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la monnaie, chose qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait voulu faire, à cause de leur respect pour les droits des Fatemides. IbnHammad rapporte que les dinars (pièces d'or) de Yahya portaient sur chaque face des inscriptions disposées en trois lignes et en cercle. Le cercle d'une des faces offrait ces mots: Craignez le jour où vous serez ramenés devant Dieu; alors chaque âme sera rétribuée selon ses œuvres, et elles ne subiront aucune injustice. Les trois lignes de la même face se composaient de ces mots: Il n'y a point d'autre dieu que Dieu; Mahomet est l'envoyé de Dieu; Yahya, fils d'El-Aziz-Billah, l'émir victorieux, se place sous la protection de Dieu 2. Dans le cercle du revers on lisait: Au nom de Dieu, le Miséricordieux, le Clément ! ce dinar a été frappé à En-Naceria, en l'an cinq cent quarantetrois. Les trois lignes du revers renfermaient ces mots : L'imum est Abou-Abd-Allah-el-Moctafi-li-Amr-Illah, Emir-el-Mouminin, l'abbacide".

En l'an 543 (1448-9), il se rendit à la Calâ pour y faire des perquisitions et en emporter tous les objets de valeur qui y restaient encore.

Son général, le jurisconsulte Motarref-Ibn-Ali-Ibn-Hamdoun, marcha, par son ordre, contre Ibn-Forcan qui s'était révolté à Touzer, et ayant emporté cette ville de vive force, il lui envoya le chef rebelle. Ce malheureux fut enfermé dans la prison d'Alger et y passa le reste de ses jours. Selon un autre récit, Yahya lui ôta la vie.

Dans une seconde expédition, Motarref s'empara de Tunis et mit le siége devant El-Mehdïa. La vigoureuse résistance que cette place lui opposa le fit renoncer à sa tentative et reprendre le chemin de Bougie'.

1 Coran, sourate ï, verset 281.

:

A la lettre tient ferme à la corde de Dieu, expression tirée du Coran, sour. III, vers. 98.

3 On voit par ceci que Yahya, en changeant le coin de la monnaie, répudia la souveraineté des Fatemides et reconnut celle des Abbacides.

Motarref prit Tunis en 522 et assiégea El-Mehdïa en 530.—(Baïan.) - Voy. aussi p.p. 27 et 30 de ce volume.

Quand les chrétiens [de la Sicile] se rendirent maîtres d'ElMehdïa, El-Hacen, le souverain qu'ils venaient de chasser, alla trouver Yahya-Ibn-el-Azîz, lequel l'envoya à Alger chez son frère1, El-Caïd. Quand les Almohades marchèrent sur Bougie, ElCaïd abandonna Alger, et El-Hacen, que le peuple de cette ville prit alors pour chef, se rendit au-devant d'Abd-el-Moumen et parvint à leur concilier la bienveillance de ce monarque. Yahya plaça alors son frère Sebâ à la tête d'un corps de troupes et l'envoya contre les Almohades. La défaite de cette armée entraîna la chute de Bougie, et Yahya s'embarqua pour la Sicile afin de se rendre, de là, à Baghdad. Au lieu de pousser jusqu'à cette île, il alla débarquer à Bône, chez son frère 2 El-Hareth qui lui reprocha amèrement la faute qu'il venait de commettre en abandonnant ses états. Piqué d'un aussi mauvais accueil, il alla trouver son frère, El-Hacen, à Constantine, et le décida à lui remettre le commandement de cette forteresse. Sur ces entrefaites, les Almohades prirent d'assaut El-Calâ et la détruisirent de fond en comble, après y avoir tué Djouchen, fils d'El-Azîz, et Ibn-ed-Dahhas, chef athbejite.

En l'an 547 (1152-3), Yahya prêta le serment de fidélité à Abd-el-Moumen, et lui céda la ville de Constantine moyennant certaines conditions que le souverain almohade remplit trèsexactement. Conduit à Maroc par l'ordre de ce prince, il y demeura jusqu'à l'an 558 (1163), quand il alla s'établir à Salé dans le château des Beni-Achera. Il y mourut la même année.

El-Hareth, fils d'El-Azîz, et seigneur de Bône, s'enfuit en Sicile, et ayant obtenu quelques secours du seigneur de cette île, il revint prendre possession de la ville qu'il avait abandonnée. Plus tard, il tomba au pouvoir des Almohades et mourut dans les tourments. Avec lui s'éteignit la dynastie des Hammadites.

De toutes les tribus issues de Telkata il n'en reste plus une

1 Ci-devant, p. 28, on voit que le gouverneur d'Alger était fils d'ElAziz.

2 Ci-devant, p. 28, El-Hareth est désigné comme le frère d'El-Azîz, père de Yahya,

3 Le texte arabe imprimé porte, par erreur, Teklatta.

seule, à moins qu'on admette les prétentions de quelques peuplades qui habitent les bords de la rivière de Bougie et qui s'attribuent cette origine. Elles font aujourd'hui partie de la milice et ont la jouissance de certaines terres aux environs de la ville, sous la condition de marcher avec les troupes du sultan, toutes les fois que lui ou ses généraux se mettent en campagne.

HISTOIRE DE LA DYNASTIE SANHADJIENNE FONDÉE A GRENADE PAR HABBOUS-IBN-MAKCEN-IBN-ZÎRI 1.

Badîs, fils d'El-Mansour et petit-fils de Bologguîn-Ibn-ZîriIbn-Menad, proclamé souverain de l'Ifrîkïa en l'an 385 (995), confia à ses oncles et autres parents le commandement des forteresses de cet empire. A Hammad, il donna le gouvernement d'Achîr, et, à Itouweft, frère [de Hammad], celui de Tèhert. Zîri-Ibn-Atïa, seigneur de Fez et chef de la nation maghraouienne, envahit alors le territoire sanhadjien avec l'intention d'y faire reconnaître la souveraineté de Hichâm-el-Mouaïed, khalife de Cordoue, et vint, à la tête des Zenata, mettre le siège devant Tèhert. L'armée que Badîs envoya contre lui, sous la conduite de Mohammed Ibn-Abi-'l-Arab, ayant essuyé une défaite dans le voisinage de cette ville, ce monarque marcha lui-même à la rencontre de l'ennemi; et, bien que Felfoul, fils de Saîd-Ibn-Khazroun et seigneur de Tobna, se fût révolté contre lui, il força Zîri-Ibn-Atïa à une prompte retraite. Ayant alors laissé dans Achîr ses grands oncles, Zaoui, [Makcen,] Djelal, Arem et Mâhnîn, et ses oncles Hammad et Itouweft, il repartit pour Cairouan. En l'an 389 2, Zaoui et ses frères tramèrent une révolte contre Badîs et abandonnèrent Hammad à ses propres ressources, après lui avoir enlevé tous ses bagages. Abou-'l-Behar, fils de Zîri, qui se trouvait alors avec Badîs, craignit la colère de ce prince

1 Dans la continuatiou de l'Art de vérifier les dates, t. II, p. 468, on trouvera une notice sur cette dynastie.

2. Le texte arabe et les manuscrits portent 386. Cette date est fausse.

et alla rejoindre les rebelles. Comme Badîs ne pouvait s'occuper d'eux à cause de sa guerre avec Felfoul et avec Yanès, affranchi qu'El-Hakem [le fatemide, souverain de l'Egypte] avait nommé au gouvernement de Tripoli, les révoltés profitèrent de son embarras pour donner carrière à leur perversité : ils portèrent le ravage dans tout le pays et formèrent même une alliance avec Felfoul. Abou-'l-Behar les quitta vers cette époque et se réconcilia avec Badîs. En l'an 394 (1004), ils eurent, avec Hammad, une rencontre qui amena la défaite de leurs partisans et coûta la vie à Makcen et à ses deux fils1. Zaoui se jeta dans le Chennouan, montagne située dans la partie maritime du gouvernement de Milîana, et, de là, il passa en Espagne avec ses fils, ses neveux et ses gens. El-Mansour-Ibn-Abi-Amer, régent de l'empire oméïade et tuteur du khalifat, accueillit les réfugiés avec empressement et les attacha à sa personne pour en faire les soutiens de son pouvoir, les instruments au moyen desquels il compta établir sa domination sur l'empire et enlever au khalife toute son autorité. A cet effet, il les enrôla dans le corps de Zenatiens et d'autres Berbères qu'il avait pris à son service et avec lequel il venait de remplacer, en Espagne, la milice du sultan ainsi que les troupes oméïades et les contingents des tribus Arabes.

La puissance de ces Sanhadjiens augmenta à un tel degré qu'ils devinrent le principal appui d'El-Mansour et de ses fils et successeurs, El-Modaffer et En-Nacer. Lors de la chute de cette famille, Zaoui prit une part très-active à la guerre qui éclata entre les musulmans espagnols et les troupes berbères 2. Soutenu par les Sanhadja, par le corps entier des Zenata et par les autres Berbères, Zaoui s'acharna sur la ville de Cordoue jusqu'à ce qu'il parvînt à y établir l'autorité d'El-Mostaïn-Soleiman, fils d'El-Hakem et petit-fils de Soleiman-Ibn-en-Nacer. Ils avaient proclamé ce prince khalife et lui avaient juré fidélité, ainsi que

Ilaut lire ouebnaïhi dans le texte arabe. Voy. ci-devant, p. 17. Voy. la continuation de l'Art de vérifier les dates, t. 1, p. 426 et suiv.

nous l'avons raconté dans notre chapitre sur les Oméïades d'Espagne1.

Les Berbères emportèrent Cordoue d'assaut, y pénétrèrent avec leur khalife, en se livrant à tous les excès; ils dépouillèrent les habitants de leurs biens et portèrent la violence et le déshonneur au sein des familles les plus respectables. A ce sujet, on raconte des choses épouvantables. Pendant le pillage de la ville, Zaoui alla enlever la tête de son père,, Zîri-Ibn-Menad, du haut de la citadelle où on l'avait plantée 2, et il l'envoya à sa famille pour être déposée dans le tombeau qui renfermait le corps de ce prince.

Quand les Hammoudites, famille [idrîcide] descendue d'Ali [gendre de Mahomet], eurent établi leur autorité en Espagne, la désunion se mit entre les Berbères et le feu de la discorde se propagea dans toutes les parties de ce pays. Les chefs berbères et les grands officiers de l'empire oméïade se précipitèrent à l'envi sur les villes et les provinces, pendant que les Sanhadjiens, déjà maîtres de la campagne d'Elvira, allèrent s'emparer de cette ville.

Zaoui, le coryphée du parti berbère, fit de Grenade la cap itale de ses états et le boulevard de son parti. Profondément affligé des excès auxquels ses compatriotes s'étaient livrés pendant la guerre civile, et convaincu que ces méfaits entraîneraient sur leurs auteurs la vengeance divine et amèneraient la ruine de l'empire qu'il venait de fonder, il prit la résolution d'abandonner l'Espagne. En l'an 410 (1019-20), il alla trouver son parent, le sultan de Cairouan, et, arrivé dans cette capitale, après une absence de vingt ans, il reçut d'El-Moëzz-Ibn-Badîs, [arrière] petit-fils de son frère Bologguîn, l'accueil le plus honorable 3. Ce monarque, dont le royaume jouissait de la plus haute prospérité après avoir beaucoup gagné en étendue et en population, lui

1 Ce chapitre se trouve dans la partie inédite de l'Histoire universelle. Voy. l'introduction à notre premier volume, p. vi.

Voy. ci-devant, p. 8.

3 Voy. ci-devant, p. 19.

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