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de Tigourat în, de Ouargla et de Righ1. Le monde est le père des merveilles et Dieu est le créateur qui sait tout !

Ayant maintenant achevé les chapitres qui traitent des Zenata de la première race, nous allons parler de la seconde race zenatienne, peuple dont l'empire se maintient encore aujourd'hui.

NOTICE DES ZENATA DE LA

SECONDE RACE.

EXPOSITION DE LA

GÉNÉALOGIE ET DES RAMIFICATIONS DE CETTE GRANDE FAMILLE.

Dans le cours de notre notice des Zenata de la première race, nous avons mentionné qu'avant la ruine définitive de leur puissance, ils avaient été décimés par les Sanhadja et les Almoravides, et que l'esprit de corps qui animait toutes ces tribus disparut avec la domination qu'elles avaient exercée. Les seules branches de la souche zenatienne qui survécurent à cette catastrophe furent certaines peuplades qui n'avaient jamais étendu leur autorité sur d'autres peuples, qui ne s'étaient pas épuisées dans les jouissances du luxe et qui n'avaient pas cessé de vivre sous la tente, en parcourant, avec leurs troupeaux, la région qui sépare le Désert d'avec le Tell des deux Maghrebs. Elles reconnaissaient l'autorité des gouvernements [établis dans le Tell], mais,

1 En 1850-51, M. Berbrugger, conservateur de la bibliothèque et du musée d'Alger, visita la région qui s'étend depuis la frontière tunisienne jusqu'à Ouargla et au pays des Mozab inclusivement. Ayant prolongé son séjour dans le Ouad Rîgh, il eut l'occasion d'examiner un grand nombre de puits artésiens et d'en voir creuser de nouveaux. Dans le mémoire très-intéressaut qu'il a publié à ce sujet dans le journal algérien l'Akhbar (mémoire dont il existe quelques exemplaires tirés à part), il fait observer que, de nos jours, on n'emploie pas le procédé mentionné par Ibn-Khaldoun quand il s'agit de briser la mince couche (50 centimètres) de rocher qui recouvre la nappe souterraine ; maintenant, le travailleur, installé au fond du puits, perce la couche au péril de sa vie. Dans le Righ et le canton de Ouargla, le forage des puits artésiens se pratique encore, mais quelques-unes de ces sources artificielles sont de la plus haute antiquité.

après avoir obéi aux Zenata de la première race, elles finirent par les soumettre à leur tour. Ces succès augmentèrent leur puissance à un tel degré que les gouvernements du Tell cultivèrent leur amitié et recherchèrent leur appui. Après la chute de la dynastie almohade, ces nomades aspiraient à posséder un royaume et, s'étant fait admettre au partage du pouvoir souverain, ils fondèrent les empires dont nous allons retracer l'histoire.

Les tribus formant la seconde race zenatienne sortent presque toutes de la souche de Ouacîn-Ibn-Isliten et ont pour sœurs les tribus des Maghraoua et des Ifren. Je dois cependant rappeler ici que quelques personnes les regardent comme descendues de Ouanten - Ibn-Ourchîk - Ibn - Djana, et les font ainsi sœurs de Messart [Mesrata] et de Tadjora, famille dont nous avons déjà indiqué la généalogie 1.

Une fraction des Beni-Ouacîn habita la province de Castilia et, selon Ibn-er-Rekîk, elle mit le siége devant Touzer, l'an 333 (944-5), en conséquence d'un ordre écrit que leur adressa AbouYezîd le nekkarien, à l'époque où cet aventurier fit son apparition dans l'Auras. Je crois qu'il en existe de nos jours une autre fraction dans la ville d'El-Hamma2, fraction qui porte le nom de Beni-Ourtadjen, l'une des principales familles ouaciniennes; mais la grande majorité de ce peuple a toujours habité dans cette partie du Maghreb-el-Acsa qui est située entre le Molouïa et la montagne des Beni-Rached. Mouça-Ibn-Abi-'l-Afïa indique ce fait dans une dépêche qu'il adressa à En-Nacer l'oméïade pour l'informer de la guerre qu'il avait à soutenir contre Meiçour, affranchi d'Abou-'l-Cacem le fatemide, et contre les tribus berbères et zenatiennes qui s'étaient rangées sous les drapeaux de ce général. En faisant l'énumération de ces peuples, il parle de ceux qui habitaient les environs du Molouïa et du Za : « Il y a de ce côté-là, dit-il, des Beni-Ouacîn, des Beni-Ifren,

Page 186 de ce volume.

Le Hamma de Cabes; voy., ci-apres, p. 303.

» des Beni-Ourtacen, des Beni-Ourimt et des Matmata. » N'oublions pas que les Beni-Ouacîn habitaient effectivement ces localités avant d'avoir fondé an empire.

Parmi les tribus de la seconde race zenatienne, on compte les diverses branches de la famille de Ouacîn. Tels sont les BeniMerîn, la tribu la plus nombreuse de toutes et la plus redoutable par sa puissance et par l'étendue de son empire. Tels sont aussi les Beni - Abd-el-Ouad, qui rivalisait presque avec les Mérinides en nombre et en puissance. Tels sont encore les BeniToudjin, tribu considérable qui peut prendre place immédiatement après les Ad-el-Ouad. Dans cette catégorie de peuples zenatiens, il n'y a que ces trois tribus qui aient fondé des empires. Entre les tribus ouacinides qui n'ont pas fait dynastie, on range les Beni-Rached, frères des Beni-Badin. Cette même catégorie renferme une tribu qui fonda un empire, mais qui ne sort pas de la souche de Ouacîn: nous voulons parler de [la tribu de Mendil] fraction des Maghraoua qui ne quitta jamais la vallée du Chelif, ancien territoire de ce peuple. Après la chute de l'empire que possédèrent leurs aïeux de la première race, les Maghraoua écoutèrent les inspirations de l'ambition, disputèrent le pouvoir aux peuples qui dominaient sur ce pays et finirent par établir leur propre empire dans la région où ils avaient toujours habité. Nous en parlerons plus tard.

Les tribus de cette catégorie qui n'ont pas fait dynastie sont assez nombreuses; nous les indiquerons ici, tout en exposant d'une manière détaillée les diverses ramifications de la famille dont elles font partie. Zahhik-Ibn-Ouacîn en est l'aïeul commun. Parmi ses descendants, on compte les Beni-Badîn-Ibn-Mohammed et les Beni-Merîn-Ibn-Ourtadjen. Ourtadjen était fils de Makhoukh, fils d Oudjedîdj, fils de Faten, fils ds Yedder, fils de Yakhfot, fils d'Abd-Allah, fils d'Ourtnîd, fils d'El-Magger, fils d'brahim, fils de Zahhik. Les Beni-Merîn se partagèrent en plusieurs branches dont nous parlerons plus loin, et ils se multiplièrent au point de surpasser en nombre toutes les autres tribus issues d'Ourtadjen; aussi a-t-on fini par compter ces tribus au nombre des familles mérinides.

Les Beni-Badin-Ibn-Mohammed descendent de Zahhik par une filiation dont je ne m'occuperai pas à présent. Parmi leurs nombreuses ramifications, on peut citer les Beni-Abd-el-Ouad, les Beni-Toudjin, les Beni-Mozab, et les Beni-Azerdal'; toutes provenant de la souche de Badin-Ibn-Mohammed. C'est dans ce Mohammed que se réunissent les généalogies des Beni-Badîn et des Beni-Rached. Il eut le même aïeul qu'Ourtadjen, savoir : Zahhîk-Ibn-Ouacîn.

Sous les Zenata de la première race on désignait toutes ces tribus par le nom de Beni-Ouacin; mais cela se faisait avant l'époque où elles étendirent leurs nombreuses ramifications sur l'Ifrikïa, sur le désert de Barca et sur le Zab. Parmi ces branches secondaires, on distingue quelques débris de l'ancienne race zenatienne, débris qui demeurèrent en place quand le reste de leur peuple se transporta en Maghreb. On les rencontre dans les bourgades de Ghadams, à dix journées au Sud de Sort.

Ghadams, lieu de station dans le Désert, fut construit dans les temps islamiques. Il renferme beaucoup de châteaux et de bourgades dont une partie appartient aux Beni-Ourtadjen, et une autre aux Beni-Ouattas, tribu mórinide qui prétend en être le fondateur. De nos jours, Ghadams est une ville très-grande et très-peuplée, formant une des étapes où s'arrètent les pèlerins venant du Soudan et d'où partent les négociants pour Alexandrie et le Caire, après s'être reposés des fatigues de leur voyage dans le Désert; elle est aussi comme une porte pour les marchands et pour les pèlerins qui veulent entrer dans le Désert et s'en retourner chez les Noirs. Elle doit sa prospérité à cette circonstance.

Dans le canton d'El-Hamma, à une journée Ouest de Cabes, on trouve une fraction considérable des Beni-Ourtadjen. Us entretiennent dans El-Hamma une forte garnison, ce qui ne manque pas de les faire respecter. Les négociants y apportent une grande

1 Variante: Zerdal, Zerdan.

2 Notre auteur aurait dû écrire : fut reconstruit, mais il ne se doutait pas que Ghadams remplaçait l'ancien Cydamus.

quantité de marchandises dont ils se défont avec avantage et contribuent ainsi à la prospérité de la ville. Jusqu'au temps actuel, El-Hamma a résisté avec succès aux tentatives de ceux qui ont voulu s'en emparer ou s'établir dans les pays voisins. Les habitants ne paient ni impôt, ni contribution; l'on dirait même qu'ils ne savent pas ce que ces mots veulent dire. Grâce à la position de leur ville et à leur courage, ils ont toujours maintenu leur indépendance. Selon eux, El-Hamma fut batie par leurs ancêtres, les Beni-Ourtadjen. Une de leurs familles, les Beni-Ouchah, exerce chez eux le commandement et, se rappelant la gloire de l'ancien khalifat qui dominait sur tant d'empires, elle a ambitionné des honneurs que l'on ne saurait accorder à des gens de rien. Dans les grandes solennités, ces chefs se montrent au public habillés en sultan et entourés des attributs de la souveraineté ; profanant ainsi les emblèmes de la dignité royale et oubliant l'état de soumission auquel ils s'étaient accoutumés autrefois. Leurs voisins, les chefs de Touzer et de Nefta, font de même, et l'on peut dire hardiment que cette vanité ridicule est portée à sa dernière limite par Yemloul, seigneur de Touzer.

Une portion de la tribu de Ouacîn se trouve aussi dans les cosour des Mozab, bourgades situées en deça des sables, à cinq journées au Midi de la montagne de Tîteri, et à trois journées Ouest des Beni-Righa. Mozab est le nom du peuple qui fonda ces bourgades. Quelques familles de la tribu des Beni-Badin s'y sont établies aussi comme nous venons de le dire. Les bourgades des Mozah occupent les sommets de plusieurs collines et rochers l'accès difficile, qui s'élèvent au milieu d'un pays brûlé par la chaleur. Vers le Sud, à la distance de quelques parasanges et au milieu de l'Areg, se trouve le territoire pierreux nommé ElHammada. Bien que la population de ce pays soit maintenant désignée par le nom de Mozab, on y reconnaît des familles abdel-ouadites, toudjînides, zerdalides, mozabites et autres descendants de Ouacîn, sans compter leurs dépendants zenatiens. Leurs édifices, leurs cultures et les dissensions qui éclatent parmi eux quand leurs chefs se disputent le pouvoir, tout cela rappelle l'état de choses qui existe chez les Righa et dans le Zab.

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