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Quand Idris premier, fils d'Abd-Allah-Ibn-el-Hacen, se réfugia dans le Maghreb-el-Acsa, il soumit ce pays à son autorité et marcha, l'an 174 (790-4), contre le Maghreb central. Mohammed-Ibn-Khazer-Ibn-Soulat, émir des Zenata et de Tlemcen, vint lui rendre hommage et porta les Maghraoua et les Beni-Ifren à suivre son exemple. Idris obtint de ce chef la possession de Tlemcen et, après un séjour de quelques mois, pendant lequel il posa les fondations de la grande mosquée et en fit construire la chaire, il reprit le chemin du Maghreb-el-Acsa. Quand son frère, Soleiman-Ibn-Abd-Allah, arriva de l'Orient, il l'établit dans cette ville comme gouverneur. La mort d'Idrîs affaiblit extrêmement la puissance de cette famille; mais son fils, Idris II, rallia autour de lui les Berbères du Maghreb et partit, l'an 199 (844-5), pour Tlemcen. Ce fut lui qui en restaura la mosquée et embellit la chaire du prédicateur. Il y passa trois ans et, s'étant assuré l'obéissance des Zenata, dont il avait soumis le pays, il leur donna pour chefs les fils de son cousin, Mohammed-Ibn-Soleiman. Après sa mort, les conseils de sa veuve Kenza amenèrent le partage du royaume des deux Maghrebs entre les membres de sa famille. Tlemcen passa alors sous l'autorité d'Eïça, fils de Mohammed-Ibn-Soleiman, et les provinces qui en dépendent échurent aux autres fils de ce Mohammed.

gissait d'inventer la dérivation d'un nom propre appartenant à une langue étrangère. Nous devons faire observer que le mot telem ou telemm (elle reunit) est arabe, mais elle est employée en langue berbère; peut-être même y existait-il à l'époque de la domination romaine: on remarque la syllabe lam dans plusieurs noms d'anciennes villes africaines, telles que Lambesis, Lamasba, Lamfoctense oppidum, Lambiridi, etc.,, et l'on est presque tenté de croire qu'il y a quelque,parenté entre ce mot et l'une ou l'autre des racines hébraïques (ligavit, religavit) et D

(congregavit).

Voy. t. I, p. 560, où l'expédition contre Tlemcen est placée en l'an 173.

Dans le texte arabe, il faut supprimer les mots Ibn-Idris, malgré les manuscrits.

Lors de la chute des Idrîcides, quand les Fatemides eurent subjugué le Maghreb, leur allié, Mouça-Ibn-Abi-'l-Afïa, marcha sur Tlemcen, l'an 319 (931), et détrôna l'Idricide qui y commandait. Ce prince, qui se nommait El-Hacen et qui était fils d'Abou-'l-Aïch-Ibn-Eïça-Ibn-Idris-Ibn-Mohammed-Ibn-Soleiman, s'enfuit à Melila et construisit, près de Nokour, un château pour lui servir de lieu de refuge. Mouça-Ibn-Abi-'l-Afïa l'y assiégea pendant quelque temps et ne consentit à faire la paix qu'après avoir obtenu la remise de la forteresse. Quand les Fatemides eurent effectué la conquête du Maghreb central et chassé de la province de Tlemcen tous les descendants de Mohammed-IbnSoleiman, les proscrits embrassèrent la cause des Oméïades et passèrent en Espagne.

Yala-Ibn-Mohammed l'ifrenide s'étant ensuite rendu maître du pays des Zenata et du Maghreb central, obtint, entre les années 340 et 350a, un diplôme par lequel En-Nacer l'oméïade le constituait gouverneur de ces régions et de Tlemcen. Après sa mort, le commandement des Zenata fut exercé par Mohammed-Ibn-el-Kheir-Ibn-Mohammed-Ibn-Khazer, partisan d'ElHakem-el-Mostancer. Ce chef occupa Tlemcen entre les années 60 et 70 du quatrième siècle, et perdit la vie en combattant les Sanhadja. Ce peuple conquit alors le Maghreb central et, profitant des divisions qui déchiraient l'empire zenatien, il repoussa ses adversaires dans le Maghreb-el-Acsa et incorpora dans ses états la ville de Tlemcen.

Zîri-Ibn-Atïa, émir des Zenata et gouverneur du Maghreb, ayant été chassé de cette province par El-Mansour-Ibn-AbiAmer, envahit les pays occupés par les Sanhadja et s'empara1 de Tlemcen, d'Oran, de Ténès, d'Achîr, d'El-Mecîla et de plusieurs autres forteresses. Plus tard, c'est-à-dire en l'an 396

1 Voy. t. 1, p. 270.

2 En 343 ou 344 (955-6).

3 Dans les manuscrits et le texte arabe imprimé, il faut lire nezel à la place de nazel. Voy., ci-devant, p. 247.

(1005-6), El-Modaffer[, fils d'El-Mansour,] confia le gouvernement du Maghreh à El-Moëzz, fils de Zîri Ibn-Atïa, et donna le commandement de Tlemcen à Yala, un autre fils du même

chef.

Les enfants de Yala régnèrent dans cette ville jusqu'à ce que leur empire fut détruit par les Almoravides. Youçof-Ibn-Tachefin y installa Mohammed-Ibn-Tinamer le messoufien, lequel fut remplacé par son frère Tachefin. Lors de la guerre qui éclata entre Tachefin-Ibn-Tinamer et El-Mansour-Ibn-en-Nacer, seigneur de la Calâ-Beni-Hammad, celui-ci marcha sur Tlemcen et serra la place de si près qu'il était sur le point de s'en emparer. Nous avons déjà parlé de tous ces événements à leur lieu et place.

Après avoir vaincu les Almoravides et tué Tachefin-Ibn-Ali à Oran, Abd-el-Moumen ruina cette ville de fond en comble et fit. subir le même sort à Tlemcen, dont il laissa massacrer les habitants. Ceci eut lieu dans la quarantième année du sixième siècle (1445).

Quelque temps après, il changea d'avis au sujet de Tlemcen et, ayant invité les populations de s'y fixer, il en fit réparer les murailles. Soleiman-Ibn-Ouanoudin, cheikh hintatien qui en fut nommé gouverneur, apprécia tellement la fidélité des Beni-Abd-el-Ouad qu'il négocia une alliance fraternelle entre cette tribu et les Almohades.

Abd-el-Moumen accorda ensuite le gouvernement de Tlemcen à son fils, le cîd Abou-Hafs, 'et, dès ce moment, les chefs de la dynastie almohade continuèrent à choisir parmi les membres de la famille royale le commandant d'une ville et d'une province dont ils apprécièrent l'extrême importance. L'autorité de ces fonctionnaires s'étendait sur le Maghreb entier et sur les tribus zenatiennes des Beni-Abd-el-Ouad, des Beni-Toujia et des Rached, lesquelles possédaient alors toutes les campagnes de Tlemcen et du Maghreb central. Elles vivaient en nomades, jouissant des concessions que le gouvernement almohade leur avait accordées. La plupart des terres, les impôts des villes et des peuplades les plus riches furent ainsi mis à leur disposition.

T.III.

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Chaque fois qu'elles allaient prendre leurs quartiers d'hiver' dans le Désert, elles laissaient leurs serviteurs dans le Tell pour ensemencer la terre, faire la récolte et percevoir l'impôt (kharadj) que leurs sujets devaient fournir. Le territoire que possédèrent les Abd-el-Ouad s'étendait depuis El-Bat'ha jusqu'au Molouïa et depuis la mer, à travers le rif, jusqu'à l'intériear du

Désert.

Les princes almohades qui commandaient dans Tlemcen ne cessèrent d'entretenir et d'améliorer les fortifications de cette ville; ils y attirèrent beaucoup de monde afin d'en augmenter la population; ils travaillèrent à l'envi pour en faire une métropole; ils y firent construire des châteaux, de grandes maisons et des palais pour l'embellissement desquels ils n'épargnèrent aucune dépense. Celui qui déploya le plus de zèle dans ces travaux fut le cîd Abou-Amran-Mouça, fils de Youçof-elAcheri, émir des croyants, fils d'Abd-el-Moumen. Il en avait été nommé gouverneur par son père, l'an 556 (1464). Pendant sa longue administration, il s'occupa de l'agrandissement de la ville, et, y ayant ajouté de nombreux édifices, il entoura le tout d'une ceinture de inurs.

Son successeur, le cîd Abou-'l-Hacen, fils du cid Abou-Hafs et petit-fils d'Abd-el-Moumen, s'empressa de l'imiter. Nous avons raconté3 comment les fils de Ghanîa, partis de Maïorque l'an 581 (1485), surprirent la ville de Bougie et s'emparèrent ensuite d'Alger et de Miltana. Le cîd Abou-Hafs fut promptement instruit de ces événements et se hâta d'améliorer les fortifications de Tlemcen, d'en réparer les murailles et d'approfondir les fossés qui entouraient les remparts. De cette manière, il en fit la forteresse la plus redoutable du Maghreb. Les gouverneurs qui vinrent après lui adoptèrent ses vues et suivirent

1 Quelques exemplaires du texte arabe portent mechaikhihim; il faut lire mechatihim.

2 Voy. t. 11, p. 88, note 3.

3 Voy. t. 1, p. 89.

l'exemple qu'il avait donné. Il est digne de remarque que le cîd Abou-Zeid, chargé de combattre Ibn-Ghanîa, contribua autant que son frère, le cîd Abou-Hafs, à la défense du pays et à la conservation de l'empire.

Quand ces loups arabes, les Hilaliens de l'Ifrîkïa, embrassèrent le parti d'Ibn-Ghanîa, les Zoghba, une de leurs tribus, se rangèrent du côté des Almohades et, après avoir opéré leur jonction avec les Zenata du Maghreb central, ils prirent le prince gouverneur de Tlemcen pour arbitre de tous leurs différends et le reconnurent pour leur seigneur et protecteur. Ibn-Ghania, à la tête de ses brigands, fit alors plusieurs irruptions dans le territoire de Tlemcen, ravagea le pays des Zenata, ruina Téhert et quelques autres villes de cette province.

Tlemcen, capitale du Maghreb central et métropole protectrice des tribus zenatiennes qu'elle est toujours prête d'abriter dans son sein, dut sa prééminence à la ruine de deux villes dont chacune avait été le siége d'un empire : nous voulons parler d'Archgoul, place située sur le bord de la mer, et de Téhert, forteresse qui s'élevait au Midi d'El-Bat'ha, entre le Rif et le Désert. La destruction de ces deux cités eut lieu pendant les guerres d'IbnGhanîa, à l'époque où toutes les villes du Maghreb central furent ruinées par les tribus zenatiennes qui s'occupaient, sans relâche, à en opprimer les habitants, à piller leurs biens, à enlever les voyageurs, à détruire tous les ouvrages de la civilisation et à emporter les forteresses où l'on entretenait des garnisons almohades. Ce fut ainsi que succombèrent Casr-Adjîça, Zerca, Chelif, El-Khadra, Metidja', Hamza, Mersa-'d-Deddjadj, El-Djâbat et ElCalâ. Depuis lors, ces villes sont restées inhabitées : on n'y trouve plus un seul foyer allumé; on n'y entend plus le chant du coq. Tlemcen, au contraire, a toujours vu sa prospérité augmenter, ses quartiers s'étendre, ses maisons, solidement construites en

↑ Le géographe Abou-Obeid-el-Bekri écrit ce nom Mittidja. Il ne le regardait donc pas comme un dérivé du mot tadj (couronne), ainsi que l'on fait quelques orientalistes.

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