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Les gens du pays affirment cependant que ces ouvertures ont toujours existé; et il est à remarquer qu'elles sont toutes dirigées vers le sud.

Quelquefois deux chambres rectangulaires étaient formées par le même mur cylindrique, séparées par un mur vertical, et deux larges pierres recouvraient tout le monument.

Cent vingt-cinq tombeaux environ sont ainsi répartis sur une étendue de 250m du nord au sud, et 150m de l'est à l'ouest. Ce n'est pas sans un véritable étonnement que l'on se trouve ainsi tout-à-coup en présence de ces singuliers tombeaux. Un grand nombre ont été respectés par le temps, d'autres se sont écroulés ; mais les pierres dont ils étaient formés sont toujours réunies, et la large dalle qui les recouvrait domine encore leurs ruines.

Nous avons fouillé cinq tombeaux, et voici quels ont été les résultats de nos recherches. Les deux premiers étaient clos de toutes parts, et semblaient n'avoir jamais été explorés.

Nous avons voulu prendre, d'abord, les précautions les plus minutieuses, pour conserver tous les ossements à leur place, et reconstituer ainsi le cadavre en dehors du monument.

Les premiers ossements que nous avons trouvés étaient å Om50 du sol environ, et déjà l'on pouvait voir les formes souterraines des tombes.

La partie latérale inférieure était formée par une large dalle fixée verticalement dans le sol, et retenant ainsi la

poussée des terres, en même temps qu'elle servait de fondation au mur extérieur. Cette dalle est enfouie jusqu'à une profondeur de 1m à un 1m 50.

Les deux côtés perpendiculaires à celui-ci étaient également formés par des dalles, et constituaient avec le premier une fosse de 1m50 de longueur sur 090 de large, avec la hauteur de 1m à 150 au-dessous du sol.

La face latérale la plus élevée n'est jamais formée par une dalle; le mur extérieur repose sur le sol ou sur le rocher. Cette disposition a eu le résultat suivant :

Les eaux du ciel et la poussée des terres n'étant pas arrêtées à la partie la plus élevée du monument, ont bouleversé tout ce qui était renfermé dans le tombeau ; et ces deux forces agissant pendant des siècles, ont fini par amalgamer tous les os; si bien qu'il nous a été complétement impossible de reconstituer un seul squelette.

Une autre circonstance a rendu nos recherches peu fructueuses à certains points de vue:

La colline est presque dénudée; sur une grande partie de sa surface, les terres ont disparu, et le rocher est à nu. Il n'y avait donc un peu de terre que sous ces monuments; aussi, voit-on les quelques chênes verts de ce versant pousser entre les tombeaux, et leurs racines vont chercher la sève au milieu des ossements. Elles ont pénétré jusque dans les crânes, et les ont détruits si bien, que nous n'avons pas trouvé une seule tête en bon état. Nous n'avons pas rencontré un angle facial bien conservé, et nous en avons eu grand regret; car c'est d'après celle donnée qu'on pourrait surtout distinguer la race et la physionomie des hommes enterrés sous ces pierres. Dans le 1er tombeau, nous avons trouvé cinq têtes

brisées et incomplètes; elles étaient mêlées sous le sol avec de grosses pierres, et les mouvements souterrains dont nous parlions tout à l'heure avaient sans doute détruit l'harmonie des squelettes. L'une de ces têtes devait être celle d'un jeune enfant; les autres appartenaient à des personnes dans la force de l'âge.

A un angle seul du tombeau, se trouvaient trois crânes superposés, et tous trois se sont réduits en petits fragments dès qu'ils ont été mis à l'air.

En fait d'ossements assez bien conservés, il y avait: Un fémur de 0m43, correspondant à une taille de 1o65 environ;

Un humerus de Om26, correspondant à une taille de 1m45 environ;

Un radius de 022, correspondant à la taille de 1-72 environ;

Un tibia de Om39, correspondant à la taille de 172

environ.

Il y avait, en outre

Les fragments d'un pot en forme de gargoulette;
Un anneau de bronze, extrêmement petit;

Un autre anneau plus grand, dont l'épaisseur est faible; il présente à sa surface trois rayures qui font tout le tour de l'anneau ;

Un morceau de fer rongé par la rouille;

Enfin, un dernier objet dont nous n'avons pu comprendre la destination: c'est un tube en ivoire de trois ou quatre centimètres de longueur, assez semblable, quant à la forme, aux bouts d'ambre de nos tuyaux de pipe; nous en avons trouvé un ou deux dans chacun des tombeaux que nous avons fouillés.

Le deuxième tombeau que nous avons exploré nous a donné des résultats plus curieux.

Il renfermait huit crânes parfaitement distincts; deux seulement étaient en assez bon état de conservation; mais la face était enlevée. Nous avons conservé la partie postérieure de ces crânes, en les enduisant d'une couche de spermaceti; l'un est très-remarquable. Les dimensions de l'un et de l'autre se rapprochent énormément de celles. qui ont été trouvées comme moyennes des têtes berbères par M. le général Faidherbe.

Quelques autres ossements avaient encore toute leur longueur; c'étaient :

Un fémur de 045, correspondant à une taille de 170; Deux fémurs de 0m42;

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De nombreux fragments de pots, qui nous ont paru tous avoir eu la forme de gargoulettes;

Une boucle d'oreille en bronze, parfaitement conservée, assez semblable aux boucles d'oreilles que portent aujourd'hui les femmes kabiles (1);

Un petit tube d'ivoire, un fil de bronze en forme de nœud;

Enfin un os et une petite lame de cuivre ainsi disposés ; l'os est un fragment de l'os du pubis; le morceau de cuivre

(1) Ces objets sont exactement semblables à ceux rapportés par M. Féraud des fouilles du Bou-Merzoug, déposés actuellement au musée de Constantine, et dont le dessin a été donné dans notre Recueil de l'année 1863. Ces nouveaux objets, offerts par M le Capitaine de Boysson, sont également déposés au musée de Constantine. (Note de la Redaction.)

a deux centimètres de long sur un centimètre de large; il était fixé sur l'os, à l'une de ses extrémités, par un clou rivé, et l'autre extrémité dépassait l'os d'un 1/2 centimètre; elle était percée d'un trou, absolument comme si le morceau de cuivre avait été destiné à relier deux parties d'un même os accidentellement brisé.

Nous avons attribué d'abord cette disposition, par trop extraordinaire, au seul fait du hasard; mais bientôt après, nous avons trouvé une deuxième feuille de cuivre qui semblait avoir eu le même but que la précédente.

De plus savants apprécieront les conjectures qu'on doit tirer de ces observations; pour notre part, nous avons fait de nombreuses suppositions, et nous persistons à attribuer au seul fait du hasard, l'application de cette bande de cuivre sur ce fragment d'os humain.

Les trois derniers tombeaux nous ont donné beaucoup moins de résultats que les premiers. L'un d'eux nous était désigné sous le nom de Kebir-bou-Djouhala, c'està-dire le chef des Idolâtres; il est complétement isolé des autres, et au lieu de se trouver sur le versant de la colline, il est placé sur le col entre les deux hauteurs ; il ne présente aucune trace de muraille extérieure, et se forme de quatre pierres verticales enfouies sous le sol jusqu'à 1m50, et dominées par une large dalle.

En soulevant cette dalle, nous avons trouvé un crâne broyé sous la pierre; nous avons creusé jusqu'à 1ṁ50, et n'avons rencontré au milieu de la terre qu'une boucle de bronze.

Évidemment, ce tombeau avait été déjà fouillé par les gens du pays; son nom de Kebir avait sans doute excité leur cupidité; mais le crâne appartenait-il au chef pour

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