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d'El-Hamma fut exercée par Mouça-Ibn-Hacen, de la famille AbouMenia. La ville avait en même temps pour gouverneur un des généraux du sultan, nommé El-Medîouni. Cet officier, ayant découvert que les habitants complotaient un soulèvement, s'empressa d'en prévenir le sultan, qui était alors en expédition, et, en attendant la réponse, il attaqua les conjurés et les mit en fuite. Sept membres de la famille des Aulad-Youçof furent faits prisonniers et mis à mort. Dans la suite, les affaires reprirent leur ancien cours et Mouça-Ibn-Hacen rentra au commandement. Après sa mort, l'autorité passa à son frère, Abou-Allan, qui gouverna très-longtemps et se distingua par la sainteté de sa vie. Il mourut en l'an 742 (1341-2) et transmit l'autorité à son fils Omar, qui la laissa à son frère cadet Abou-Zian-Ibn-Abi-Allan. Leur cousin, Moulahem-Ibn-Mohammed', commanda ensuite et fit partie de la députation envoyée par les habitants du Djerîd au sultan Abou-'l-Hacen. Quand il mourut, Hassan-Ibn-Hedjrès, un de ses cousins, succéda au commandement, mais il se laissa déposer par Mohammed-Ibn-Ahmed-Ibn-Ouchah, chef des AuladDjehaf. Celui-ci fut tué par le peuple d'El-Hamma, qui se révolta contre lui en l'an 778 (1376-7). Le cadi, Omar-IbnKelli, perdit la vie en même temps. L'ancien chef, Hassan-IbnHedjrès, reçut encore le commandement, mais il fut renversé de nouveau et emprisonné par Youçof, fils d'Abd-el-Melek-IbnHaddjadj-Ibn-Youçof-Ibn Ouchah. Youçof est actuellement en possession du pouvoir; il obéit ostensiblement au sultan et invite régulièrement l'agent du gouvernement à venir recevoir l'impôt. Il dissimule ainsi ses véritables sentiments et son désir d'indépendance, mais la puissance du sultan l'entoure maintenant de

tous côtés.

Un de leurs généalogistes m'a dicté les renseignements qui suivent c'est la famille Tamel-Ibn-Bousak qui fournit à la ville d'El-Hamma les membres du corps des cheikhs. Tamel fut le

A la page 27 de ce volume, notre auteur écrit ce nom MoulahemIbn-Abi-Einan.

premier de cette maison qui exerça le commandement. Ouchah, dit le même généalogiste, était fils de Tamel, et ses descendants formaient deux familles, les Beni-Hacen et les Beni-Youçof. De cette manière, Hassan-Ibn-Hedjrès, Moulahem, Omar et AbouAllan appartiennent tous à la famille des Beni-Hacen, et Mohammed-Ibn-Ahmed-Ibn-Ouchah est de la famille des Beni-Youçof. Ces indications ne s'accordent pas avec celles qui précèdent, et Dieu seul en sait l'exactitude.

Quant à Nefzaoua et aux cantons de Castilia, on les considère maintenant comme dépendances de Touzer. Ils consistent en un grand nombre de villages, peu éloignés les uns des autres et situés au sud-est de Touzer, ville dont ils sont séparés par la fameuse sibkha1 dont la traversée est si dangereuse et qu'on ne doit pas essayer de passer à moins de suivre une ligne de route qui est indiquée par des poutres dressées [de distance en distance]. Quelquefois le voyageur qui s'y aventure s'écarte du chemin et périt englouti.

Ces villages ont pour habitants quelques débris de la tribu de Nefzaoua, branche de la souche des Berbères-Botr. Ils y sont restés depuis la ruine de leur peuple et l'empiétement des Arabes sur les territoires appartenant aux populations berbères. Ils ont chez eux des confédérés d'origine franque dont les ancêtres vinrent de Sardaigne. Ceux-ci s'y établirent d'abord comme [chrétiens] tributaires, payant la capitation, et leurs descendants y restent encore. Des Arabes, appartenant les uns à la tribu d'EsCherîd et les autres à celle de Zoghb. famille soleimide, sont ensuite venus s'établir chez eux, parce qu'ils n'avaient plus assez de moyens pour mener la vie de nomades. Ils y ont acquis des terres et des eaux. Leur nombre a fini même par surpasser celui des Nefzaoua, de sorte qu'ils forment, à présent, la majorité de la population. Les Nefzaoua n'ont pas de chef spécial, vu leur faiblesse numérique, et ils restent pour l'ordinaire, eux et leur pays, sous la juridiction de Touzer. Aujourd'hui, le commandement de

Voy. t. I, p CIV.

ce peuple appartient à celui d'entre les chefs djeridiens qui est le plus en faveur à la cour des Hafsides. Nous avons inséré l'histoire de ces chefs dans notre notice sur cette dynastie, puisqu'ils en sont les serviteurs et lui doivent leur fortune.

HISTOIRE DES BENI-MEKKI, CHEFS DE LA VILLE DE CABES ET DE SES DÉPENdances.

Cabes était autrefois un des boulevards de l'Ifrîkïa et faisait partie des gouvernements dont se composait l'empire. Depuis l'époque de la conquête musulmane et pendant la durée des dynasties aghlebite, fatemide et sanhadjienne [zîride et hammadite], cette ville recevait ses gouverneurs de Cairouan. Quand les Arabes hilaliens envahirent l'Ifrîkïa, en y répandant la dévastation et que l'empire sanhadjien se morcela, El-Moëzz-IbnMohammed le sanhadjien 2 prit le commandement de Cabes. Sur l'ordre de Mounès-Ibn-Yahya-es-Sinberi, chef des Mirdas, tribu ri ahide, El-Moëzz remit l'autorité à son frère Ibrahîm. Celui-ci garda le commandement jusqu'à sa mort et eut pour successeur son frère Cadi3. Lors du règne de Temîm-Ibn-Badîs, les habitants de Cabes assiégèrent Cadi [dans la citadelle] et, l'ayant mis à mort, ils proclamèrent la souveraineté d'Omar-Ibn-el-MoëzzIbn-Badis qui était alors en révolte contre son frère Temîm. Ceci eut lieu en l'an 489 (1096). Temîm s'empara alors de Cabes, mais il dut subir lui-même la domination des Arabes et céder cette ville avec les contrées voisines aux Zoghba, tribu hilalienne. Les Rîah enlevèrent Cabes aux Zoghba, et MegguenIbn-Kamel y établit son autorité.

'Dans le texte arabe, lisez oulatiha à la place de ouilaïetiha

2 Voy. t. 11, p. 35.

3 Dans le texte arabe des manuscrits et de l'édition imprimée, il faut lire Cadi-Ibn-Mohammed à la place de Cadi-Ibn-Ibrahim,

Ce chef appartenait aux Dehman, famille sœur de celle des Fadegh et formant avec elle la tribu rîahide des Beni - Ali. Megguen fonda à Cabes un royaume qu'il transmit à ses enfants, les Beni-Djamê. Cette petite dynastie subsista jusqu'à la conquête de l'Ifrîkïa par les Almohades, quand Modafè-Ibn-Rached, dernier souverain de la maison des Djamê, prit la fuite en apprenant qu'Abd-el - Moumen venait d'envoyer un corps de troupes contre lui. Le vainqueur incorpora Cabes dans ses états et mit fin à la domination des Beni-Djamê. Les princes de la famille d'Abd-el-Mournen qui gouvernaient l'Ifrikïa confiaient le gouvernement de Cabes à des officiers almohades. Ensuite Caracoch et les fils de Ghania se rendirent maîtres de cette ville, de Tripoli et des contrées qui en dépendent. Les Almohades reprirent Cabes sur Yahya-Ibn-Ghanîa et y rétablirent leurs gouverneurs. Après la mort du cheikh Abou-Mohammed-Abd-elOuahed, la famille d'Abou-Hafs' passa en Ifrîkïa pour la seconde fois; le sultan almohade El-Adel ayant confié le gouvernement de ce pays à Abou-Mohammed-Abd-Allah, fils d'Abd-el-Ouahed. L'émir Abou-Zékérïa, frère d'Abou-Mohammed, reçut en même temps le gouvernement de Cabes et alla s'y installer. Ensuite survinrent la déposition d'Abou-Mohammed par Abou-Zékérïa et la révolte de celui-ci contre la dynastie d'Abd-el-Moumen.

A cette époque, le conseil administratif de Cabes se composa d'individus appartenant, les uns aux Beni-Moslem et les autres aux Beni-Mekki, familles qui tenaient le premier rang dans la ville. Je ne me rappelle plus le nom de l'aïeul auquel les Moslem font remonter l'origine de leur maison, mais je sais que Mekki, l'ancêtre des Beni-Mekki, était fils de Ferad), fils de ZîadetAllah, fils d'Abou-'l-Hacen, fils de Mohammed, fils de ZiadetAllah, fils d'Abou-'l-Hocein, de la tribu de Louata. Comme les Beni-Mekki s'étaient dévoués à la cause d'Abou-Zékérïa, cet émir, au moment d'usurper le trône de l'Ifrikïa, obtint l'appui d'Abou-'l-Cacem-Othman, fils d'Abou-'l-Cacem, fils de Mekki, et, par l'influence de ce chef, il s'assura l'adhésion des habitants de Cabes. Par ce service, Abou-Cacem et sa famille méritèrent une haute place dans la faveur du nouveau souverain, ce qui

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leur procura un grand accroissement de considération. Etant parvenus à éteindre les dernières lueurs de l'influence exercée par leurs rivaux, les Beni-Moslem', en les accusant d'avoir soutenu Ibn-Ghania, ils occupèrent eux-mêmes toutes les places du grand conseil de la ville et conservèrent leurs avantages pendant les règnes d'Abou-Zékérïa I et de son fils, El-Montancer. Ensuite eut lieu l'assassinat d'El-Ouathec-el-Makhlouê, fils d'El-Mostancer, et de ses enfants par leur oncle, le sultan AbouIshac, événement qui donna naissance à l'affaire de l'imposteur Ibn-Abi-Omara. Cet homme s'étant fait seconder par Nacîr, affranchi de la famille hafside qui cherchait à venger la mort de ces princes, se donna pour El-Fadl, fils du sultan El-Makhlouê, et réussit à tromper toute la nation. Quand Nacîr eut publiquement appuyé les prétentions d'Ibn-Abi-Omara et décidé les Arabes à le soutenir, ces nomades suivirent l'exemple d'Abdel-Mélek-Ibn-Othman-Ibn-Mekki, chef de Cabes, qui fut le premier à envoyer ses hommages au faux El-Fadl. Les habitants de Cabes cédèrent à l'influence de leur chef et envoyèrent aussi prétendant l'assurance de leur dévouement. Par cette conduite, Abd-el-Mélek acquit une haute position à la cour de l'usurpateur. Aussi, en l'an 681 (1283), quand ce fantôme de khalife monta sur le trône, le représentant de la famille Mekki obtint la direction des finances de l'état, avec le droit de nommer aux emplois et de renvoyer les agents qui ne lui plaisaient pas. Il fut même autorisé à fixer le montant des impôts, à en faire la répartition et à régler les comptes de tous les employés de son administration. Ibn-Abi-Omara lui donna de plus une forte somme d'argent, tirée du trésor public, et lui assigna d'ahondantes rations et un traitement considérable. Parmi les cadeaux qu'il lui envoya fut celui de toutes les jeunes esclaves qui se trouvaient dans le palais du feu sultan.

En 683 (1284), quand la mort de l'imposteur permit au

1 Ici, le texte arabe porte Beni-Selim.

* Expression tirée du Coran; sourate 38, verset 33.

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