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velle à Abd-el-Moumen par une lettre dont la rédaction avait été confiée à Abou-Djâfer-Ibn-Atïa.

Abou-Ahmed-Atïa, père de cet écrivain célèbre, avait été secrétaire d'Ali-Ibn-Youçof et de Tachefin, fils d'Ali. Tombé entre les mains des Almohades, il dut la vie à la clémence d'Abdel-Moumen; mais, ayant tenté de s'évader à l'époque où ce monarque se tenait devant Fez, il fut ramené et mis à mort malgré ses supplications. Son fils Ahmed avait servi Ishac-Ibn-Ali à Maroc, en qualité de secrétaire; mais il fut compris dans le nombre de prisonniers auxquels le vainqueur accorda une amnistie. Il accompagna Abou-Hafs dans cette expédition et, d'après le désir de ce chef, il écrivit à Abd-el-Moumen l'annonce de la victoire remportée par les Almohades. Le prince trouva cette lettre si bien tournée qu'il en prit l'auteur pour secrétaire, et, ayant ensuite reconnu tout le mérite de son protégé, il l'éleva au rang de vizir. Ahmed fit alors sentir son autorité jusqu'aux bornes de l'empire; il commanda à des corps d'armée, il amassa des trésors qu'il répandit ensuite avec profusion, et parvint, enfin, à un degré de faveur auprès du sultan que personne, sous cette dynastie, n'atteignit jamais depuis. A la fin cependant, les scorpions de la délation glissèrent jusqu'à la couche où il s'était mollement étendu et lui donnèrent la mort on sait que le khalife [Abd-el-Moumen] le destitua en l'an 553 (1158) et le fit mourir dans la prison où il l'avait relegué.

Le cheikh Abou-Hafs étant rentré de l'expédition de Massa, se reposa quelques jours à Maroc et marcha ensuite contre les populations du Deren qui avaient embrassé le parti de l'imposteur. Dans les montagnes de Nefis et de Hîlana, il tua tant de monde et fit tant de prisonniers que le reste des habitants s'empressa de faire sa soumission. Dans une nouvelle expédition, il marcha de Maroc contre les Heskoura et les massacra jusque dans leurs châteaux et places fortes. Ensuite, il alla s'emparer de Sidjilmessa et, revenu à Maroc, il entreprit une troisième campagne contre les Berghouata.

Cette fois-ci, la guerre traîna en longueur et finit par la déroute des Almohades. Le feu de la révolte êclata de nouveau

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dans le Maghreb; les habitants de Ceuta massacrèrent leur verneur, Youçof-Ibn-Makhlouf de Tinmelel, ainsi que tous les Almohades qui se trouvaient avec lui. Le cadi Eïad passa en Espagne et ayant trouvé à Algésiras Yahya-Ibn-Ali-Ibn-Ghanîa, le chef messoufite qui commandait dans ce pays, il lui demanda un gouverneur pour la ville de Ceuta. Ibn-Ghanta le renvoya en Afrique avec Yahya-Ibn-Abi-Bekr-es-Sahraouï, le même chef qui s'était échappé de Fez lors du siége de cette ville par Abdel-Moumen et qui s'était ensuite rendu de Tanger à Cordoue, pour y joindre le prince almoravide. Arrivé à Ceuta avec Eïad, Es-Sahraouï alla soutenir ses nouveaux alliés, les Berghouata, les Dokkala et d'autres tribus qui venaient de se révolter à la suite de la défaite des Almohades.

En l'an 542 (1447-8), Abd-el-Moumen marcha en personne contre eux, pénétra dans leur pays, brisa leur puissance, les força à la soumission et les obligea à rompre avec Es-Sahraouï et les Lemtouna. Rentré à Maroc, après une absence de six mois, il écouta les sollicitations de plusieurs chefs de tribu et expédia à Es-Sahraouï des lettres de pardon. La tranquillité se rétablit alors dans tout le Maghreb. Ceuta rentra dans l'obéissance et Salé vit pardonner ses habitants et raser ses fortifications.

INVASION DE L'ESPAGNE PAR LES ALMOHADES.

Abd-el-Moumen tourna alors ses regards vers l'Espagne, pays dont les Almoravides venaient d'apprendre la mort de Tachefin-Ibn-Ali, le siége de Fez par l'armée almohade et la révoite du commandant de leur flotte, Ali-Ibn-Eïça-Ibn-Meimoun. Cet officier s'était rendu au camp d'Abd-el-Moumen, sous les murs de Fez, et rentré à Cadix, d'où il était parti et dont il s'était

↑ Dans la traduction anglaise de l'Histoire des dynasties musulmanes de l'Espagne, par El-Maccari, v. 1, Appendice, pp. XLIX et suivantes, M. de Gayangos a donné une traduction des chapitres dans lesquels Ibn-Khaldoun raconte les expéditions des Almohades dans ce pays.

emparé, il avait célébré la prière, dans la grande mosquée, au nom du souverain almohade. Ce fut ainsi qu'en l'an 540 (1145– 4446), on prononça, en Espagne, la première khotba pour la nouvelle dynastie. Déjà, pendant le siége de Tlemcen, Abd-elMoumen avait reçu la visite d'Abou-Bekr-Ibn-Hobaïs1 qui lui apporta une lettre de la part d'Ahmed-Ibn-Cassi, seigneur de Mertola, [le même qui devint plus tard] le coryphée du parti [almohade] en Espagne; mais, comme l'auteur de cet écrit lui avait donné le titre de Mehdi, il en fut très-mécontent et ne lui avait pas répondu. Ibn-Cassi s'étant alors laissé enlever Mertola par Seddraï-Ibn-Ouézîr, seigneur de Badajoz, de Béja et de l'Espagne occidentale, écouta les conseils d'Ali-Ibn-Eïça, et, après la prise de Maroc par les Almohades, il traversa le Détroit pour aller trouver Abd-el-Moumen. Débarqué à Ceuta où il obtint une escorte de Youçof-Ibn-Makhlouf, il se rendit auprès du monarque almohade et lui démontra combien ce serait facile que de soumettre l'Espagne et d'y renverser la domination almoravide.

Cette démarche eut tout le succès qu'Ibn-Cassi pouvait espérer; il repartit pour l'Espagne avec un corps de troupes commandé par Berraz-Ibn-Mohammed-el-Messoufi, le même chef qui avait abandonné Tachefîn pour se joindre aux Almohades et qui emportait maintenant la commission de faire la guerre aux Almoravides de ce pays et aux chefs qui s'y étaient déclarés indépendants. Plus tard, Abd-el-Moumen lui envoya un renfort sous les ordres de Mouça-Ibn-Saîd, et, quelque temps après, il lui en expédia un second sous la conduite d'Omar-Ibn-Saleh-esSanhadji.

La première opération de ces troupes fut d'assiéger Xérès, ville dans laquelle Abou-'l-Ghamr-Ibn-Azzoun, seigneur de Ronda, s'était établi comme souverain indépendant. De là, elles marchèrent sur Niebla et, en ayant reçu la soumission du seigneur, Youçof-Ibn-Ahmed-el-Batrougui, elles prirent la

1 Variantes: Habich, Habcen.

Variante: El-Batrouhi.

route de Mertola où Ahmed-Ibn-Cassi avait déjà fait reconnaître la suprématie du gouvernement almohade. Ensuite, elles enlevèrent d'assaut la forteresse de Silves et, après l'avoir livrée à Ibn-Cassi, elles se portèrent du côté de Béja et de Badajos, villes dont le seigneur, Seddraï-Ibn-Ouezîr, s'empressa de faire acte d'obéissance.

Cette expédition terminée, Berraz ramena l'armée almohade à Mertola où il passa l'hiver; et, s'étant mis en marche, l'année suivante, avec l'intention de mettre le siége devant Séville, il reçut la soumission des habitants de Talyata (Tejada) 1 et de Hisn-el-Casr 2.

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Ayant alors réuni sous ses ordres tous les chefs qui s'étaient révoltés [contre les Almoravides], il parut sous les murs de Séville dont il forma le blocus et intercepta les communications avec la mer. Dans le mois de Châban 541 (janvier 1447), il enleva cette ville de vive force, et, comme les Almoravides s'étaient enfuis pour gagner Carmona, il se mit à leur poursuite et tua tous ceux qu'il put atteindre. Dans le tumulte de l'assaut, AbdAllah, fils du cadi Abou-Bekr-Ibn-e-Arebi, perdit la vie par un fatal malentendu. Le père de ce jeune homme partit alors pour Maroc avec une députation des habitants de Séville, afin de présenter les hommages de ses concitoyens à Abd-el-Moumen. Le monarque almohade, qui venait d'apprendre, par une dépêche de son général, la nouvelle de cette conquête, accueillit les envoyés avec de grands égards et les congédia après leur avoir

1 Variantes Tolilta, Toleilla. Cette dernière leçon, qui représente le nom arabe de Tolède, est inadmissible. Celle du texte se reproduit plus loin, où notre auteur parle du règne d'El-Adel: il dit qu'à cette époque les chrétiens firent plusieurs incursions dans les territoires de Séville et de Murcie, et qu'ils mirent en déroute l'armée musulmane ȧ Talyata. Or, nous savons par la chronique de Don Luc, évêque de Tuy, cité par Ferreras, t. IV, p. 93 de la traduction française, qu'en l'an 1223 (sous le règne d'El-Adel), les troupes du roi de Léon, commandées par Don Martin Sanchez, portèrent le ravage dans les environs de Séville et défirent l'armée musulmane à Téjada. Par ce passage, la synonymie me semble bien établie.

• Castro Marim, selon M. de Gayangos.

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accordé des fiefs et des gratifications. Cette présentation eut lieu en 542 (1447-8). Le cadi Abou-Bekr mourut pendant son voyage de retour et fut enterré dans le cimetière de Fez.

Les troupes Almohades en garnison à Séville comptèrent parmi leurs chefs deux frères du Mehdi, dont l'un s'appelait Abd-elAzîz et l'autre Eïça. Ces cheikhs se conduisirent d'une manière indigne à l'égard des habitants, dont ils ne respectèrent ni les biens, ni la vie; et, ensuite, ils dressèrent un guet-apens pour Youçof-el-Batrougui. Ce chef, qui était alors seigneur de Niebla, ayant découvert leurs machinations, rentra dans sa ville d'où il expulsa la garnison almohade. Ayant alors envoyé des agents à Téjada et à Hisn-el-Casr, il renouvella son alliance avec les Almoravides qui restaient encore en Espagne. Ibn-Cassi se révolta aussi à Silves; Ali-Ibn-Eiça-Ibn-Meimoun en fit de même à Cadix, et, Mohammed, fils d'Ali et petit-fils d'El-Haddjam, suivit leur exemple à Badajos. Abou-'l-Ghamr-Ibn-Azzoun, seigneur de Xérès, de Ronda et des lieux voisins, resta fidèle à ses nouveaux maîtres.

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Les Almohades établis dans Séville se trouvèrent alors dans une position d'autant plus critique qu'Ibn-Ghanîa venait de s'emparer d'Algésiras et que le peuple de Ceuta était en insurrection; aussi, les deux frères du Mehdi s'empressèrent de quitter la ville avec leur cousin Isliten et tous leurs partisans. Arrivés à Mont Bîster 3, ils furent rejoints par Ibn-Azzoun, et allèrent avec lui pour faire le siége d'Algésiras. Après avoir emporté

Dans le texte arabe imprimé, il faut insérer le pronom elledin après le mot bel-Moletthemin.

Nous feroos remarquer ici que les noms des chefs musulmans qui figurèrent, à cette époque, en Espagne, sont étrangement altérés par les historiens chrétiens: d'Ibn-Ghania, ils ont fait Aven-Gama; Moham med-Ibn-Sad-Ibn-Merdenich est devenu Mahomet Abenzat, et Aben Cat, et Abenlop. Seif ed-Dola (l'épée de l'empire), titre honorifique d'AhmedIbn-Houd, roi de Saragosse, est écrit Zafadola, etc.

3 Variantes Bebester, Bebechter, Betester, Yebester, Bechter.- M. de Gayangos place cette montagne, qu'il nomme Bichter, entre Malaga et Ronda.

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