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ments de fidélité et de dévouement dont il venait de donner l'assurance. Depuis ce moment, il servit le sultan avec un zèle et une sincérité parfaits et prêta un actif concours au général Mohammed-Ibn-el-Hakîm, ce foudre de guerre qui avait entrepris de soumettre l'Ifrîkïa, de rétablir l'ordre dans les provinces et d'extirper les dernières semences de rebellion. Ce fonctionnaire avait alors l'ordre de faire payer l'impôt à toutes les tribus nomades qui parcouraient le pays, d'obtenir la soumission des bandes insurgées qui hantaient encore les frontières de l'empire et de les forcer à discontinuer leur habitude de percevoir l'impôt au hom du gouvernement.

Dans l'exécution de cette tâche, il déploya une bravoure qui asssura la tranquillité des provinces et humilia l'orgueil de certains chefs qui, établis dans les régions lointaines, avaient cru pouvoir se maintenir indépendants; enfin, il releva l'autorité du gouvernement hafside et fit disparaître jusqu'aux derniers vestiges de la révolte. En l'an 739 (1338-9), il enleva El-Mehdïa à Ibn-Abd-el-Ghaffar, natif de Raghîs, qui s'en était emparé; ensuite, il se rendit à Tebessa, fit arrêter Mohammed-IbnAbdoun, cheikh de cette ville et l'envoya prisonnier à El-Mehdïa. Après la chute d'Ibn-el-Hakîm, cet homme fut remis en liberté. Le général hafside mit ensuite le siége devant Touzer et força le gouverneur, Ibn-Yemloul, à faire sa soumission et à donner ses fils comme ôtages. Alors, il se présenta, à plusieurs reprises, devant Biskera, mais, chaque fois qu'il voulut en commencer le siége, il se laissa détourner de son projet par les assurances de Youçof-Ibn-Mansour-Ibn-Mozni, qui prétendait tenir cette ville en vertu d'une autorisation accordée par les prédécesseurs d'[Abou-Yahya-] Abou-Bekr et confirmée par ce sultan. Toutefois, il ne se retira jamais sans avoir reçu la totalité de l'impôt, et cependant, Ibn-Mozni était alors attaché au service du sultan Abou-'l-Hacen. Il fit aussi une expédition dans le Rîgha, s'empara de Tuggurt, capitale de cette région, et, après en avoir enlevé toutes les richesses, il pénétra dans l'Auras et prit d'assaut la plupart des forts qui servaient de refuge aux habitants de cette montagne. Ce fut ainsi que, de tous côtés, l'empire lança

sur les réfractaires l'orage de sa puissance et que les troupes du sultan parcoururent les diverses parties du pays.

Sur ces entrefaites, en l'an 742 (1341-2), Hamza-lbn-Omar fut tué en guet-apens par Abou-Aun-Ibn-Abi-Ali, chef des Beni-'l-Kethîr, famille kaoubienne: Ses fils, dont l'aîné s'appelait Omar, prirent le commandement de la tribu et, comme ils soupçonnaient le gouvernement tunisien d'avoir suborné l'assassin, ils rassemblèrent leurs guerriers et obtinrent le secours de leurs anciens rivaux, les Beni-Mohelhet. Ibn-el-Hakim marcha contre eux à la tête des milices et des contingents zenatiens, mais il essuya une défaite et perdit plusieurs de ses principaux officiers. Par suite de cet échec, il se replia sur Tunis, et, pendant qu'il s'y tenait retranché, l'ennemi vint camper autour de la ville. Ceci se passa en l'an 742 (1341-2). Pendant sept jours consécutifs, les Arabes attaquèrent les troupes de l'empire; mais la discorde s'étant enfin mise dans leurs rangs, Taleb-Ibn-Mohel-hel et sa tribu firent leur soumission et obligèrent ainsi les fils de Hamza à prendre la fuite avec leurs partisans. Dans le mois de Djomada (novembre) de la même année, le sultan sortit à leur poursuite, ayant sous ses ordres l'armée impériale, les contingents hoouarites et ses alliés arabes. Il atteignit l'ennemi à Raccada, dans la plaine de Cairouan, lui tua beaucoup de monde et, vers la fin de Ramadan (commencement de mars 1342), il rentra dans sa capitale.

Les fuyards prirent la route du Désert et, en passant auprès de Cafsa, ils invitèrent Abou-'l-Abbas, le prince royal qui y gouvernait alors, à se révolter contre son père, lui promettant de marcher sous ses ordres jusqu'à Tunis. Le prince entra en correspondance avec eux et traîna la négociation en longueur jusqu'à ce qu'il trouva l'occasion d'arrêter et de décapiter MoëzzIbn-Motaên, vizir de Hamza et principal fauteur de ces derniers désordres. Le sultan fit planter sur les murs de Tunis la tête de

1 Le texte arabe, tant de l'édition imprimée que des manuscrits, porte thelathin (trente), c'est-à-dire 730.

ce perturbateur et, en témoignage de la satisfaction que lui causa la conduite de son fils, il profita du retour de ce prince à la capitale pour le déclarer héritier du trône.

Ce fut vers la fin de cette année (mai-juin 1342) qu'on prêta le serment de fidélité à l'émir Abou-'l-Abbas, en sa nouvelle qualité; les grands de l'empire et le peuple se rassemblèrent devant le portique du palais pour entendre lire l'acte de cette nomination, puis, ils se séparèrent en faisant des vœux pour la prospérité du sultan.

La rude leçon que les fils de Hamza venaient de recevoir les décida à faire leur soumission.

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Abou-'l-Cacem-Ahmed-Ibn-Ismail-Ibn-Abd-el-Azîz-el-Ghassani , appartenait à une famille andalousienne qui s'était fixée à Maroc. Ses aïeux y remplirent des emplois sous le gouvernement almohade, et son père alla s'établir à Tunis. Abou'I-Cacem-Ibn-Abd-el-Azîz fut élevé dans cette capitale et entra, comme secrétaire, au service du chambellan Ibn-cd-Debbagh. Lors de la chute de celui-ci, après l'occupation de Tunis par le sultan Abou-'l-Baca-Khaled, Ibn-Abd-el-Azîz trouva un protecteur dans Ibn-Ghamr et accompagna ce chambellan à Constantine. Djafer-el-Kebîr, étant venu séjourner dans cette ville, le prit pour secrétaire et, jusqu'à sa déportation en Espagne, il le garda auprès de lui. En l'an 713 (1313), Ibn-Ghamr le nomma ministre des finances à Constantine et, devenu ensuite maître absolu de la ville de Bougie, il laissa son protegé au service d'Ibn-el-Caloun. En 718 (1318), lors de l'arrivée du sultan [Abou-Yahya-]Abou-Bekr à Tunis, Ibn-el-Caloun rappela IbnAbd-el-Azîz de Constantine et lui confia l'administration des finances dans la capitale. Quelque temps après, Ibn-Abd-elAziz, secondé par le Mizouar du même nom, commença ses intrigues contre Ibn-el-Caloun, et, en 724 (1324), il réussit à lui

faire prendre la fuite. On donna alors au Mizouar la place de chambellan, et, comme il n'avait pas les talents nécessaires pour bien remplir cet office, ou lui adjoignit Ibn-Abd-el-Azîz en qualité de lieutenant. Après la mort du Mizouar, le vice-chambellan le remplaça en attendant l'arrivée d'Ibn-Séïd-en-Nas, qui était alors à Bougie. On nomma ensuite Ibn-Abd-el-Azîz gouverneur de la province d'El-Hamma, afin de l'éloigner de Tunis où sa présence donnait de l'ombrage au nouveau ministre. Rappelé à la capitale, lors de la démonstration faite par Abd-el-Ouahed-Ibn-el-Lihyani aux environs de Cabes, il alla joindre le sultan qui dirigeait alors son expédition contre Temzezdekt; et, depuis lors, il ne le quitta plus. Après la chute d'Ibn-Seïd-en-Nas, il obtint la place de chambellan et la garda jusqu'à sa mort, événement qui eut lieu dans le commencement de l'an 744 (mai-juin 1343). Il eut pour successeur Abou-Mohammed-Abd-Allah-Ibn-Tafraguîn, chef des Almohades.

Les Tafraguîn appartenaient à une puissante famille almohade de Tinmelel, et leur aïeul, Omar-Ibn-Tafraguîn fut un des aït-el-khamcin'. En l'an 540 (1145-6), lors de la prise de Fez par les Almohades, Omar reçut de leur souverain, Abd-el-Moumen, le commandement de cette ville, et il y resta jusqu'à l'occupation de Maroc, où il exerça ensuite le haut commandement et présida à la prière publique toutes les fois qu'Abd-el-Moumen était en expédition. En l'an 551 2(1156), eut lieu, à Maroc, la révolte d'Abd-el-Azîz et d'Eïça, fils, tous les deux, d'Aumgar, frère de l'imam El-Mehdi. Ils commencèrent par assassiner Omar-Ibn-Tafraguin au moment où il prononçait l'appel à la prière; mais, le jour étant survenu, ils furent mis en pièces par le peuple. Abd-Allah, fils d'Omar, devint alors un des principaux chefs des Almohades. Quand le khalife Youçof, fils d'Abd

Voy. tome 1, page 174.

2 Dans le tome 1, pages 190, 191, Ibn-Khaldoun nous laisse entendre que cette révolte eut lieu avant l'époque marquée ici, et, en effet, l'auteur du Cartas la place sous l'année 546

el-Moumen, nomma son frère, le cîd Abou-Ishac, au gouvernement de Cordoue, il plaça Abd-Allah, fils d'Omar-Ibn-Tafraguîn, auprès de lui en qualité de conseiller. Cette charge donna le droit de présider le grand conseil dont Youçof-Ibn-Ouanoudîn et d'autres chefs almohades faisant partie. Omar-Ibn-Abd-AllahIbn-Tafraguîn, fils du précédent, suivit la carrière de son père, et, comme lui, il jouit d'une haute considération, Le cîd AbouSaîd, fils d'Omar, fils d'Abd-el-Moumen, ayant été nommé gouverneur de l'lfrîkïa, donna à Omar-lbn-Abd-Allah le commandement de la ville et de la province de Cabes. En l'an 592 (1196), Omar fut chassé de Cabes par Yahya-Ibn-Ghanîa. Ses descendants continuèrent à remplir de hauts emplois et à tenir un rang élevé dans le corps des cheikhs almohades.

Le dernier membre de la famille Tafraguîn qui figura dans le Maghreb fut Abd-el-Azîz. S'étant opposé aux Almohades qui se révoltèrent à Maroc contre El-Mamoun, il fut assassiné par eux pendant qu'il se rendait à la mosquée de bon matin, selon son habitude; car il s'était fait un devoir de s'y trouver toutes les fois que les fidèles s'y réunissaient pour célébrer la prière. ElMamoun témoigna sa reconnaissance du dévouement qu'Abd-elAzîz lui avait montré en comblant de faveurs Abd-el-Hack, le frère, et Ahmed, Mohammed et Omar, les fils de ce serviteur、 fidèle. Lors de la consternation générale causée par le massacre des Almohades, Abd-el-Hack-Ibn-Tafraguîn quitta le Maghreb sous le prétexte d'aller à la Mecque, et, s'étant arrêté à Tunis, chez le sultan El-Mostancer, il obtint de ce prince un emploi semblable à celui qu'il avait occupé en Maroc. De temps en temps, il fut envoyé par le sultan à El-Hamma, afin de faire rentrer les cheikhs de cette ville dans le devoir et d'y rétablir la tranquillité. Dans toutes ces missions il déploya une grande habileté, et il ramena la paix en faisant mourir les fauteurs du désordre. Après la mort de Mohammed-Ibn-Abi-Hilal, il obtint du sultan Abou-Ishac le gouvernement de Bougie. Dans cette haute position il montra encore la supériorité de ses talents, et, à l'époque où l'imposteur, Ibn- Abi-Omara, monta sur le trône, il partit à la tête d'une armée almohade que cet usurpateur avait

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