lampes qui répandent une clarté graduée, des personnages qui vont et viennent : longtemps cette agitation générale n'a laissé qu'une impression confuse et décourageante. Un directeur crie et tempête; des comédiens s'irritent. Tout l'effort se dissout sans cause apparente. Puis, un jour, après des heures de vaine lutte, comme une majesté qu'on n'attend pas, un rayonnement glorieux emplit le théâtre et c'est Lady Macbeth, hagarde et angoissée devant sa main sanglante, et c'est Faust, interdit au seuil de Marguerite, et c'est Alceste, désespéré devant sa chimère blessée à mort, qui, reflétant soudain un des aspects permanents du vrai, sortent de l'accidentel et du contingent pour représenter l'immanente beauté. Aimer Molière parce qu'on le juge digne d'être aimé et non parce que les siècles passés nous en ont transmis comme la consigne; s'unir profondément à son œuvre au point de la revivre et non lui faire l'aumône d'une admiration convenue; fournir pour chacune de ses pièces un effort nouveau, dégagé de toute prévention, de tout parti pris d'école, et destiné à en rendre minutieusement l'intégrale perfection, à en exprimer tout le contenu; ainsi devraient pouvoir se résumer les intentions de notre époque à l'égard du poète dont le rire éclatant a retenti à travers le monde et dont l'âme douloureuse, transparaissant sous la gaîté, a sans doute peu d'égales. Les parallėles sont probablement les plus vains des amusements, surtout lorsqu'ils tendent à établir des hiérarchies. Pourtant, qui refuserait une des toutes premières places, sinon la première, à celui devant qui Goethe lui-même inclinait respectueusement la tête? à la pièce. -- Sens Le Misanthrope n'est-il qu'une pièce à lire? Formation de cette légende. La mise en scène traditionnelle. Comment elle nuit L'hypothèse d'une mise en scène logique et raisonPrincipes généraux dont celle-ci doit s'inspirer. différents attribués, selon les époques, au caractère d'Alceste. L'exactitude du détail et la signification supérieure de l'œuvre. Esprit ancien qui doit animer l'interprétation. née. réforme. que - Programme de la Ouvrage plus fait pour les gens d'esprit que pour la multitude... plus propre à être lu qu'à être joué....... piece plus admirée suivie ", voilà comment Voltaire caractérise l'impression produite, à l'origine, par le Misanthrope. A lire en entier les pages qu'il consacre à la pièce, on se convainc aisément que ces paroles résument aussi son propre sentiment. On s'étonne, d'ailleurs, de le voir confirmé par la postérité, car, si pénétrante que fût son intuition du beau, Voltaire s'est souvent trompé lorsqu'il jugé le théâtre classique, et plus souvent encore quand il a voulu l'imiter. Constater que le Misanthrope ne prend » pas sur le public et séduit les lettrés sans captiver la foule est devenu un lieu commun. La même assistance qui s'est passionnée pour une intrigue « enlacée et roulée en feston» ne se laisse pas toucher par le spectacle d'une noble souffrance. On a souvent énuméré les raisons d'un pareil accueil. On a déclaré tour à tour le sujet trop élevé, l'action trop pen apparente, la peinture du milieu social trop fine pour que les masses pussent y trouver de l'intéret. Et le commentateur concluait infailliblement que de telles beautés, accessibles seulement aux esprits cultivés, méritaient, précisément à ce titre, une place d'honneur dans l'oeuvre de Molière. Il n'est pas sûr que cet éloge singulier soit fondé : si, au lieu d'acclamations, le Misanthrope ne recueille que des applaudissements discrets, est-ce seulement parce que l'auteur l'a situé fort au-dessus du médiocre entendement de la moyenne? Sans rechercher à cet effet très simple une cause subtile, n'est-on pas en droit de se demander si la réalisation scénique de la pièce n'est pas, pour une grande part, responsable de l'étrange inertie, du sérieux voisin de l'ennui qui règnent dans la salle pendant que, sur la scène, Al |