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bords du Niger, et qui était assez fort pour exiger le tribut des nomades du Sahara et des Berbères établis dans les oasis du Sahara méridional. L'un de ces voyageurs, Bekri, nous montre la cour de Gana en grands détails; elle ressemble beaucoup à celle du Moro-Naba, à Ouagadougou, qui gouverne les Mossi, peuple d'un million et demi d'habitants, établi au milieu de la boucle du Niger depuis le douzième siècle. Nous voyons les mêmes dignitaires, les ministres, les pages du souverain, et le même cérémonial pour le grand salut au chef, que les Mossi appellent le poussi-poussi : c'est une prosternation, le front à terre, les coudes écartés, les poings fermés, qui, par trois fois, frappent la terre, le pouce levé. Une telle marque de respect cause une impression un peu pénible, surtout quand c'est une multitude qui la rend, les notables en tête.

C'est au neuvième siècle que, dans une île du bas Sénégal, un Berbère venu du Maroc fonda une sorte de secte ou plutôt de confrérie dont les membres s'appelèrent « al Morabetine », les habitants du monastère ou Ribat, littéralement les liés, les religieux. D'où nous avons fait Marabout, et les Espagnols Almoravides. Les Almoravides commencèrent aussitôt la lutte contre le royaume païen de Gana, dont le chef recevait bien les musulmans, tout en refusant d'embrasser leur religion. Aboubekr ben Omar, chef de l'ordre après la mort de son oncle, poursuit cette lutte pendant quinze ans, aidé par les chefs du Teckrour, le Fouta sénégalais actuel, en même temps son cousin Yousouf

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Ben Tachfine allait conquérir le Maroc et l'Espagne. Aboubekr, onze ans après avoir détruit Gana, fut tué dans l'Adrar au cours d'une révolte, et la puissance des Almoravides s'éteignit dans son pays d'origine, au moment même où elle brillait, dans le Nord, du plus vif éclat.

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Gana ne retrouve pas sa splendeur passée, mais d'autres États naissaient le Tekrour, dans le Sahel soudanais, qui donna son nom aux Toucouleurs; le Sosso, entre Goumbou et Bamako, et le Manding, vers Kangaba, et luttaient entre eux et avec le royaume de Gana fort diminué.

Dès le septième siècle, des blancs qu'on suppose des Berbères chrétiens s'étaient fait reconnaître pour chefs dans la petite île de Goungia ou Koukia, et, vers l'an 1000, ils avaient établi leur domination sur la ville de Gao, déjà ancienne de plusieurs siècles, et se convertirent à l'islamisme. Ce fut la dynastie des Dia, qui régna de 690 à 1335. C'est l'origine de l'Empire Sonrhoï qui, avec la dynastie de Sonni, puis celle des Askia, soumit tout le Niger moyen. Les Sonrhoï y entrèrent en lutte contre les Mandingues. La capitale de ce nouvel Empire était Kangaba, qui reste un village assez important entre Siguiri et Bammako; le Manga, ou Mambi, chef d'un petit pays, était de la famille des Keïta, et cette dynastie accrut son territoire au cours des siècles jusqu'à couvrir à peu près toute l'étendue de l'Afrique occidentale actuelle, plus grande que la moitié de l'Europe. Fait remarquable : elle perdit presque toute sa puissance sans disparaître et le

Mambi de Kangaba, aujourd'hui chef de canton, se retrouve dans la même situation que ses aïeux au septième siècle. Je ne pense pas qu'il existe un seul exemple de pareilles vicissitudes et, bien que ne figurant pas dans l'Almanach de Gotha, cette branche des Keïta est certainement la plus ancienne parmi les familles régnantes dans le monde. Si ses héritiers actuels se souviennent vaguement que leurs pères ont commandé de grands pays et gagné beaucoup de batailles, ils ont entièrement oublié que ces ancêtres ont été des musulmans fervents et très instruits, dont les pèlerinages à La Mecque ont marqué dans les fastes de l'Islam; ils ont actuellement au Soudan français une réputation bien établie d'incorrigibles ivrognes.

Pourtant, au quatorzième siècle, Kankan Moussa ramena de La Mecque jusqu'au Manding un authentique Almoravide, architecte lettré, qui, scandalisé de voir prier Allah dans une modeste case à toit conique, bâtit, en passant à Gao, une mosquée en brique à terrasse crénelée et à minaret pyramidal, qui devint le modèle des édifices religieux et créa le style dont les monuments sont répandus dans toute la région du Niger, en particulier à Tombouctou et à Djenné. C'est bien à tort qu'on a vu dans ces constructions une influence égyptienne et qu'on a supposé à cette occasion que les Sonrhoï venaient du Nil; avant Kankan Moussa, les textes arabes sont formels, il n'existait au Soudan que des cases à toit conique de paille, et c'est bien son architecte marocain qui est le père de ce style essentiellement

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