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sultan des Beni-Abd-el-Ouad et, sur la demande de ce prince, il lui donna sa fille en mariage. La fiancée emporta avec elle un trousseau magnifique et voyagea avec une escorte digne de sa haute naissance.

Lors de la prise de Bougie et de la mort d'Abou-Abd-Allah, tué sur le champ de bataille, Abou-Hammou en fit paraître un vif mécontentement et, sous le prétexte de venger son beaupère, il organisa une expédition contre Bougie. En quittant Tlemcen, il emmena avec lui des forces imposantes; on y remarqua plusieurs milliers de troupes abd-el-ouadites, les divers corps de l'armée, la milice et des nomades arabes'.

Pendant qu'il s'approchait du territoire de Hamza, les BeniYezîd, commandés par Abou- 'l-Leil-Ibn-Mouça-Ibn-Zoghli, reculèrent devant lui et allèrent prendre position sur cette partie de la chaîne de montagnes occupées par les Zouaoua qui domine la plaine de Hamza. Sommé de faire sa soumission, le chef arabe répondit par l'arrestation des envoyés. Parmi eux se trouva Yahya, petit-fils d'Abou-Mohammed-Saleh, qui, ayant abandonné le parti du sultan Abou-'l-Abbas pour celui d'Abou-Hammou, avait reçu de celui-ci la commission de guetter et de surprendre Abou-'l-Leil. Cette tâche paraissait d'autant plus facile que Yahya et Abou-'l-Leil étaient voisins, originaires du même pays. Le chef yezidien fit aussitôt trancher la tête à son ennemi et l'envoya à Bougie. Ne pouvant soumettre un tel adversaire, AbouHammou passa outre et alla camper sous les murs de Bougie. Pendant plusieurs jours il dirigea des attaques contre la ville et, ayant rassemblé des ouvriers, il fit construire des machines de siége.

Le sultan Abou-'l-Abbas s'était enfermé dans Bougie, mais son armée, sous les ordres de Bechir l'affranchi, restait en observation à Tagrert. Un cousin d'Abou-Hammou, nommé AbouZian-Ibn-Othman-Ibn-Abd-er-Rahman, se trouvait alors dans

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hafside. Ayant quitté le Maghreb pour des raisons que

Dans le texte arabe, il faut lire nawadje.

nous indiquerons ailleurs, ce prince s'était rendu à la cour d'Abou-Ishac, à Tunis, et sa haute naissance lui avait valu l'accueil le plus distingué de la part du chambellan Abou-Mohammed-Ibn-Tafraguîn. L'émir Abou-Abd-Allah s'étant emparé de Tedellis, l'invita à venir le trouver, voulant lui confier le gouvernement de cette place et tenir ainsi en échec le sultan AbouHammou. De cette manière il espérait se garantir contre les Beni-Abd-el-Ouad et avoir toute liberté d'envahir le territoire territoire de Constantine. Abou-Zian accepta cet offre avec empressement et quitta Tunis, mais, en passant par Constantine, il fut arrêté par le sultan Abou-l-Abbas et retenu dans une captivité honorable. Abou-'l-Abbas, devenu maître de Bougie et informé qu'Abou -Hammou venait pour l'attaquer, leva les arrêts de son prisonnier et, l'ayant comblé de cadeaux et de prévenances, il lui fournit les insignes de la royauté, le reconnut comme souverain de Tlemcen et le fit partir avec l'armée de Bechir. Il espérait que les Beni-Abd-el-Ouad abandonneraient Abou-Hammou pour Abou-Zian, sachant que ce peuple était fatigué de la tyranie de leur souverain et que les Zoghba, Arabes du Maghreb central qui s'étaient joints aux troupes de Tlemcen, commençaient à craindre les conséquences de leur démarche. En effet, ces Arabes entrèrent en négociations avec Abou-Zian et prirent l'engagement de trahir leurs alliés aussitôt que le combat serait engagé.

Le 5 du mois de Dou-'l-Hiddja, 767 (15 août 1366), pendant que les Abd-el-Ouadites dirigeaient une attaque contre Bougie, les Zoghba lâchèrent pied et entraînèrent ainsi la défaite des assiégeants. Les défilés qui avoisinent la ville s'encombrèrent tellement de fuyards que beaucoup de monde y mourut écrasé. Les bagages, les femmes, les armes, les bêtes de somme et une quantité d'objets de toute espèce tombèrent au pouvoir des Hafsides. Les trésors d'Abou-Hammou eurent le mème sort, et ses femines, ayant cherché la protection d'Abou 'l- Abbas, furent livrées par lui à Abou-Zîan. Abou-Hammou fut renversé de cheval en essayant de fendre la presse, mais il parvint à s'échapper, grâce au dévouement de son vizir Amran-Ibn-Mouça

qui mit pied à terre et lui remit sa monture. Accompagné d'un débris de son armée et vivement poursuivi par Abou-Zian, le sultan abd-el-ouadite se jeta dans Alger d'où il se rendit à Tlemcen.

A la suite de cette victoire dont le retentissement ébranla tout le Maghreb, le sultan Abou-'l-Abbas sortit de Bougie et s'occupa de Tedellis.

Ce fut ainsi que les forteresses occidentales du royaume des Hafsides furent encore réunies sous l'autorité d'un seul homme, ainsi que cela avait déjà eu lieu lors du démembrement de l'empire par l'émir Abou-Zékérïa.

LE SULTAN ABOU-'L-ABBAS ENVOIE UNE ARMÉE CONTRE

TUNIS.

Quand l'émir Abon-Abd-Allah, fils d'Ibn-Tafraguîn, eut abandonné le service du sultan Abou-Ishac, il passa dans les cantonnements des Mohelhel et emmena ces Arabes avec lui. Vers le commencement de l'an 767 (sept.-oct. 1365), ils allèrent tous trouver Abou-'l-Abbas et l'invitèrent à faire une démonstration contre Tunis. Ce prince s'en excusa à cause de la guerre qu'il avait à soutenir contre son cousin, le seigneur de Bougie, mais il accepta leur appui dans l'expédition qu'il allait entreprendre cette dernière ville.

La conquête de Bougie effectuée, il plaça un corps de troupes sous les ordres de son frère Abou-Yahya-Zékérïa et l'envoya avec les Arabes et Ibn-Tafraguîn contre la capitale. Ils la tinrent bloquée pendant plusieurs jours, mais, découragés par la résistance de la garnison, ils conclurent un armistice avec le sultan et levèrent le siége. Abou-Zékérïa conduisit ses troupes à Bône, chef-lieu de la province qu'il commandait, et son compagnon, Ibn-Tafraguin, revint auprès d'Abou-'l-Abbas et resta avec lui jusqu'à la prise de Tunis.

MORT DU SULTAN ABOU-ISHAC SEIGNEUR DE TUNIS.

LUI SUCCÈDE,

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Des alternatives de paix et de guerre, telles que nous les avons décrites, continuèrent à marquer les relations qui existaient entre le sultan Abou-Ishac et le sultan Abou-'l-Abbas. [Après la fuite d'Ibn-Tafraguîn], Abou-Ishac prit pour ministre Mansour-Ibn-Hamza, émir des Kaoub, pensant que les conseils et les armes d'un chef aussi puissant suffiraient pour la défense de la capitale, et, pendant le reste de son règne, il n'eut qu'à se louer de son choix.

En l'an 769 (1367-8), [Abou-'l-Baca-]Khaled, fils d'AbouIshac, obtint de son père le commandement d'un corps d'armée et partit pour Bône avec Mohammed-Ibn-Rafé, officier de la milice maghraouienne et chargé de le diriger. Dans cette expédition, il se fit accompagner des Kaoub et de leur émir. Il avait reçu de son père l'ordre de soumettre la campagne de Bône, d'y porter la dévastation et de prélever les impôts; mais les habitants de cette région, soutenus par les troupes de l'émir AbouYahya-Zékérïa, le repoussèrent de façon à lui ôter toute envie d'y revenir. Quand l'armée tunisienne fut de retour à la capitale, le commandant en chef, Mohammed-Ibn-Rafê, tomba en disgrâce et dut se retirer dans sa tribu qui était alors à Lahca, localité qui dépend de Tunis. A force de sollicitations, il obtint son rappel; mais, au moment où il rentra à la capitale, il fut arrêté et mis en prison.

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Quelque temps après, dans le mois de. . . . . de l'an 770 (1368-9), le sultan avait de la société chez lui afin de passer, selon son habitude, la nuit en conversation, puis, accablé de sommeil, il s'était endormi. Le domestique de service étant venu le lendemain pour le réveiller, le trouva mort. Cet événement changea la joie des courtisans en tristesse et les remplit de consternation.

Il y a ici un blanc dans le texte arabe.

Pour remédier à ce grand malheur, il fut décidé qu'Abou-'lBaca-Khaled, fils du monarque décédé, serait déclaré sultan, et l'affranchi Mansour-Sariha, assisté du chambellan Ahmed-IbnIbrahim-el-Baleki, fit prêter au peuple le serment de fidélité. Dans cette séance solennelle, les Almohades, les hommes de loi et toutes les autres classes de la population se présentèrent pour faire acte d'hommage au nouveau souverain. Abou-'l-Bəca s'occupa ensuite des funérailles de son père et permit à Mansour et à Ibn-el-Baleki de s'arroger la direction des affaires publiques. Leur premier acte fut l'arrestation du cadi Mohammed-IbnKhalef-Allah, membre du corps des légistes et natif de Nefta. Ce docteur avait quitté sa ville natale à cause du gouverneur, AbdAllah-Ibn-Ali-Ibn-Khalef, qui lui avait donné quelques sujets de mécontentement, et s'était refugié à la cour de Tunis. Le sultan Abou-Ishac lui sut bon gré de cette démarche et le nomma cadi de la capitale, en remplacement d'Abou-Ali-Omar-Ibn-Abd-er-Refiâ qui venait de mourir. Plus tard, Ibn-Khalef-Allah eut le commandement des troupes que le gouvernement envoyait [chaque année] dans le Djerîd, et il rentra bien rarement de ce pays sans en avoir contraint les habitants à payer l'impôt. Quelquefois, cependant il avait dû l'évacuer, sans avoir rien obtenu, ayant découvert que ces populations réfractaires avaient voulu lui débaucher ses troupes arabes. Sa haute influence auprès du fen sultan excita la jalousie d'Ibn-el-Baleki; aussi ce personnage, de venu alors toutpuissant, le fit enfermer dans la prison où l'on retenait Mohammed-Ibn-Rafê. Il assigna pour motif à cette arrestation les nombreuses plaintes auxquelles la conduite du cadi avait donné lieu. Bientôt après, les deux prisonniers se laissèrent tromper par un misérable à la solde d'Ibn-Baleki et adoptèrent un projet d'évasion qu'il leur proposa. Toutes leurs dispositions étaient prises, mais, au moment où ils allaient partir, Ibn-el-Baleki entra et les fit étrangler. Dieu l'en punit plus tard, et les hommes pervers sauront la fin qui les attend! Emporté par son mauvais

Coran; sourate 26, verset 228.

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