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ment de cavalerie, 4 batteries montées, 1 batterie de montagne et un bel équipage de siège. Le service de santé avait été l'objet de soins tout particuliers : 210 médecins étaient affectés aux hôpitaux en dehors de ceux des régiments; des hangars démontables à toiture imperméable étaient embarqués. L'équipement du soldat avait été déterminé en tenant compte du climat. Une coiffe de toile blanche contre le soleil, une ceinture de laine contre les fraîcheurs de la nuit. On avait prévu des tentes, des sacs de campement, des couvertures supplémentaires, de larges moyens de transport en caissons, voitures, animaux de bât. Toutes les notions connues alors sur la région étaient réunies dans une brochure distribuée à tous les officiers: « Aperçu historique, statistique et topographique sur l'État d'Alger, à l'usage de l'armée expéditionnaire d'Afrique, rédigé au dépôt de la Guerre. »

La formation du corps expéditionnaire avait amené le rappel des hommes en congé d'un an. Mais les volontaires se présentèrent en nombre dans la troupe, et même des sous-officiers rendirent leurs galons pour pouvoir partir. La même ardeur emplissait les officiers, qui tous avaient sollicité leur ordre de départ. La désignation du général de Bourmont comme commandant en chef avait été accueillie avec une froideur que sa proclamation à l'armée, rappelant l'expédition d'Égypte, avait dissipée : « Déjà les étendards français, disait-il, ont flotté sur la plage africaine. La chaleur du climat, la fatigue des marches, les privations du désert, rien ne put

ébranler ceux qui nous y ont devancés. Leur courage tranquille a suffi pour repousser les attaques tumultueuses d'une cavalerie brave, mais indisciplinée. Vous suivrez leur glorieux exemple.

<< Soldats, les nations civilisées des deux mondes ont les yeux fixés sur vous; leurs vœux vous accompagnent. La cause de la France est celle de l'humanité. Montrez-vous dignes de cette noble mission. Qu'aucun excès ne ternisse l'éclat de vos exploits; terribles dans le combat, soyez justes et humains après la victoire ; votre intérêt le commande autant que le devoir. >>

En outre, l'armée savait que dans ses rangs combattaient quatre des fils de son chef d'eux fut d'ailleurs tué.

l'un

La préparation de la flotte était plus difficile et plus longue que celle de l'armée; chaque régiment, chaque service peut travailler séparément, mais les bâtiments ne disposent que de moyens limités par ceux des ports et des arsenaux. Le vice-amiral Duperré, désigné pour commander cet armement extraordinaire, malgré des opinions très libérales qu'il ne cachait pas, doutait du succès. L'étatmajor général de la Marine ne croyait pas qu'il fût possible de débarquer 30 000 hommes sur la côte d'Afrique. L'amiral Duperré demandait en tout cas huit mois de préparatifs et le retour de la bonne saison, donc le renvoi de l'expédition à l'été 1831. Le ministre de la Marine, éclairé par les conseils des jeunes officiers dont le blocus d'Alger avait mûri l'expérience, en première ligne le

répondait à toutes

commandant Dupetit-Thouars les objections, et il envoya Duperré à Toulon comme préfet maritime, pour qu'il préparât lui-même sa flotte. En mars, à son arrivée, l'amiral ne demanda plus que six mois pour être prêt. Le ministre lui en donna trois et, guéri de ses doutes par l'action, le brave amiral put se féliciter bientôt avec le ministre de l'activité générale qui, sous ses ordres, faisait des prodiges, et assurer que tout serait prêt dans les limites fixées. La Marine conduisait ses armements avec le même souci des détails que la Guerre. En particulier, un matériel nouveau de débarquement avait été construit pour permettre à l'artillerie de balayer la plage avant de prendre

terre.

Au commencement de mai, la flotte tout entière était rassemblée à Toulon : 11 vaisseaux de ligne, 24 frégates, des corvettes, des bricks, au total cent bâtiments de guerre, des transports, des bâtiments de commerce affrétés, au total 676 navires.

L'embarquement et l'appareillage furent retardés par le temps et la mer, et c'est seulement le 25 mai que la flotte entière put mettre à la voile, dans l'ordre le plus majestueux. Le 31 mai, elle reconnaissait la côte d'Afrique, mais l'état de la mer ne permettait pas de débarquer et elle se rallia aux îles Baléares dans la baie de Paima. C'est seulement le 12 juin qu'elle se trouvait en face d'Alger, mais des grains la repoussaient vers le nord. « Heureusement, vers midi, la mer parut se calmer. Soucieux, l'amiral hésitait à donner l'ordre de se

rapprocher de la côte. - Sur les pressantes instances du général en chef, il s'y décida. L'ordre fut donné. Jamais signal ne fut obéi avec une plus généreuse ardeur (1). »

Le 13, la flotte française couvrait la mer devant Alger. Le soir même, elle était devant la presqu'île de Sidi Feredj (Sidi Ferruch), point désigné pour le débarquement depuis 1808 à cette époque. Napoléon Ier avait envoyé en mission en Afrique le colonel du génie Boutin, dont les reconnaissances et les levés très précis rendirent les plus importants services à l'expédition de 1830. Le débarquement commença le 14 au petit matin, sur les deux plages qui s'étendaient à l'est et à l'ouest de la presqu'île : il s'opéra sans rencontrer aucune résistance. Dans l'après-midi seulement, quelques centaines de cavaliers arabes vinrent cavalcader devant le front et chargèrent en fantasia les troupes qui se portaient en avant. Les troupes prirent terre les 15 et 16, mais le débarquement du matériel fut gêné par la mer, et la flotte parut même un instant en péril. Les chevaux n'étaient pas débarqués et la flottille de transport, avec le parc de siège, n'avait pas encore rallié.

Cependant l'armée du dey se concentrait sous les ordres de son gendre l'aga Ibrahim : 10 000 janissaires ou coulouglis (métis de Turcs et d'Arabes), 10 000 Maures d'Alger, 30 000 Arabes amenés par les beys de Titeri et de Constantine en personne

(1) Camille RoUSSET, la Conquête d'Alger, p. 114 et suiv.

et par le khalifat du bey d'Oran, 8 à 10 000 Kabyles indépendants que l'appât du butin attirait, en tout 60 000 combattants. Deux divisions françaises (20 000 hommes) avaient étendu leurs bivouacs en demi-cercle face au sud-est, à un peu plus d'un kilomètre de la presqu'île, que gardait une troisième division. Ce front était couvert par des avantposes sommairement retranchés. Mais les ailes extérieures de la ligne n'étaient pas appuyées à la mer. C'est donc par les ailes que les chefs turcs eurent l'idée d'attaquer les Français pour les couper de la mer ; le bey de Constantine était chargé de l'attaque sur la droite française, et son mouvement échoua dès le début; l'aga Ibrahim s'était réservé d'assaillir la gauche, séparée du rivage par une distance de 800 mètres : il bouscula un bataillon, mais un autre bataillon placé en échelon l'arrêta, et la brigade de réserve, judicieusement placée de ce côté, le rejeta dans ses lignes, qu'elle enleva ensuite. Le centre et la droite françaises suivent ce mouvement en avant, que la gauche appuie. La ligne française a enlevé toutes les positions que l'ennemi occupait devant elle au lever du jour. Il est sept heures. Le général en chef arrive sur le terrain, avec l'idée d'arrêter l'action qui l'éloigne de la flotte, sa base, avant qu'il ait réuni les moyens de vivre et de combattre ; une partie seulement des chevaux et des mulets ont débarqué, et la flottille qui porte les parcs d'artillerie et du génie n'est pas encore signalée. Mais le général Berthezène lui montre le plateau de Staouëli, qui domine la posi

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