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peaux du sultan abd-cl-ouadite, et Amran, qui avait pris la fuite dans l'espoir de pouvoir rentrer dans cette ville, fut bientôt atteint et mis à mort. A l'approche du sultan Abou-Saîd, la populace de Tlemcen se souleva contre Othman-Ibn - Djerrar et le mit dans la nécessité d'implorer la clémence du vainqueur. Abou-Said consentit à lui pardonner et, vers la fin du mois de Djomada second 749 (fin de septembre 1348), il entra au palais et monta sur le trône pour promulguer ses ordonnances, nommer ses vizirs et organiser un secrétariat. Satisfait alors d'avoir obtenu le titre de roi, il s'abandonna au repos et laissa à son frère Abou-Thabet-Ez-Zaïm le commandement des Beni-Abd-elOuad, la direction des affaires militaires, tout enfin, excepté l'administration intérieure du palais. A peine fut-il installé dans sa capitale qu'il fit mettre Othman-Ibn-Djerrar au cachot, où ce malheureux périt de mort violente, dit-on, dans le mois de Ramadan de la même année (nov.-déc. 1348).

Une des premières expéditions qui se firent par l'ordre du nouveau sultan fut dirigée contre les Koumïa et eut pour motif la révolte de leur chef, Ibrahîm-Ibn-Abd-el-Mélek, cheikh et membre de la famille des Beni-Abed, la même tribu koumienne qui avait produit Abd-el-Moumen[, le sultan almohade]'. Les troubles dont Tlemcen venait d'être le théâtre ayant paru de nature à ne pas se calmer pour longtemps, cet homme pensa qu'il pouvait se rendre indépendant et, se voyant appuyé par une foule de partisans, il alluma le feu de la guerre dans le pays des Koumïa et dans toute cette partie du littoral. Le sultan AbouThabet marcha contre les insurgés, en tua plusieurs, fit un grand nombre de prisonniers et emporta d'assaut la ville de Honein et ensuite celle de Nedroma. Ibrahim-Ibn-Abd-el-Mélek fut chargé de fers, conduit à Tlemcen et enfermé dans une prison où il subit la peine de mort quelques mois plus tard.

Les autres villes et forteresses du Maghreb central restaient

1 Voy. t. 1, p. 251.

2 Dans le texte arabe, supprimez un point et lisez amçar.

encore sous l'autorité d'Abou-'l-Hacen et conservaient les garnisons et gouverneurs que ce monarque y avait installés. Oran, qui, de toutes ces villes, était la plus rapprochée de Tlemcen, avait pour commandant Obbou-Ibn-Saîd-Ibn-Adjana, client des Beni-Merîn. Cet officier y avait établi un ordre parfait, formé de grands approvisionnements d'armes et de vivres, rassemblé beaucoup de troupes et garni le port d'une flotte considérable. Les Beni-Abd-el-Ouad n'eurent rien de plus pressé que de marcher contre cette ville, et leur sultan, Aboa-Thabet, y conduisit une foule de tribus zenatiennes et arabes, afin d'en faire le siége. Après quelques jours de blocus, ces troupes eurent à repousser une sortie de la garnison, mais, au moment où le combat s'engagea, leurs alliés, les Beni-Rached, qui étaient mal disposés pour le gouvernement de Tlemcen et qui avaient fait une convention secrète avec Obbou-Ibn-Saîd, lâchèrent pied et entraînèrent dans leur fuite le reste de l'armée. Cette journée coûta la vie à Mohammed-Ibn-Youçof, petit-fils d'Einan-Ibn-Fares-IbnZian et chef des collatéraux de la famille royale. Son aïeul Fares était frère de Yaghmoracen. Abou-Thabet dut abandonner son camp à l'ennemi et se réfugier dans Tlemcen.

ABOU-THABET LIVRE BATAILLE A EN-NACER, FILS DU SULTAN ABOU'L-HACEN, ET S'EMPARA D'Oran.

Après le désastre de Cairouan, le sultan Abou-'l-Hacen se rendit à Tunis et, pendant quelque temps, il s'y vit assiégé par les Arabes qui voulaient s'emparer de la ville pour y établir, tantôt l'un, tantôt l'autre des princes hafsides dont ils avaient proclamé successivement la souveraineté. Il y attendait même des renforts qui devaient lui arriver du Maghreb - el - Acsa quand il apprit, tout-à-coup, la désorganisation de son empire et la révolte de son fils [Abou-Einan] et de son petit-fils [Mansour]. Bientôt après, on lui annonça qu'Abou-Einan s'était rendu maître de tout le Maghreb et que les Abd-el-Ouad, les Maghraoua et les Toudjîn venaient de partir pour le Maghreb central.

DYNASTIE ABD-EL-OUADITE.

Les choses en étaient à ce point, quand il reçut la visite de Yacoub-Ibn-Ali, émir des Douaouida. Ce chef s'aboucha aussitôt avec Arîf-Ibn-Yahya, émir des Soueid et ami intime du sultan, afin de lui démontrer combien il serait essentiel d'obtenir du sultan le renvoi de son fils, le prince En-Nacer, dans le Maghreb central, pays dont les villes d'Alger et d'Oran, ainsi que le Ouancherich, continuaient à reconnaître l'autorité mérinide. Dans cette dernière localité, la cause du sultan avait pour soutien Nasr-Ibn-Omar-Ibn-Othman-Ibn-Atïa. A ce projet, Arîf1 fit une légère addition: comme il désirait beaucoup s'éloigner de Tunis, il donna à entendre qu'un homme tel que lui, pour lequel le sultan avait tant de considération et dont la tribu s'était toujours montrée si dévouée aux Mérinides, serait la meilleure personne que l'on pourrait adjoindre au prince dans cette mission importante. Le sultan les ayant autorisés à partir, En-Nacer se rendit dans le pays des Hosein pour rallier cette tribu, et il marcha ensuite vers Mindas, après avoir obtenu le concours des Attaf, des Dialem et des Soueid.

L'émir Abou-Thabet était occupé à organiser une seconde expédition contre Oran, quand il apprit qu'En-Nacer approchait à il la tête d'une armée nombreuse, et, sans perdre un instant, expédia un courrier à Abou-Einan pour lui faire part de cette nouvelle inquiétante. Peu de temps après, il vit arriver à Tlemcen un corps de troupes mérinides que cet émir avait envoyé à Abouson secours. Dans cette colonne, il trouva son neveu, Zian [fils du sultan Abou-Saîd] qui s'était réfugié dans le Maghreb, lors du départ des Abd-el-Ouad pour Cairouan, et qui, ayant été rappelé par son père, lui amenait maintenant des troupes et de l'argent.

Au commencement du mois de Moharrem 750 (fin de mars 1349), Abou-Thabet quitta Tlemcen à la tête de son armée et, après avoir en vain demandé aux Maghraoua un contingent de

1 Lisez, dans le texte arabe, Arif-Ibn-Yahya, à la place d'ArifIbn-Nasr.

troupes, il entra dans le pays des Attaf. Arrivé sur le bord de l'Oureg, vers la fin de Rebiâ premier (milieu de juin), il rencontra les Arabes commandés par En-Nacer et les mit en pleine déroute. Le prince mérinide courut se réfugier dans le Zab et il resta chez Ibn-Mozni, à Biskera, jusqu'à ce qu'il pût obtenir de ce chef un détachement d'Arabes soleimides pour le ramener à Tunis, auprès de son père, le sultan.

Arîf-Ibn-Yahya passa dans le Maghreb-el-Acsa et parvint à prendre, dans la société intime d'Abou-Einan, la même place qu'il avait occupée auprès du père de ce prince. Ce fut ainsi qu'il vit accomplir ses souhaits.

Abou-Thabet rallia à son service tous les Arabes qu'il avait vaincus et, soupçonnant la fidélité de Sogheir-Ibn-Amer-IbnIbrahim, chef des Zoghba,] il le fit jeter sur un cheval de poste et conduire prisonnier à Tlemcen. Plus tard, cependant, il lui rendit la liberté. Rentré lui-même à Tlemcen, il y resta quelques jours, puis, dans le mois de Djomada [premier] 750 (juillet-août 1349), il partit pour Oran et emporta cette ville après un court siége. Ali-Ibn-Adjana, qui en était devenu gouverneur par la mort de son frère Obbou, eut la vie sauve et la permission de s'en aller, lui et les siens, où bon leur sembla. Après avoir soumis les environs d'Oran, Abou-Thabet reprit le chemin de la capitale.

La nonchalance des Maghraoua et leur refus de fournir un contingent à l'armée abd-el-ouadite avait laissé dans le cœur d'Abou-Thabet un profond ressentiment; aussi, dans le mois de Choual de la même année (déc.-janv. 1349-50), il marcha contre eux et les attaqua sur le bord du Rîou. Ses adversaires abandonnèrent leur camp après une faible résistance et coururent se réfugier dans leurs montagnes d'où ils le firent prier de transmettre à son frère, le sultan Abou-Said, l'assurance de leur complète soumission.

Ce fut à la suite de ces événements qu'eut lieu le retour du sultan Abou-'l-Hacen.

LE SULTAN ABOU-'L-HACEN DÉBARQUE A ALGER,—IL LIVRE BATAILLE A ABOU - THABET, ESSUIE UNE DÉFAITE ET SE RÉFUGIE DANS LE

MAGHREB.

Après le désastre de Cairouan, le sultan Abou-'l-Hacen rentra à Tunis où il eut à soutenir un long siège contre les Arabes ; puis, à l'époque où les gens du Djerîd se révoltèrent, en proclamant la souveraineté d'El-Fadl, fils d'Abou - Yahya - AbouBekr, il céda aux instances des habitants du Maghreb-el-Acsa et consentit à partir pour ce pays. Au commencement du mois de Choual de l'an 750 (milieu de déc. 4349), il s'embarqua au port de Tunis et mit à la voile; mais le navire qu'il monta fut assailli par une tempête et fit naufrage auprès de Bougie1. Un autre navire de la flotte tira le sultan, à moitié mort, de l'ilot où il s'était réfugié et alla le débarquer au port d'Alger. Hammou-Ibn-YahyaIbn-el-Acheri, officier mérinide qui commandait dans cette ville et qui devait sa fortune au père du sultan, accueillit son maître avec empressement; les Thâleba et les Melîkich, peuples de la plaine [de Metîdja] se hâtèrent de lui offrir leurs hommages, et, après avoir reçu des gratifications en argent, ils entrèrent à son service.

Ouenzemmar-Ibn-Arîf apprit cette nouvelle chez les Soueid et partit sur-le-champ, avec les chefs de ces nomades, pour présenter ses respects au sultan. Il emmena aussi avec lui Nasr-IbnOmar-Ibn-Othman, chef des Beni-Tîgherîn et seigneur du Ouancherich, ainsi qu'Adi-Ibn-Youçof, petit-fils de Zian-Ibn-Mohammed-Ibn-Abd-el-Caouï, le même qui venait de soulever les environs de Médéa 3. Ces chefs se mirent aux ordres du sultan et le pressèrent à partir avec eux; puis, sur ses observations, ils s'en allèrent dans leurs pays respectifs afin de lever des troupes chez les tribus arabes et zena tiennes.

1 Voy., ci-devant, pp. 31, 38.

2 Dans le texte arabe, il faut mettre un point sur le dal de bi-damaïhi. 3 Voy, t. IV, histoire des Toudjîn.

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