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comparée à celle des oliviers du midi de la France. Des usines perfectionnées, établies dans plusieurs tribus par de hardis industriels européens, ont encore augmenté, depuis quelques années, le produit des olives, broyées jusqu'alors à l'aide de moulins indigènes tout-àfait défectueux. Quand les propriétaires kabiles auront leurs intérêts étroitement liés à ceux des Européens, le commerce des huiles atteindra à Bougie une extension immense.

Le miel, la cire, les fruits secs (figues et raisins), les caroubes et les peaux, figurent aussi au nombre des denrées apportées en abondance sur le marché.

L'exploitation des riches forêts qui couronnent les montagnes voisines, depuis l'Akfadou jusqu'aux BeniFour'al, dans lesquelles on peut à la fois récolter beaucoup de liége, de la résine, et extraire des bois propres aux constructions navales, est également en voie de progrès.

La région qui borde le littoral du golfe de Bougie est, sans contredit, celle qui possède les plus belles forêts de l'Algérie. Une puissante végétation la couvre de verdure; autant le versant sud de ce massif de montagnes paraît fauve et aride, autant la partie qui fait face à la mer, est pleine de sève et de vie. Sur de hautes collines sillonnées par de profonds ravins où murmurent constamment des eaux, qui tombent en cascades, abondent le pin, le cèdre et toutes les variétés de chênes mélangées à une infinité d'autres essences; mais l'arbre le plus estimé à cause de ses qualités résistantes, et aussi par les dimensions majestueuses qu'il atteint dans certains cantons, c'est le chêne zan, dit afarès (quercus castanei

folia), dont la société forestière algérienne, tire aujourd'hui, un si utile parti.

Il faut espérer que l'on pourra bientôt en dire autant de l'exploitation des mines de fer, de cuivre et de plomb argentifère, qui existent également dans la contrée (1).

Dans le golfe de Bougie, notamment à hauteur de Ziama, existent des bancs de corail que l'on pourrait exploiter comme autrefois. La pêche du corail était jadis le privilége des Catalans, et, en 1446, un Barcelonais. chargé de diriger celte industrie résidait encore à Bougie.

Du jour où nos colonnes expéditionnaires ont pénétré dans ces montagnes, tous les efforts ont tendu à créer des communications entre Bougie et l'intérieur. Là où ne se voyaient précédemment que d'étroits sillons tracés par le pied de l'homme, souvent impraticables en hiver et qu'on ne pouvait même pas appeler des sentiers, nos troupes ont ouvert des routes muletières :

En 1849, le colonel de Lourmel inaugurait les pre

(1) Pendant mes courses dans le cercle, j'ai reconnu les gisements minéralogiques dont voici le détail :

1° Mine de fer très-riche entre les Berbacha et les Beni-Sliman, exploitée par les Kabiles, à 12 lieues de Bougie;

2. Mine de fer très-riche chez les Beni-Seliman, près Kombita, à 14 lieues du port;

3o Mine de plomb argentifère, chez les Beni-Djelil.- J'ai reconnu cette mine en 1852.- Les Kabiles ont cessé de l'exploiter, il y a environ 60 ans, à la suite d'un éboulement qui engloutit plusieurs hommes. On m'a assuré qu'elle était très-riche. Les échantillons que j'ai fait analyser ont confirmé cette opinion. A 14 lieues;

4o De superbes échantillons de minerai de cuivre ont été apportés de Toudja. Les Kabiles n'ont pas voulu m'indiquer le gisement..... Et bien d'autres gisements dont j'ai entendu parler, mais que je n'ai point explorés.

miers chantiers de travailleurs, sur la route stratégique, projetée entre Bougie et Setif.

En 1852, la colonne d'observation, sous les ordres du général Maissiat, élargissait et améliorait cette même. route; l'année suivante, les travaux étaient continués avec ardeur, et quatre caravanserails étaient construits, de distance en distance, pour servir de gîtes d'étapes aux voyageurs.

Les travaux, suspendus pendant la guerre d'Orient, étaient repris en 1856 et continués durant trois années consécutives; le passage par les crêtes des Guifsar présentant de grands inconvénients, avait été abandonné, et un autre tracé par les Beni Seliman jugé préférable; mais ces routes manquant les unes et les autres de travaux d'art et de soins permanents, ne tardaient pas à devenir impraticables, même aux muletiers, à cause des éboulements causés par la fonte des neiges.

Depuis, M. l'ingénieur de l'Epinay a étudié le tracé d'une nouvelle route définitive, actuellement en exécution, et qui ne tardera pas à être achevée. Le tracé de M. de l'Epinay passe par le Chabet el-Akhera, et aboutit au littoral en longeant la vallée de l'Oued Aguerioun. Il offre, sur celui des anciennes routes, le double avantage d'être d'abord plus court, puisque Setif ne sera plus qu'à 72 kilomètres de la mer, et ensuite de se maintenir beaucoup moins longtemps dans la région où les neiges peuvent interrompre la circulation. Cette voie de communication, ouverte pour relier Bougie et Setif, intéresse ces deux villes au même degré; elle rendra son ancienne importance au port, qui servira de débouché à toutes les denrées des plaines fertiles de Setif, de la

Medjana et de Hodna, et l'on pourra voir ainsi renaître bientôt à Bougie l'activité qui l'animait au moyen âge.

Une autre route constamment en plaine, le long de la vallée, jusqu'aux Beni Mansour, lui assurera bientôt aussi le commerce des riches campagnes qui s'étendent au pied du Jurjura, et la reliera à la grande communication établie entre Constantine et Alger.

Possédant à ses portes tant d'éléments de richesses forestières et minéralogiques qui peuvent alimenter en permanence des usines, arsenaux ou chantiers de construction, et dans une position topographique si admirablement favorisée par la nature, Bougie deviendra assurément une des villes importantes de l'Algérie; on pourra surtout y développer l'activité de la race kabile, qui, par ses mœurs laborieuses, entre le plus franchement dans la voie du progrès; elle reprendra alors son rang de cité maritime, de grand centre commercial, et jouira enfin d'une vie nouvelle et féconde.

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A l'époque où les colonies phéniciennes florissaient sur la côte septentrionale d'Afrique, Carthage étendit ses relations commerciales vers les plages de la Numidie et de la Mauritanie. Elle y fonda des villes, établit des ports et des forteresses qui formaient, sur tous les points avantageux du littoral, une chaîne non interrompue, depuis les Syrtes jusqu'au détroit de Gibraltar. C'était ce qu'on appelait dans l'antiquité les emporiæ, ou comptoirs commerciaux.

Comme la plupart de nos comptoirs modernes, ces villes phéniciennes étaient des postes isolés sur une plage étrangère, n'ayant dans leur dépendance qu'un petit territoire à l'entour de leurs murailles; et nous savons avec certitude qu'il avait fallu acheter des indigènes les emplacements sur lesquels on s'était établi le prix de cette cession était une redevance annuelle. Carthage paya

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