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Afia, fils d'Abd-el-Ouahab-ben-Rostem, poussé à cela par le khalife d'Espagne 1.

Le 11 mai 856, Abou-l'Abbas mourut à Kaïrouan. Quelque temps auparavant, avait eu lieu le décès de Sahnoun, un des plus grands docteurs selon le rite malekite.

Abou-Ibrahim-Ahmed

GOUVERNEMENT D'ABOU-IBRAHIM-AHMED. succéda à son frère Abou-l'Abbas. Il régna paisiblement pendant trois ans. Vers 859, les Berbères des environs de Tripoli s'étant refusés d'acquitter l'impôt, Abd-Allah, gouverneur de cette ville, marcha contre eux. Mais, après avoir essuyé plusieurs défaites, il dut se renfermer derrière les remparts de Tripoli et demander du secours au gouverneur de Kaïrouan. Ziadet-Allah, frère d'AbouIbrahim, accouru en toute hâte à la tête d'une armée, fit rentrer les rebelles dans le devoir, après leur avoir infligé une sévère pu

nition.

Abou-Ibrahim continua à s'occuper de travaux d'utilité publique pour lesquels il avait un grand goût, et en fit profiter non seulement sa capitale, mais encore Souça et plusieurs autres localités. Il s'attacha surtout aux travaux hydrauliques et dota Kaïrouan de plusieurs citernes, notamment de celle appelée El-Madjel-el-Kebir établie près de la porte de Tunis 3.

Ces soins ne l'empêchèrent pas de continuer la guerre de Sicile. Abou-l'Abbas-Ibn-Abou-Fezara avait succédé comme commandant militaire à Abou-l'Arleb, mort en 851. Ce général poussa activement les opérations militaires et remporta de réels succès qui furent accompagnés des plus grandes cruautés. En 858, il s'empara de Céfalu. Le 24 janvier de l'année suivante, il se rendit maître. de la forteresse de Castrogiovanni, qui résistait depuis trente ans et où les Siciliens avaient réuni de grandes richesses. Cette perte causa dans l'ile une véritable stupeur, dont profitèrent les Musulmans.

Vers 860, l'empereur Michel III, livrogne, envoya une nouvelle expédition en Sicile. A l'approche des Byzantins, plusieurs cantons se soulevèrent, mais Abbas, ayant écrasé l'armée impériale et forcé ses débris à reprendre la mer, ne tarda pas, grâce à son énergie, à rétablir la paix dans son territoire. Il mourut le 18 août 861 *.

1. Ibn-Khaldoun, t. I, p. 419. Ibn-El-Athir, passim.

2. El-Kairouani donne la date de 854.

3. En-Nouéiri, p. 420.

4. Michele Amari, Storia, t. I, p. 320 et suiv.

En décembre 863, Abou-Ibrahim, qui avait su par sa justice et sa bonté, s'attirer l'affection de ses sujets, tomba malade et mourut le 28 dudit mois, après avoir régné huit ans. On rapporte que, pendant sa maladie, on achevait la citerne du vieux château et qu'il s'informait chaque jour, avec intérêt, de l'état des travaux. Enfin on lui apporta une coupe pleine de l'eau de la citerne il la but avec empressement et mourut presque aussitôt. Il n'était âgé que de vingt-neuf ans.

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EVÉNEMENTS D'Espagne. En Espagne, Ahd-er-Rahman II était mort subitement le 22 septembre 852. Il laissait deux fils : Mohammed et Abdallah qui aspiraient l'un et l'autre à lui succéder, car leur père n'avait pris aucune disposition précise à ce sujet. Appuyé par les eunuques, Mohammed parvint à s'emparer du pouvoir. C'était un homme médiocre, entièrement livré à la débauche. Il ne tarda pas à éloigner de lui la masse de ses sujets et ne sut plaire qu'à la caste des clercs, ou fakihs, dont il flatta le fanatisme en persécutant les chrétiens.

Les habitants de Tolède s'étant mis en état de révolte appelérent à leur secours les chrétiens du royaume de Léon, et Ordoño Ier envoya une armée pour les soutenir. Mais Mohammed ayant, en personne, marché contre eux, attira les confédérés dans une embuscade, les vainquit et en fit un carnage épouvantable: huit mille têtes furent coupées et envoyées dans les principales villes d'Espagne et même d'Afrique. Cependant Tolède continua à rester en état de révolte, et, comme les Musulmans accusaient les chrétiens d'être les fauteurs de cette rébellion, les persécutions redoublèrent contre eux. Bientôt, du reste, une levée de boucliers des chrétiens et des renégats se produisit dans les montagnes de Regio.

Sur ces entrefaites, un chef d'origine wisigothe, Moussa II, qui avait formé dans le nord un état indépendant, appelé la frontière supérieure, et dont la puissance avait contrebalancé celle de l'émir de Cordoue, vint à mourir (862). Mohammed rentra alors en possession de Tudèle et de Sarragosse, ainsi que d'une partie de la frontière supérieure ; mais le reste, de même que Tolède, demeura dans l'indépendance sous la protection du roi de Léon '.

Vers cette époque, les Normands, qui avaient déjà pillé et brûlé Séville, en 811, firent de nouvelles incursions dans la péninsule en remontant les fleuves. Le fameux Hasting parcourut, avec une flotte de cent voiles, la Méditerranée et ravagea le littoral de la

1. Dozy, Musulmans d'Espagne, t. II, p. 158 et suiv.

Maurétanie, de l'Espagne et des iles, vers 860. La ville de Nokour eut particulièrement à souffrir de leurs excès '.

GOUVERNEMENT DE ZIADET-ALLAH, DIT LE JEUNE, et d'Abou-el-R'aRANIK. A Kaïrouan, Abou-Mohammed-Ziadet-Allah, le jeune, avait succédé à son frère Ahmed (décembre 863). Ce prince paraissait bien doué, mais la mort le surprit le 22 décembre 864, après un an de règne. Son neveu Abou-Abd-Allah-Mohammed, surnommé Abou-el-R'aranik (l'homme aux grues: lui succéda. Le goût de ce prince pour la chasse aux grues lui avait valu ce surnom.

Une révolte des Berbères signala les premiers jours de son règne. Biskra, Tehouda, les Houara, voisins du territoire des Rostemides, toutes les populations du Zab et du Hodna, régions qui formaient alors la limite du sud-ouest, se lançèrent dans la rébellion. Le général Abou-Khafadja-ben-Ahmed, envoyé par le prince contre les révoltés, leur infligea de nombreuses défaites et les contraignit à la soumission. Seuls, les Houara résistaient encore. AbouKhafadja ayant opéré sa jonction avec le général Haï-ben-Malek, qui commandait un autre corps d'armée, pénétra dans le Hodna et atteignit les Houara. Les indigènes essayèrent en vain d'obtenir leur pardon en se soumettant aux conditions qu'on voudrait leur imposer, Abou-Khafadja, inflexible, donna le signal de l'attaque. Les Houara, sans espoir de salut, combattirent avec le dernier acharnement et, contre toute attente, les guerriers arabes commencèrent à plier; bientôt, Haï-ben-Malek prit la fuite, en entraînant la cavalerie. Abou-Khafadja, voyant la victoire lui échapper, se fit bravement tuer avec presque toute son escorte. Les débris de ses troupes se refugièrent à Tobna. Il ne paraît pas qu'Abou-l'R'aranik ait cherché à tirer vengeance de cet échec 2.

GUERRE DE SICILE. Pendant que l'Afrique était le théâtre de ces événements, les armes arabes obtenaient de nouveaux succès en Sicile. En 867, Basile le Macédonien, étant monté sur le trône impérial, s'appliqua à réorganiser l'armée et, dans la même année, envoya une expédition en Sicile. Une certaine anarchie divisait les Musulmans, depuis la mort de Abbas; les Berbères étaient jaloux des Arabes, et ceux-ci étaient toujours divisés par les rivalités des Yéménites et des Modhérites. Les troupes impériales obtinrent

1. El-Bekri, p. 92 du texte arabe. Ibn-Khaldoun, t. II, p. 159. Baïan, t. II, p. 44. Dozy, Recherches sur l'histoire de l'Espagne, t. I et II, passim.

2. En-Nouéiri, p. 422.

quelques succès et paraissent s'être emparées de Castrogiovanni; mais bientôt les Musulmans reprirent l'avantage et portèrent le ravage dans les environs de Syracuse. En 868, Khafadja-ben-Sofian qui avait pris le commandement, défit une nouvelle armée byzantine envoyée par Basile; mais il tomba peu après sous le poignard d'un Berbère houari.

L'année suivante 869, Ahmed-ben-Omar-ben-El-Ar`lebs'empara de l'ile de Malte. Les Byzantins, accourus en toute hâte, arrachèrent aux Arlebites leur nouvelle conquête. Mais, au mois de juin 870, la flotte musulmane envoyée de Sicile débarqua à Malte une nouvelle armée qui reprit l'ile aux chrétiens'.

MORT D'ABOU-EL-R'ARANIK. AHMED.

I-BEN

GOUVERNEMENT D'IBRAHIM-BI Abou-El-R'aranik mourut le 16 février 875, après avoir régné une dizaine d'années. Il n'était âgé que de vingt-quatre ans, et avait une si mauvaise santé qu'il avait passé plusieurs fois pour mort, ce qui lui avait valu le surnom d'El-Mïït. Comme la plupart des membres de la famille ar lebite, ce prince se distinguait par la bonté et la générosité; mais aussi il avait les défauts de ses devanciers, qui tous mouraient si jeunes; esclave de ses passions, il était dominé par le goût des plaisirs, de la chasse et surtout de la débauche et du vin. Sa prodigalité était si grande qu'il laissa le trésor complètement à sec. Son frère, Abou-IshakIbrahim, qui dirigeait les affaires comme premier ministre, était impuissant à le modérer dans ses dépenses.

Avant de mourir, Abou-el-R'aranik avait désigné, pour lui succéder, son fils Ahmed-Abou-L'Eïkal, et, comme il redoutait l'influence de son frère Ibrahim et ses visées ambitieuses, il l'avait contraint à jurer solennellement, cinquante fois de suite, dans la grande mosquée, qu'il ne tenterait pas de s'emparer du pouvoir. Mais cette précaution fut absolument inutile: aussitôt que la mort du gouverneur fut connue, le peuple se porta en foule auprès d'Ibrahim et le força à se rendre au château et à prendre en main les rênes du gouvernement.

Ibrahim essaya de résister en représentant qu'il était lié envers son frère par un engagement solennel. Mais, quand il vit le peuple décidé à n'accepter en aucune manière le règne d'un enfant, il se décida à prendre le pouvoir. Etant monté à cheval, il pénétra de force dans le vieux château et y reçut l'hommage des principaux citoyens.

Le nouveau gouverneur s'occupa ensuite de l'édification d'un

1. Amari, Storia, p. 341 et suiv.

T. I.

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vaste château au lieu dit Rakkada, à quatre milles de Kaïrouan, dans une localité privilégiée comme climat. Son but était d'en faire sa demeure et d'abandonner le vieux château. Il employa les premières années de son règne à diverses autres constructions, tout en dirigeant la guerre de Sicile et d'Italie, sur laquelle nous allons entrer plus loin dans des détails. En 878, les affranchis, descendants des troupes nègres formées par El-Ar leb, se révoltèrent dans le vieux château et osèrent même interrompre les communications avec Rakkada; mais ils furent bientôt forcés de se rendre, et Ibrahim les fit périr sous le fouet, ou crucifier, donnant ainsi le premier exemple de l'incroyable férocité qu'il devait montrer plus tard. Il fit ensuite acheter d'autres esclaves au Soudan et forma une nouvelle garde nègre qui se distingua, plus tard, par sa bravoure et son aveugle fidélité 1.

LES SOUVERAINS EDRISIDES DE FEZ. C'est sans doute vers cette époque que l'edriside Yahïa mourut à Fès et fut remplacé par son fils nommé, comme lui, Yahïa. Ce prince, par sa conduite dissolue, indisposa contre lui la population de la capitale ; à la suite d`un dernier scandale, la révolte éclata, à la voix d'un nommé AbderRahman-el-Djadami. Expulsé du quartier des Kaïrouanides, Yahïa se réfugia dans celui des Andalous, où il mourut la même nuit. Ali, fils d'Edris-ben-Omar, souverain du Rif, cédant aux sollicitations des partisans de sa famille qui étaient venus lui porter une adresse, se rendit à Fès, y prit en main le pouvoir et reçut le serment de fidélité des chefs du Magreb extrême.

Mais, peu de temps après, un kharedjite sofrite nommé Abd-erRezzak, natif d'Espagne, parvint à soulever les indigènes des montagnes de Mediouna, au sud de Fès. Après plusieurs combats, il remporta sur Ali une victoire décisive qui lui donna la possession du quartier des Andalous; il força ensuite Ali à se réfugier dans le territoire des Aoureba, ces fidèles amis de sa famille. Les habitants du quartier des Kaïrouanides ayant alors proclamé roi Yahïa, fils de Kacem-ben-Edris, ce prince réunit une armée et, étant parvenu à renverser l'usurpateur, conserva seul le pouvoir 2.

SUCCÈS DES MUSULMANS EN SICILE. Tandis que le Mag`reb était le théâtre de ces événements, le gouverneur Ibrahim se trouvait absorbé par d'autres soins et surtout par la guerre de Sicile. Aus

1. En-Nouéïri, p. 424 et suiv.

2. El-Bekri, trad. art. Idricides. Ibn-Khaldoun, t. II, p. 566-567. Le Kartas, p. 103 et suiv.

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