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de Tîteri, il s'était empressé de quitter cette localité pour se réfugier dans Bougie.

Vers la fin de l'an 789 (déc.-janv. 1387-8), Abou-Hammou descendit à terre et se rendit au jardin royal, le Refiâ 1 (la superbe) où l'on avait disposé un logement pour sa réception. Lo sultan de Tunis apprit cet événement par un courrier extraordinaire et répondit au gouverneur de Bougie en le louant, d'a-bord, de la manière dont il avait agi et en lui recommandant de traiter son hôte avec les plus grands égards et de mettre à sa disposition les troupes de Bougie afin qu'il pût se rendre jusqu'à la frontière des états abd-el-ouadites.

Abou-Hammou se mit alors en marche; et, arrivé à Metîdja, il s'y arrêta pour rallier les bandes arabes qui, de toutes parts, accouraient à son secours; puis, il se dirigea vers Tlemcen. Ayant alors appris que les Beni-Abd-el-Ouad, gagnés par les libéralités d'Abou-Tachefin, ne voulaient plus le reconnaître, il laissa son fils Abou-Zian dans les montagnes du Chelif pour y soutenir sa cause et il passa lui-même dans le Désert afin de se rendre à Mama, sur la frontière du Maghreb.

Un corps de troupes. qu'Abou-Tachefin avait placé sous les ordres de son fils Abou-Zian et du vizir Mohammed-Ibn-AbdAllah-Ibn-Moslem, marcha aussitôt contre Abou-Zian, fils d'Abou-Hammou. Un combat s'ensuivit qui amena la défaite des troupes sorties de Tlemcen, après avoir coûté la vie à l'émir Abou-Zian, fils d'Abou-Tachefîn, au vizir Ibn-Moslem et à un grand nombre d'Abd-el-Ouadites.

Abou-Tachefin, ayant appris que son père était arrivé à Mama, sortit pour l'attaquer et le força à reculer jusqu'au Za. Les Ahlaf, arabes makiliens, vinrent au secours d'AbouHammou et l'aidèrent à rentrer dans cette place. Abou-Tachefîn se mit alors en observation vis-à-vis de l'armée de son père, et il s'y tenait encore quand il apprit la mort de son fils et la déroute des Beni - Abd - el - Ouad. Voulant rentrer à Tlemcen,

1 Voy. t. 1, p. 392.

il dût opérer sa retraite avec une précipitation extrême, afin d'échapper à ses adversaires. Alors, d'après ses instructions, l'effranchi Séâda se mit en campagne avec une partie de l'armée afin d'offrir la bataille aux Arabes et les entraîner ainsi dans une poursuite qui les aurait éloignés d'Abou-Hammou. Autant sa confiance fut grande dans le bonheur de Séâda, autant son désappointement fut amer quand il apprit qu'Abou-Hammou avait réussi à surprendre ce détachement, le mettre en déroute et faire prisonnier celui qui le commandait. Abandonné enfin par les Beni-Abd el-Ouad et par ses alliés arabes, il s'empressa de quitter Tlemcen pour accompagner les Soueid jusqu'au Désert où il prenaient leurs quartiers d'hiver.

Dans le mois de Redjeb 790 (juillet-août 1388), Abou-Hammou rentra dans sa capitale et appela ses autres fils auprès de lui. El-Montecer y mourut de maladie, quelques jours après son arrivée.

ABOU-TA CHEFIN ARRIVE A LA TÊTE D'UNE ARMÉE MERINIde.

MORT DU SULTAN ABOU-HAMMOU.

Abou-Tachefin quitta donc Tlemcen à l'approche de son père et se réfugia au milieu des tribus soueidiennes ; puis, sur l'avis.unanime de ses protecteurs, il partit avec leur cheikh, MohammedIbn-Arîf, afin de solliciter l'appui d'Abou-'l-Abbas, sultan des Beni-Merîn. Ils obtinrent de ce prince l'assurance d'être secourus contre leur ennemi commun, et Abou-Tachefin se fixa dans Fez en attendant l'accomplissement de ses souhaits.

1

A cette époque, Ibn-el-Ahmer, seigneur de l'Espagne musulmane, s'était attaché au sultan Abou-Hammou par les liens d'une étroite amitié et il s'était aussi acquis le droit de dicter ses volontés au sultan Abou-l-Abbas, seigneur du Maghreb, par le service qu'il venait de lui rendre, en l'aidant à reconquérir le trône. Sur la prière d'Abou-Hammou, le monarque espagnol exigea d'Abou-'l-Abbas la déportation d'Abou-Tachefin en Espagne; et, voyant que le sultan mérinide hésitait à obéir pour

ne pas trahir les droits de l'hospitalité et qu'il essayait de transiger en s'abstenant de fournir des secours à son hôte, il répéta sa demande de la manière la plus pressante. Abou-'l-Abbas y répondit en alléguant les divers motifs qui l'empêchaient d'y consentir, sans avouer, toutefois, que, dans cette affaire, il agissait d'après les inspirations de son vizir, Mohammed-Ibn-Youçof-Ibn-Allal. Ce ministre était favorablement disposé pour Abou-Tachefin; et, en le voyant arriver à Fez, il n'avait pas hésité de traiter avec lui et de lui promettre l'appui de l'empire mérinide. Par cette raison, il employa toute son influence pour fixer les incertitudes de son maître; et, par d'adroites insinuations, il le décida à repousser la demande d'Ibn-el-Ahmer et à soutenir ouvertement le prince abd-el-ouadite.

Vers la fin de l'an 794 (sept.(?) 1319), le sultan Abou-'l-Abbas plaça son fils Abou-Fares et son vizir Ibn-Allal, à la tête d'une armée et leur ordonna d'aller combattre Abou-Hammou. Quand cette colonne fut arrivée à Tèza, le sultan abd-el-ouadite apprit le danger qui le menaçait et sortit de sa capitale afin de rallier les partisans qu'il conservait encore parmi les Beni-Amer et les Kharadj Ibn-Obeid-Allah. Traversant ensuite le Beni-Ournîd, montagne qui domine Tlemcen, i alla prendre position à ElGhairan et permit à Abou-Tachefin d'occuper Tlemcen. Alors, ce démon de perversité, l'infâme Mouça-Ibn-Yakhlof se chargea d'y maintenir l'autorité de ce fils dénaturé.

Omaïr, fils d'Abou-Hammou, reçut aussitôt de son père l'ordre de marcher contre le traître ; et, dans la nuit du même jour, il pénétra dans la ville, se fit livrer Ibn-Yakhlof et l'amena à ElGhairan. Après avoir accablé de reproches le scélérat qui l'avait si souvent trompé, le sultan Abou-Hammou lui fit subir les douleurs de la torture et l'envoya ensuite à une mort des plus affreuses.

de

Abou-Fares, instruit par ses espions qu'Abou-Hammou et les Arabes nomades se tenaient à El-Ghairan, envoya un corps troupes contre eux. Le vizir Ibn-Allal, qui eut la conduite de cette expédition, prit le chemin du Désert en se faisant guider par Soleiman-Ibn-Nadji de la tribu des Ahlaf; et, parvenu à El

Ghairan, il tomba à l'improviste sur les bandes du sultan. Les Kharadj, accablés par le nombre de leurs adversaires, prirent la fuite, et Abou-Hammou, dont le cheval s'était abattu sous lui, fut reconnu et tué à coups de lance par un cavalier maghrebin. La tête de ce malheureux prince fut présentée à Ibn-Allal et, ensuite à Abou-Tachefin. Omaïr, fils d'Abou-Hammou, leur fut amené prisonnier. Abou-Tachefin voulut le tuer à l'instant même, et bien que ses compagnons l'en empêchassent pendant quelques jours, il finit par se le faire livrer et l'envoya à la

mort.

Ce fut vers la fin de l'an 794 (novembre 1389) qu'Abou-Tachefîn fit son entrée à Tlemcen. Le vizir resta campé en dehors de la ville et ne partit pour le Maghreb qu'après avoir reçu une forte somme d'argent que ce prince s'était engagé à payer au gouvernement mérinide. Abou-Tachefin fit alors proclamer dans Tlemcen la souveraineté d'Abou-l-Abbas, seigneur du Maghreb, et célébrer la prière publique au nom de ce monarque. Dès lors, il lui envoya régulièrement, tous les ans, le montant d'un tribut qu'il s'était engagé à lui fournir.

ABOU-ZIAN, FILS D'ABOU-HAMMOU, FAIT UNE TENTATIVE SUR TLEMCEN ET SE RETIRE AUPRÈS DU SULTAN MERINIDE.

Abou-Zian avait obtenu de son père le gouvernement d'Alger après l'occupation de Tlemcer. et la fuite d'Abou-Tachefîn. Ayant alors appris qu'Abou-Hammou venait d'être tué à El-Ghairan, il sortit d'Alger et se mit sous la protection des Hosein. Animé par l'espoir de ramener la fortune et de venger la mort de son père et celle de son frère Omaïr, il rechercha l'appui de ce peuple nomade et obtint la promesse d'en être soutenu.

Bientôt après, les émirs des Beni-Amer-Ibn-Zoghba vinrent l'inviter à faire un effort pour conquérir le royaume de ses aïeux. Il se rendit donc au milieu des Beni-Amer, et, après avoir reçu les hommages de leur cheikh, El-Masoud-Ibn-Sogheir, qui le proclama sultan, il marcha avec eux contre Tlemcen au mois de

Redjeb 792 (mai-juin 1390). Pendant quelques jours, il tint la ville étroitement bloquée; mais, dans le mois de Châban (juinjuillet), il se vit abandonner par les Arabes, auxquels Abou-Tachefin avait envoyé de l'argent pour les décider à la retraite Il passa alors dans le Désert, afin d'échapper à son frère ; et, dans le mois de Choual (août-sept.), il reprit le siége de Tlemcen avec le secours des nomades makiliens, peuple qu'il avait décidé à embrasser sa cause. Le fils d'Abou-Tachefin approchait alors à la tête des secours que son père l'avait envoyé demander au gouvernement du Maghreb. Quand cette armée fut arrivée à Taourirt, Abou-Zîan se hâta de gagner le Désert d'où il passa dans le Maghreb, afin d'implorer l'appui [d'Abou-'l- Abbas]. Accueilli avec bienveillance par ce monarque qui promit de le soutenir, il resta auprès de lui jusqu'à la mort d'Abou-Tachefîn.

MORT D'ABOU-TACHEFIN ET OCCUPATION DE TLEMCEN PAR LE SULTAN

DU MAGHREB.

Pendant que l'émir Abou-Tachefîn gouvernait Tlemcen au nom d'Abou-'l-Abbas', seigneur du Maghreb, et payait régulièrement le tribut qu'il s'était engagé à lui envoyer, son frère, l'émir Abou-Zian, resta auprès de ce monarque en attendant les secours qu'on lui avait promis. Enfin, le sultan mérinide se brouilla avec Abou-Tachefîn par suite d'une de ces affaires qui jettent la mésintelligence entre souverains, et profita de cette occasion pour combler les souhaits d'Abou-Zîan.

Vers le milieu de l'an 795 (mai 1393), il mit une armée à la disposition de son protégé et l'envoya faire la conquête de Tlemcen. Arrivé à Tèza avec cette colonne, Abou-Zîan apprit que, dans le mois de Ramadan (juillet-août), son frère avait succombé à une maladie chronique et qu'Ahmed-Ibn-el-Ezz, vieux serviteur de la famille abd-el-ouadite et oncle maternel d'Abou-Tachefîn, était devenu régent du royaume, après avoir placé sur

1 Dans le texte arabe, on a imprimé, par erreur, Abou-Salem.

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