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partisans de sa famille. Ces guerriers restèrent avec lui jusqu'à ce que Dieu eut ouvert aux musulmans les voies de la prospérité et du bonheur, replacé Abou-'l-Abbas sur le trône après la mort d'Abou-Einan, et permis à ce prince d'étendre son autorité sur toute la nation. Dès-lors, l'aspect d'Abou-'l-Abbas a répandu partout les bienfaits de la sécurité et de la justice, les avantages de la tranquillité et du bien-être; la rebellion a eu les mains liées, et le peuple a joui d'un bonheur parfait, sous l'abri de la puissance royale.

L'ÉMIR ABOU-YAHYA · ZÉKÉRÏA

CONNAÎT L'AUTORITÉ D'ABOU
L'OBÉISSANCE.

:

SE REVOLTE DANS EL-MEHDIA, RE

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Abou-Mohammed-Ibn-Tafraguîn étant de retour à la capitale, consacra ses premiers soins à la restauration des fortifications d'El-Mehdia prévoyant les coups que les Maghrebins pourraient porter à l'Ifrîfiïa, il voulut faire de cette place le boulevard de l'empire. Après en avoir relevé les murailles et rempli d'armes et de vivres les arsenaux et les magasins, il en donna le commandement à l'émir Abou-Yahya-Zékérïa. Ce prince qui vivait alors sous la protection de son frère le sultan Abou-Ishac, alla s'installer dans El-Mehdia, sous la surveillance d'Ahmed-IbnKhalef, créature d'Ibn-Tafraguîn. Au bout d'une année il se fatigua de l'asservissement dans lequel on le retenait, et, ne voulant plus rester exclus de l'exercice du pouvoir, il pénétra, de nuit, chez son ministre, Ibn-Khalef, et lui ôta la vie. S'étant ainsi débarrassé d'un tuteur incommode, il envoya chercher Abou-'lAbbas-Ibn-Mekki, seigneur de Cabes et de Djerba, pour lui confier les fonctions de chambellan. En faisant ce choix il agissait d'après la considération qu'Ibn-Mekki avait toujours été en rivalité avec Ibn-Tafraguin. Il expédia en même temps une dépêche à Abou-Einan, dans laquelle il offrit sa soumission au sultan mérinide et lui demanda des secours. Sa position était déjà fort compromise quand Ibn-Tafraguin envoya une armée contre lui,

aussi, pour échapper au danger, il courut se réfugier dans Cabes. El-Mehdïa rentra au pouvoir des Tunisiens, et Mohammed-Ibnel-Djekdjak en fut nommé gouverneur. Cet officier, parent d'IbnThabet, s'était rendu auprès d'Ibn-Tafraguîn lors du malheur qui frappa Tripoli [en 755], et avait réussi à gagner les bonnes grâces de ce ministre.

Abou-Einan ayant appris la révolte d'El-Mehdïa, y expédia une flotte remplie de troupes; il avait même désigné le commandant et les fonctionnaires qui devaient y résider; mais ces secours arrivèrent trop tard, la ville étant déjà rentrée sous l'autorité de la capitale. Nous aurons encore à parler d'Ibn-el-Djekdjak dont l'administration à El-Mehdïa donna beaucoup de satisfaction.

L'émir Abou-Yahya-Zékérïa fixa son séjour à Cabes et prit part à une expédition qu'Ibn-Mekki dirigea contre Tunis. On le fit ensuite passer chez les Douaouida où il reçut l'hospitalité de Yacoub-Ibn-Ali, chef dont il épousa la nièce, fille de Saîd. Quand le sultan Abou-Ishac obtint possession de Bougie, il donna à son frère Abou-Yahya le commandement des Sedouîkich, poste que ce prince continua à remplir pendant plusieurs années. Depuis lors il resta avec les Douaouida, et il mourut chez eux en l'an 776 (1374-5).

LE SULTAN ABOU-ISHAC S'EMPARE DE BOUGIE ET Y RÉTABLIT LA DOMINATION HAFSIDE.

En quittant Constantine, Abou-Einan rentra en Maghreb et, après s'y être reposé jusqu'à la fin de l'année, il renvoya son armée en Ifrîkïa, sous la conduite du vizir Soleiman - IbnDawoud. Cet officier parcourut le territoire de Constantine, accompagné de Meimoun-Ibn-Ali-Ibn-Ahmed, frère de YacoubIbn-Ali et son successeur dans le commandement des Douaouida. Othman-Ibn-Youçof-Ibn-Soleiman, chef des Aulad-Sebâ, lui prêta aussi son secours, ainsi que Youçof - Ibn - Mozni, gouverneur du Zab, lequel avait reçu un ordre à cet effet de la part du sultan mérinide. Dans cette expédition, le vizir sou

mit une grande étendue du pays et alla prélever l'impôt jusque dans les pays qui forment l'extrême limite du territoire de Bône. En l'an 759 (1358), il repartit pour le Maghreb, peu de temps avant la mort d'Abou-Einan. Cet événement jeta la perturbation dans le pays, mais tout rentra dans l'ordre aussitôt que le sultan Abou-Salem, frère du monarque décédé, monta sur le trône.

Le peuple de Bougie nourrissait une haine profonde contre son gouverneur, Yahya-Ibn-Meimoun, un des intimes du sultan Abou-Einan. Le mauvais naturel de ce fonctionnaire, son caractère violent et tyrannique, avaient indigné toute la population; pour s'en délivrer, on invita secrètement Ibn-Tafraguîo à s'emparer de la ville. Par suite de cette communication, le sultan Abou-Ishac reçut de son ministre un équipage royal et quitta Tunis, escorté par une armée bien approvisionnée, dont le commandement venait d'être confié à Abou-Abd-Alláh, fils [du même ministre]. Cette colonne rencontra en marche [les chefs arabes] Yacoub-Ibn-Ali et son frère, Abou-Dinar, qui lui amenaient des renforts. Quand elle arriva en vue de Bougie, la populace de la ville fit embarquer de force, pour Tunis, Yahya-Ibn-Meimoun et tous ses gens. Ibn-Tafraguin les y retint dans une captivité honorable et leur permit, plus tard, de partir pour le Maghreb.

Le sultan Abou-Ishac occupa Bougie en l'an 761 (1359-60). Il n'y exerça que peu d'autorité, parce que son chambellan, IbnTafraguîn, le retenait en tutelle et le dirigeait à son gré, tout en se tenant au loin, dans la capitale de l'empire. Quelque temps après cette conquête, le chambellan rappela son fils, Abou-AbdAllah,] et plaça auprès du sultan, en qualité de vizir, le cheikh almohade, Abou-Mohammed-Abd-el-Ouahed-Ibn-MohammedIbn-Akmazîr. Ce personnage remplissait [à Tunis] les fonctions de vice-chambellan. Le commandement de la populace armée de Bougie fut donné à Ali-Ibn-Saleh, homme du plus bas étage. Ce misérable s'était entouré d'une foule de mauvais sujets, et fort de leur appui, il imposait ses volontés au gouver

nement.

L'ÎLE DE DJERBA EST

SOUMISE A L'AUTORITÉ D'ABOU-ISHAC, SULTAN

DE TUNIS.

L'île de Djerba est située près de Cabes et à l'est de cette ville. Elle a soixante milles de longueur, de l'Est à l'Ouest; sa largeur, du côté de l'occident, est de vingt milles, et, du coté de l'orient, quinze. Elle est à soixante milles au Sud des îles Kerkinna. Le figuier, le dattier, l'olivier et la vigne y viennent très-bien. Elle est renommée pour ses pommes et pour ses étoffes de laine. On y fabrique des toiles rayées qui servent à envelopper le corps 3 et des toiles unies pour habits. Comme ces objets sont fort recherchés, il s'en exporte beaucoup.

3

Les habitants appartiennent à la race berbère et font partie de la tribu des Ketama. En effet, il s'y trouve, encore aujourd'hui, des Sedouîkich et des Sadghian, peuples d'origine ketamienne. On y rencontre aussi des Nefza, des Hoouara et quelques fractions d'autres tribus berbères.

Dans les temps anciens, les Djerbiens professaient le kharedjisme, et même, de nos jours, on y trouve deux branches de celte secte hérétique. L'une, qui est ouehbite, occupe la moitié occidentale de l'île et a pour chefs les Beni-Semoumen; l'autre est nekkarite et habite la moitié orientale. La seule famille marquante est celle des Semoumen, son autorité étant reconnue également par les deux parties.

Lors de la conquête musulmane, Djerba fut soumis par Roweife-Ibn-Thabet, chef qui appartenait à la famille ansarienne des Beni-Mélek-Ibn-en-Neddjar et à la colonie militaire arabe

Elle en a vingt ou vingt-cinq tout au plus.
Le texte arabe porte à l'Ouest.

• C'est ce qu'on appelle des haïcs.

Roweifé-Ibn-Thabet fut un des compagnons de Mahomet. Après avoir effectué la conquête de Tripoli en l'an 45 (665-6), il fut nommé émir de Barca, dans le Cyrénaïque, et il mourut dans cette ville.

établie en Egypte (djond Misr). En l'an 46 (666-7), il reçut du khalife Moaouïa le gouvernement de Tripoli [d'Afrique] et, ayant envahi ce pays, il s'empara de Djerba l'année suivante. HanechIbn-Abd-Allah-es-Sanani [de Sanâ en Yemen] assista à cette conquête. Rouaïfå se retira ensuite à Barca où il mourut.

Djerba resta entre les mains des vrais croyants jusqu'à l'époque où le kharedjisme fut introduit parmi les Berbères. En l'an 334 (942-3), pendant la révolte d'Abou-Yezid, les Kharedjites y pénétrèrent de vive force et imposèrent leurs croyances aux habitants, après avoir tué et mis en croix leur chef, Gueldin. El-Mansour-Ismail [le fatemide] reprit l'île et y fit mourir les partisans d'Abou-Yezîd.

Quand les Arabes eurent enlevé aux Sanhadja [Zîrides] les plaines de l'Ifrîkïa, les habitants de Djerba se mirent à construire des navires et à insulter les régions maritimes [de l'Ifrîkïa]. En l'an 509 (1445-6), la flotte d'Ali-Ibn-Yahya [le souverain zîride] les obligea à rentrer dans l'ordre et à renoncer aux habitudes de piraterie qu'ils avaient contractées.

En l'an 529 (1134-5) les Chrétiens [de la Sicile] occupèrent Djerba, après avoir subjugué le littoral de l'Ifrîkïa. Chassés en 548 (1153-4) par un soulèvement des habitants, ils y rentrèrent de nouveau, emmenèrent en esclavage beaucoup de monde et y établirent des agents chargés d'administrer les gens du peuple et les cultivateurs. Plus tard, l'île de Djerba retomba au pouvoir des musulmans et continua à subir alternativement leur domination et celle des chrétiens jusqu'à ce qu'elle passa sous l'autorité d'Abd-el-Moumen et des Almohades. La tranquillité s'y maintint jusqu'à l'établissement de la dynastie hafside. Quelques désordres y éclatèrent plus tard, quand l'émir Abou-Zékérïa, fils du sultan Abou-Ishac [[er] s'étant emparé [de Bougie et] des provinces occidentales de l'empire, détourna ainsi [de cette île] l'attention du souverain de Tunis.

Voy. t. 1. p. 221, note.

2 Compagnon de Mahomet et traditioniste. Son nom est cité par ElKelaï dans son histoire de la conquête de l'Égypte par les Musulmans.

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