Chatelier, professeur de sociologie musulmane au Collège de France, cette mission a déjà donné des résultats si encourageants que M. Étienne a saisi la Chambre des Députés d'un projet de loi portant création d'un Institut Marocain, organisé sur le modèle de ceux du Caire et d'Hanoï, et qui constituerait, en même temps, un centre de travaux et de recherches pour le développement des études d'archéologie, d'histoire, de linguistique et de sociologie marocaines, une école d'application pour les jeunes gens sortant de l'École de langues orientales ou des Écoles similaires, pour les candidats aux fonctions administratives du Maroc, consulats et drogmanats.

Toujours est-il que l'activité de la Mission scientifique du Maroc a été telle qu'elle a pu, en un laps de temps relativement très court, publier sous le titre d'Archives Marocaines, quatre fascicules remplis de renseignements et de documents extrêmement intéressants tant au point de vue politique ou administratif, qu'aux points de vue économique, sociologique ou juridique.

C'est ainsi que M. Salmon, dans son remarquable Essai sur l'histoire politique du Nord-Marocain, a réussi à dégager, dans ce chaos apparent qu'est l'histoire politique du Maroc, les caractères et l'orientation du mouvement propre du Nord-Marocain, et à préciser les facteurs de ce mouvement. Il y étudie les différentes phases de l'antagonisme de l'aristocratie chérifienne, d'origine traditionnelle et religieuse, et d'une aristocratie administrative d'origine militaire, - et il conclut que si l'étude historique du chérifisme local et celle de la famille des Oulad'Abd aç-Çadoq ne résument pas toute l'histoire politique du Nord-Marocain, elles montrent, du moins, ce qu'est cette histoire. Et nous arrivons, ainsi, pas l'examen du passé, à la connaissance et à l'intelligence du présent.

(1) Art. 2 de la convention franco-anglaise du 8 avril 1901.

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M. Salmon ne s'est point, d'ailleurs, borné à mettre en relief « quelques aspects caractéristiques », à préciser quelques directions de grandes lignes » dans l'histoire politique du Nord-Marocain. Il nous initie aux détails de l'administration marocaine et nous en montre le fonctionnement. Par son étude sur l'Administration marocaine à Tanger, il nous instruit de ce qu'est cette administration dans les ports de l'empire marocain, où les influences étrangères ont obligé les employés du Makhzen à la régularité dans l'exercice de leurs fonctions. Il nous renseigne, également, sur ce qu'est le Commerce indigène à Tanger; et par la publication du travail de M. Michaux-Bellaire sur Les impôts marocains, il nous fait connaître les ressources financières du Makhzen. · La belle monographie consacrée à la tribu des Fahrya, constituant « un bon modèle de tribu composite », et représentant, dès lors, un type de tribu» marocaine, montre la tribu enserrée, par les efforts persévérants des sultans de la dynastie actuelle, dans des limites stables, placée sous l'autorité d'un fonctionnaire du Makhzen, et devenant une subdivision administrative. Ceux, enfin, qu'intéresse plus spécialement le droit privé, et qui voudraient être renseignés sur les coutumes marocaines, liront avec profit les études de M. Salmon sur les Mariages musulmans à Tanger, — sur Quelques particularités de la propriété foncière dans le Rarb, sur un cas de Habous, qui, entre autres mérites, ont celui de faire apparaître les déformations qu'a subies avec le temps, et sous l'influence des mœurs et des besoins économiques locaux, la loi musulmane malékite. - Ils consulteront, également, la traduction qu'a donnée M. Salmon, d'extraits d'un manuscrit rapporté de Fas, en 1903, par M. Benghâbrit, attaché à la Légation de France, traduction qui constitue une importante contribution à l'étude des Institutions berbères au Maroc, sur lesquelles les travaux de de Foucauld, de Le Chatelier, de Quedenfelt, de Vassel, de Doutté, ont déjà projeté une vive lumière. Ils constateront, alors, combien peu different ces institutions de celles des Berbères de la Kabylie. Ils verront, notamment, les Berbères marocains, comme nos Kabyles, donner au Kanoun coutumier le pas sur la loi religieuse; ils retrouveront, sous le nom de Mezrag, l'anaïa des Berbères d'Algérie, Leff marocain, l'analogue du çoff Kabyle;

· et, dans le ils sauront, enfin, comment

les Chorfa jouent, chez les Berbères du Maroc, le rôle d'arbitres et de conciliateurs, qui est celui des marabouts de Kabylie.

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Un arrêté du Gouverneur général

du 5 février 1904 a réorganisé le service de la sûreté en Algérie. Un décret du 18 septembre 1904 a rendu exécutoires en Algérie les lois et décrets relatifs au contrat d'association et à l'enseignement congréga-` niste. Ce décret a été provoqué par un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation, en date du 6 août 1904, cassant un arrêt de la Cour d'Alger du 24 décembre 1903, et décidant que la loi du 1" juillet 1901 sur le contrat d'association et celle du 4 décembre 1902, qui l'a complétée, n'étaient pas, de plein droit, applicables à l'Algérie. La Cour suprême avait estimé que ces lois n'étaient pas purement modificatives de la législation antérieure déjà applicable à l'Algérie ; que la loi du 1er juillet 1901 instituait, en effet, pour les associations, une régime entièrement nouveau, et que si, relativement aux congrégations religieuses, la loi du 1" juillet 1901 et celle du 4 décembre 1902 consacraient des principes déjà reçus en Algérie, elles avaient introduit, dans la législation antérieure, des innovations d'une telle importance, qu'elles n'avaient pu devenir applicables à l'Algérie, sans qu'un acte en forme du pouvoir compétent les eût rendues exécutoires en cette colonie.

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b) ORGANISATION FINANCIÈRE. Un arrêté du ministre de l'intérieur et du ministre des finances, en date du 29 février 1904, a fixé la liste des fonctionnaires et agents de l'Algérie retraités sur le budget de la colonie. Deux arrêtés du gouverneur général, l'un du 19 janvier 1904, l'autre du 3 mars 1904 modifiant le premier, ont fixé le régime financier des territoires du sud.

Un troisième arrêté, en date du 10 mai 1904, a opéré la centralisation des affaires administratives et financières concernant ces territoires.

Enfin, deux décrets du 12 décembre 1904 ont fixé 1' les droits d'enregistrement; les droits de timbre à percevoir dans les territoires du sud de l'Algérie.

c) ORGANISATION JUDICIAIRE. Un décret portant règlement d'administration publique, du 25 novembre 1904, est venu étendre, à l'Algérie, l'application des lois en vigueur, dans la métropole, sur l'assistance. judiciaire, tout en modifiant certaines dispositions de ces lois.

Une loi du 24 décembre 1904 a renouvelé pour une nouvelle période de sept ans, aux administrateurs de communes mixtes, les pouvoirs disciplinaires que la loi du 21 décembre 1897 leur avait maintenus pour sept années déjà, en matière d'infractions spéciales à l'indigenat. Elle a été

votée sans débats par la Chambre des députés, et adoptée par le Sénat après une discussion très courte. Le principe qu'elle consacre n'est donc plus, aujourd'hui, contesté. Au reste, depuis qu'en vertu de l'article 28 du décret du 9 août 1903, les administrateurs de communes mixtes sont juges des contraventions de simple police commises par les indigènes de leur circonscription, la répression, par ces mêmes fonctionnaires, des infractions spéciales à l'indigénat n'apparaît plus comme une anomalie. D'ailleurs, la loi du 24 décembre 1904 a modifié, en l'améliorant, la législation antérieure sur les trois points suivants: a, elle dispose expressément que les pouvoirs disciplinaires des administrateurs s'étendent aux musulmans originaires de la Tunisie et du Maroc, et régularise, ainsi, une jurisprudence des plus discutables, étant donné les termes des dispositions anciennement en vigueur; — b) elle affranchit du régime de l'indigénat un certain nembre d'indigènes, et, notamment, ceux qui occupent ou ont occupé les fonctions de juges dans les tribunaux répressifs, sauf dans le cas où les indigènes précités viendraient à encourir une condamnation à une peine privative de liberté pour crime ou pour délit, et autorise le Gouverneur général à étendre par arrêté cette faveur à d'autres catégories d'indigènes; c) elle autorise l'administrateur. — et dans les communes de plein exercice, le juge de paix, — à substituer à la peine de l'emprisonnement ou à celle de l'amende, les prestations en natnre, et reconnaît aux condamnés la faculté de requérir cette conversion. Notons, enfin, que le tableau des infractions annexé à la loi du 21 décembre 1897 a été remanié, de façon à apporter de notables améliorations au régime établi par cette loi, et qu'il reste admis qu'il ne peut être créé de nouvelles infractions qu'en vertu d'une loi.

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Une loi du 31 mars 1904 est intervenue pour modifier l'art. 2, § 2, de la loi du 27 mai 1885, dont les dispositions entravaient le fonctionnement des tribunaux répressifs indigènes réorganisés par le décret du 9 août 1903. - Les décrets des 29 mars et 28 mai 1902, instituant les tribunaux répressifs indigènes, ont soulevé, à divers points de vue, de très vives critiques. On a prétendu qu'ils étaient illégaux; tenu qu'ils retiraient aux indigènes les garanties les plus élémentaires auxquelles ont droit les justiciables; - on a fait observer, enfin, qu'ils étaient inconciliables avec la loi du 27 mai 1885 sur la relégation, qu'ils rendaient la relégation des indigènes impossible, alors que les indigènes sont déclarés relégables par cette loi.

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C'est, afin de répondre à ces critiques, qu'une commission fut instituée pour étudier la réorganisation de ces tribunaux. Cette commission a élaboré un projet qui est devenu le décret du 9 août 1903. — Or, l'œuvre de cette commission pouvait bien satisfaire certains des adversaires des tribunaux répressifs, par l'attribution aux justiciables de ces tribunaux, d'un certain nombre de garanties; mais elle ne pouvait les désarmer. tous. Le nouveau décret encourait, en effet, lui aussi, le reproche d'illé

galité; et les dispositions de la loi du 27 mai 1885 continuaient à entraver le fonctionnement des tribunaux qu'il réorganisait.

De là, la loi du 31 mars 1904, modifiant sur un point spécial, mais seulement sur un point spécial, malheureusement, le texte de la loi sur la relégation. En sorte que, si la légalité des tribunaux répressifs ne peut plus être contestée, puisque leur existence est implicitement consacrée par une loi, si le fonctionnement de ces tribunaux ne soulève plus, du chef de la loi sur la relégation, toutes les difficultés qui avaient surgi tout d'abord, un certain nombre de celles-ci restent, cependant, sans solution, et le resteront tant qu'une nouvelle loi ne sera pas intervenue pour les écarter. C'est ainsi que la discussion reste ouverte sur la question de savoir à quelle juridiction il appartient de prononcer la peine de la relégation, lorsqu'elle est encourue par un indigène musulman.

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A mesure, qu'en Algérie, la colonisation progresse, que s'accroît l'étendue des surfaces cultivées, que se varient et se différencient les cultures, à mesure que se révèlent de nouveaux gisements miniers, que leur exploitation devient plus intense, plus active, et qu'augmente le nombre de ceux qu'emploie cette exploitation, à mesure, aussi, la législation économique, spéciale à ce pays, devient plus touffue et se complique.

On ne pouvait, en effet, songer à étendre, purement et simplement, à l'Algérie, la législation élaborée pour la France. Les deux pays diffèrent trop encore par les conditions économiques dans lesquelles ils se trouvent placés, pour qu'ils puissent s'accomoder d'une règlementation uniforme. Cela est manifeste, principalement, pour les lois ouvrières. Celles-ci ont grevé l'industrie française de charges très lourdes, qu'une industrie naissante, et par là même débile, telle que l'industrie algérienne n'aurait pu supporter; outre que l'industrie algérienne, pour s'exonérer de ces charges, ou tout au moins en atténuer le fardeau, n'eut pas manqué de faire appel à la main-d'œuvre indigène ou étrangère, de préférence à la main-d'œuvre française.

Il importait donc, sinon d'élaborer pour l'Algérie une législation économique tout-à-fait spéciale, du moins de n'appliquer, à ce pays, la législation métropolitaine que préalablement amendée et adaptée à sa situation économique. De là, pour l'Algérie, une législation économique, sinon tout-à-fait spéciale, du moins particulière ; de là, la constitution, en ce pays, d'organismes spéciaux, Chambres d'agriculture, Commission consultative du travail, chargés de renseigner les pouvoirs publics, et participant, indirectement, à l'élaboration de cette législation.

a) AGRICULTURE.

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Un décret du 23 août 1904 a rendu exécutoire, en Algérie, la loi du 4 juillet 1900, relatives aux sociétés d'assurances mutuelles agricoles. Le but de cette loi est de favoriser la constitution et le fonctionnement de ces sociétés ou caisses d'assurances mutuelles agricoles, lorsqu'elles sont gérées ou administrées gratuitement et ne réalisent pas de bénéfices, en les dispensant des formalités prescrites:

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