Les Sanhadja sont les enfants de Sanhadj, nom dont la première lettre doit recevoir dans la prononciation un léger mélange du son du z, et dont la dernière lettre [le dj] est un k se rapprochant du g'. Entre l'n et l'a du même mot, les Arabes ont inséré un h, afin de l'adapter au génie de leur langue. Par suite de ces changements, Zanag est devenu Sanhadjo. Les généalogistes berbères disent que la tribu de Sanhadj a pour aïeul Bernès, fils de Berr; mais Et-Taberi et Ibn-el-Kelbi regardent les Sanhadja et les Ketama comme descendant de Himyer. Nous avons déjà mentionné cette opinion dans notre chapitre sur les Ketama 3. Parmi les traditions que l'historien Et-Taberi rapporte à ce sujet, on lit que Sanhadj était fils d’Isougan, fils de Meiçour, fils d'El-Fend, fils d'Ifrîcos, fils de Caïs. Quelques généalogistes prétendent qu'il était fils d'El-Mothenna, fils d'El-Mansour, fils d'Es-Sabah, fils de Yahsob, fils de Malek, fils d'Amer, fils de Himyer le jeune, fils de Seba. Telle est aussi la généalogie rapportée par Ibn-en-Nahoui 5, historien de la dynastie sanhadjienne; il le fait descendre de Yahsob, personnage dont nous avons fait mention dans la généalogie des tribus himyerides 6; mais la chose n'est pas comme il le dit. Les généalogistes berbères les plus exacts disent que Sanbadj était fils d'Asîl ?, fils de Zéazâ, fils de Tîmta, fils de Sedder, fils de Mou 1 + L'auteur essaie ici de peiodre la prononciation du mot Zanag ou Sanague : il est impossible de la représenter exactement à l'aide des lettres arabes. Les philologues arabes prétendent qu'il faut prononcer Sinhadj ou Sonhadj. Ils paraissent ne s'être pas doutés que ce mot est une altém ration de Zanag. 3 Voy. vol. 1, p. 291. Variante : Nasrgan. Jusqu'à présent le traducteur n'a pu recueillir aucun renseignement au sujet de cet historien. 6 . Pour la généalogie des Himyerides, voyez l’Essai de M. C. de Perceval, tableau I. 7 Variante: Amil. lan, fils de Mesleten”, fils de Serr, fils de Mekcila, fils de Dicous, fils de Halhal, fils de Cherou, fils de Misraïm, fils de Cham. Ils ajoutent que Guezoul, Lamt, Heskoura et Sanhadj naquirent tous de la même mère, laquelle était fille de Zahhîk-Ibn-Madghis et se nommait Tiski-el-Ardja. Ces quatre frères furent appelés les Enfants de Tiski. De ceci il faudrait conclure que les quatre tribus berbères dont nous venons d'indiquer les noms descendent de quatre frères, enfants d'une même mère; mais Dieu sait si cela est vrai. « Les Sanhadja forment plusieurs branches, savoir : les » Telkata [ou Tolokkata], les Andjefa, les Cherta, les Lem» touna, les Messoufa, les Guedala, les Mendaça, les Beni» Quareth et les Itîcen. Les Andjefa se composent des Beni» Mez-Ouaret 2, des Beni-Celît, des Fechtala et des Melouana 3.» Voilà ce que rapportent quelques généalogistes berbères dans leurs livres ; mais certains historiens de la même nation déclarent que le nombre des branches dans lesquelles la tribu de Sanhadja se partage est de soixante-dix. Selon Et-Taberi et Ibn-el-Kelbi, la partie du Désert occupée par les Sanbad ja s'étendait à une distance de six mois de marche. Les Telkata, une des plus grandes divisions de la tribu, fonderent la première dynastie sanhadjite. Ils étaient établis à demeure fixe, dans le territoire qui sépare le Maghreb central de l'Ifrîkïa ; mais les Messoufa, les Lemtouna, les Guedala et les Cherta vivaient sous la tente et habitaient le Désert. Les Andjefa, la branche la plus considérable de la tribu de Sanhadja, formait plusieurs ramifications dont chacune occupait un territoire différent. Les Sanhadja étaient clients de la famille d'Ali-Ibn-Abi-Taleb [gendre de Mahomet), de même que les Maghraoua l’étaient du khalife Othman; mais j'ignore de quelle manière cette relation vint à s'établir. Parmi les Sanhadjiens qui se distinguèrent sous la domination musulmane, on remarqua Thabet -Ibn-Ourzîdan", qui se révolta en Ifrikïa sous le règne d'Es-Saffah, lors de la chute des Oméïades de l'Orient. On cite aussi Abd-Allah. IbnSekerdîd 2 ; Abbad-Ibn-Sadec, général au service de Hammad-. Ibn-Bologguîn; Soleiman-Ibn-Bateinan-Ibn-Alîan, imam de Badis, fils de Bologguîn ; la famille Hamdoun, vizirs des princes hammadites, et dont l'un, appelé Meimoun-Ibn-Djemil, eut 1 Variante : Islin. 2 Mez-Ouaret paraît être la traduction berbère du surnom arabe Ibn-Ouareth (fils de Quareth). 3 Daos les manuscrits, plusieurs de ces noms offrent des variantes; nous en avons signalé les principales dans l'édition du texle arabe. pour oncle maternel.......3, directeur de l'approvisionnement de l'Espagne. Mais il serait trop long de les énumérer tous. Hamdoun, chef de la famille dont nous venons de faire mention, était fils de Soleiman, fils de Mohammed, fils d'Ali, fils d’Alîm. Deux races sanhadjiennes fondèrent chacune un empire : les Telkata en Ifrîkïa et en Espagne; puis, les Messouf et les Lemtouna en Maghreb. Ces deux dernières tribus faisaient partie de la population qui porte toujours le voile (litham), et on les distinguait par le surnom d'Almoravides. Nous traiterons de chacune de ces dynasties. NOTICE DES SANAADJA DE LA PREMIÈRE RACE. HISTOIRE DE LEUR EMPIRE. Les Sanhadja de la première race descendaient de Telkat, fils de Kert, fils de Sanhadj. Leur pays renfermait les villes d'El-Mecîla, Hamza, Alger, Lemdïa [Médéa), Milíana et les régions occupées de nos jours par les Beni-Yezîd, les Hosein, les Attaf, tribus zoghbiennes, et par les Thâleba. Au milieu des Sanhadja vivaient plusieurs peuplades ayant la même origine qu'eux et dont la postérité habite encore les territoires où leurs ancêtres avaient demeuré. Ces peuplades sont les Metennan, les Ouannougha, les · Les noms de plusieurs anciennes tribus berbères commencent par la syllabe our. Il paraît certain que ce mot est l'ancienne forme d'ou (fils). Ourzidan doit alors signifier fils de Zidan. ? Dans le texte arabe, il faut probablement lire : Sekerdid kedalik. Telle est la leçon que nous avons adoptée dans la traduction. 3 Dans les manuscrits, le nom a été laissé en blanc. Beni-Othman, les Beni-Mezghanna, les Beni-Djad, les Telkata, les Botouïa, les Beni-Aïfaoun et les Beni-Khalil. On rencontre les descendants des Telkata dans les provinces de Bougie et de Tunis. Les Telkata avaient la prééminence sur toutes ces tribus. « Du temps des Aghlebides, ils eurent pour chef Menad, fils de » Mencous, fils de Sanhadj le jeune, c'est-à-dire de Zanag, fils » de Ouasfan, fils de Djebrîl, fils de Zeid, fils de Ouasli, fils de » Semlil, fils de Djafer, fils d'El-Yas, fils d'Othman, fils de » Segad, fils de Telkat, fils de Kert, fils de Sanhadj l'ancien. » Voilà comment Ibn-en-Nahoui, l'historien espagnol, expose leur généalogie Quelques historiens de Maghreb rạcontent que Menad, fils de Mencous, gouverna une partie de l'Ifrikïa et du Maghreb central au nom des Abbacides, et qu'il tint son autorité des Aghlebides. il eut pour successeur son fils Ziri-Ibn-Menad, qui devint un des plus puissants des princes berbères et qui eut à soutenir une longue guerre contre ses voisins, les Maghraoua, peuple de race zenatienne qui habitait le Maghreb central. Nous parlerons plus tard de cette guerre. Quand les Fatemides furent parvenus à établir leur domination en Ifrîkïa, Zîri passa de leur côté à cause des liens de clientelle qui attachaient sa famille à celle d'Ali-Ibn-AbiTaleb, et, dès lors, il se montra un de leurs partisans les plus dévoués. S'étant fait appuyer par eux, il obtint l'ascendant sur ses adversaires, les Maghraoua : aussi, cette grande tribu et tous les autres peuples d'origine zenatienne s'éloignèrent à jamais des Fatemides pour embrasser le parti des Oméïades espagnols, dont ils firent reconnaître la souveraineté dans le Maghreb central et dans le Maghreb-el-Acsa. A l'époque où Abou-Yezîd eut presque anéanti la puissance des Fatemides à Cairouan et à El-Mehdïa, Ziri attaqua les Kharedjites, partisans du chef rebelle, et, tout en les harcelant, il fit passer des secours aux Fatemides enfermés dans El-Mehdïa. 1 On trouvera une autre généalogie de cette famille daos l’Appendice, no I. Il rendit ainsi à cette dynastie un service qu'elle n'oublia pas. Voulant toutefois s'assurer un lieu de retraite 'en cas de revers, il bâtit la ville d'Achîr sur le flanc d'une montagne située dans le pays des Hosein et appelée encore aujourd'hui la montagne de Titeri". Ayant fortifié cette résidence avec l'autorisation d'El-, Mansour [le fatemide), il se vit bientôt seigneur d'une des plus grandes villes du Maghreb. L'étendue et la population d'Achîr s'accrurent rapidement, et les pays les plus éloignés y envoyèrent leurs savants et leurs négocianțs. Quand Ismaîl-el-Mansour assiégea Abou-Yezîd dans le château de Kîąna, Zîri lui amena une armée composée de Sanhadja et d'autres peuples berbères. Jusqu'à la prise de cette forteresse, il ne cessa de barceler l'ennemi, et s'étant ainsi acquis l'amitié d'El-Mansour, il rentra en Maghreb, comblé d'honneurs et de riches présents. Outre up diplôme qui le constituait chef des Sanhadja, il obtint de ce prince la permission d'élever des palais, des caravansérails et des bains dans Achir, il reçut aussi le commandement de la ville et de la province de Tehert. Quelque temps après, il autorisa son fils Bologguin à fooder trois villes, l'une sur le bord de la mer et appelée DjézaïrBeni-Mezghanna (les îles des enfants de Nezghanna) , et l'autre sur la rive orientale du Chélif et appelée Miliana ; la troisième porta le nom des Lemdïa , tribu sanhadjienne, Bologguin fut investi par son père du gouvernement de ces trois places, qui sont encore aujourd'hui les villes les plus importantes du Maghreb central. Zîri ne suspendit jamais ses hostilités contre les Maghraoua, et il montra toujours une fidélité inaltérable à la cause des Fatemides. Djouher-el-Kateb eyant fait une expédition dạps le Maghreb-el-Acsa, par l'ordre d'El-Moëzz-li-Din-Illah-Mâdd, amena Ziri avec lui, d'après la recommandation de son souve 2 + Voy. l'Appendice, n° 1. 2 Maintenant Alger. – Les Beni-Mezghanna habitent, de nos jours, l'aghalic des Beni-Djâd, å opze lieues S. E. d’Alger. Voy. la carte dressée par MM. Carelle et Warnier. 3 Maintenant Médéa, en arabe El-Media. Le mot lemaani s'em ploie encore avec la significalion de natif de Médéa. |